Revue de presse Asie - 3 mai 2016

Surveillance renforcée à Pyongyang, scandale sexuel au Cambodge et une nouvelle Nehru-Gandhi en Inde

Six personnes sont accusées de subordination de témoin dans une affaire de scandale sexuel visant un membre de l'opposition cambodgienne. Copie d'écran du Khmer Times, le 3 mai 2016.
Six personnes sont accusées de subordination de témoin dans une affaire de scandale sexuel visant un membre de l'opposition cambodgienne. Copie d'écran du Khmer Times, le 3 mai 2016.

Asie du Nord-Est

The Korea Herald – A l’approche de l’ouverture du septième Congrès du Parti des travailleurs ce vendredi 6 mai, la Corée du Nord renforce la surveillance à travers le pays et sur ses frontières. Notamment sur ses confins septentrionaux avec la Chine. Mais aussi à Pyongyang, où des forces spéciales ont été appelées en soutien pour contrôler les entrées et sorties de la capitale où des milliers de délégués venus des différntes provinces commencent à affluer. Mariages et funérailles ont aussi été interdits pour raisons de sécurité.
Le pays entier est mobilisé depuis le 23 février dernier pour la préparation de Congrès historique, dans une campagne spéciale qui, d’après le calendrier nord-coréen, a pris fin hier. Cette période, destinée à exalter le sentiment national, a été appelée la « lutte des Soixante-dix jours », en mémoire du « combat des Cent jours » qui avait précédé le sixième Congrès en 1980.

Les Nord-Coréens, jeunes ou vieux, hommes, femmes et enfants, ont en effet été appelés par tous les moyens à démontrer leur loyauté au régime : en travaillant deux fois plus et en faisant tout effort supplémentaire pouvant aider à la gloire de la nation. Ils ont aussi été incités à donner de l’argent, de préférence en devises étrangères, en échange de jours de congés ou d’autres avantages. La propagande s’est aussi faite de plus en plus visible à travers le pays où de nombreux panneaux colorés avec des slogans à la gloire de la nation ont été installés par de véritables escadres de volontaires.

South China Morning Post – Une recherche sur Baidu pourrait avoir été fatale à un étudiant de 21 ans. Le « Google chinois » est désormais au cœur d’un scandale. Le 12 avril dernier, Wei Zexi, atteint d’un sarcome, est décédé après avoir déboursé 200 000 yuan (environ 2700 euros) pour un traitement qui s’est malheureusement avéré inefficace. Ce sont les résultats obtenus sur le moteur de recherche chinois qui l’ont incité à choisir cette thérapie expérimentale. Baidu est l’équivalent de Google en Chine. Aujourd’hui, les autorités chinoises mènent une enquête sur la compagnie, accusée d’avoir classé les résultats obtenus en fonction de l’importance de la somme payée par les publicitaires.

Le centre médical qui a accueilli le jeune homme n’admet plus de patients depuis le lundi 2 mai. L’affaire a provoqué l’ire des internautes chinois et les parts du géant Baidu ont chuté de 8 % au Nasdaq.

The Straits Times – Les ministres de la Défense du Japon et des Philippines se sont mis d’accord hier, lundi 2 mai. Tokyo louera cinq avions d’entraînement militaires à Manille. Ils serviront à la formation des pilotes et des mécaniciens philippins. C’est la première fois que le Japon louera son propre matériel militaire à un pays étranger, note le Straits Times – une décision qui fait suite à la levée récente des interdictions que l’archipel s’était imposé sur les exportations d’armes. Voilà de quoi irriter la Chine, directement visée par le rapprochement nippo-philippin. La construction d’îles artificielles et l’affirmation unilatérale de souveraineté par Pékin en mer de Chine méridionale ne cesse d’inquiéter les deux Etats.

Asie du Sud-Est

Khmer Times – Ce lundi 2 mai, la Cour municipale de Phnom Penh, en vertu de l’article 548 du Code pénal, a inculpé quatre membres importants de l’ONG ADHOC, ainsi qu’un employé des Nations unies Sally Soen, et un membre du Comité électoral national (NEC), Ny Chakrya, pour tentative de subordination de témoin. Les six hommes auraient tenté de soudoyer une femme devant bientôt témoigner devant la cour de relations sexuelles illicites avec un membre de l’opposition. Le scandale, très suivi par la presse cambodgienne, a démarré il y a deux mois lorsque des enregistrements de conversations intimes entre Kem Sokha, vice-président de la ligue d’opposition, le Parti national du sauvetage du Cambodge, et Khom Chandaraty, employée dans un salon de coiffure, ont fait surface. La jeune femme de 25 ans et sa famille auraient reconnu avoir subi des pressions pour se rétracter et nier toute relation avec Khem Sokha.

Les six hommes risquent une peine de cinq à dix années d’emprisonnement. Ce dernier rebondissement dans cette affaire de scandale sexuel a suscité la colère des défenseurs des droits de l’homme et notamment de Sam Rainsy, leader de l’opposition en exil volontaire, qui dénonce une nouvelle tentative du Premier ministre Hun Sen, au pouvoir depuis trente-et-un ans, d’affaiblir l’opposition.

Myanmar Times
– Le 28 avril, les nationalistes birmans manifestaient devant l’ambassade des Etats-Unis à Rangoun, contre l’usage du mot « Rohingya ». L’ambassade avait exprimé ses condoléances pour les victimes d’un naufrage dans l’Etat d’Arakan. Cette fois-ci, les nationalistes organisent un rassemblement le 5 mai et entendent également dénoncer le gouvernement pour ne pas avoir officiellement rejeté les déclarations de l’ambassade américaine.

Les nationalistes birmans sont soutenus par l’association patriotique Ma Ba Tha, (le comité pour la protection de la race et de la religion), et le « Peace and Diversity Party ». L’un des organisateurs de la manifestation du 5 mai a exprimé qu’il n’était pas trop tard, et que le gouvernement pouvait encore dénoncer l’ambassade des Etats-Unis.

En parallèle, le mardi 3 mai, un camp de déplacés Rohingya a pris feu, et les logements de 2000 résidents ont été détruits. L’occasion pour les groupes de défense des droits de l’homme, de pousser le gouvernement birman à faciliter le droit au retour de ces populations déplacés à l’intérieur de leur propre pays.

The Philippine Star – 44,5 millions d’euros et 61 propriétés (dont la majorité sont aux noms de ses enfants). C’est le patrimoine du favori à la présidentielle, Rodrigo Duterte, d’après les informations dévoilées aujourd’hui par le sénateur Antonio Trillanes IV. Une fortune étonnante pour celui qui travaille son image de « candidat des pauvres et du peuple », commente The Philippine Star. Trillanes, ainsi que certains candidats à la présidentielle du 9 mai, ont donc appelé le grand favori à plus de transparence, en ouvrant ses comptes à la Bank of the Philippines Islands (BPI). En réaction à ces annonces, le parti de Duterte (PDP-Laban) s’est fendu d’un communiqué rappelant que ces biens n’ont pas été mal acquis. Quoi qu’il en soit, il n’est pas certain que des accusations de corruption puissent enrayer la dynamique de soutien à Duterte, surnommé le « Donald Trump de l’Asie » pour les propos sulfureux qui émaillent ses discours de campagne (voir notre revue de presse du 21 avril). Le dernier sondage en date le crédite de 33% des intentions de vote, devançant de 11 points le deuxième candidat du classement.
Jakarta Globe – A Java, la police se prépare pour une nouvelle vague d’exécutions de prisonniers condamnés à la peine capitale. Plusieurs pelotons d’exécution ont été mis en place dans la prison de Nusakambangan, théâtre tristement célèbre de 14 exécutions l’an dernier – notamment les Australiens Andrew Chan et Myuran Sukumaran, à la tête du réseau de traffic de drogue, Bali Nine.

Pour l’instant, les policiers refusent de divulguer le nombre de condamnés prévus pour cette vague d’exécutions. La dernière qui comportait des étrangers a suscité une vague d’indignation de la part de la communauté internationale. Les diplomates des pays concernés ont fait pression, notamment en renvoyant les ambassadeurs indonésiens à Jakarta.

Parmis les étrangers dans le couloir de la mort en Indonésie, figurent la « grand-mère » britannique Lindsay Sandiford (60 ans) et la Philippine Mary Jane Veloso qui l’an dernier avait échappé de justesse au peloton d’exécution à la suite d’un témoignage in extremis. On sait néanmoins depuis le 30 avril qu’elle ne fait pas partie de de la liste des futurs exécutés et que son « affaire est en cours de traitement » d’après le procureur général Prasetyo.

Asie du Sud

Scroll.in – C’est l’Etat indien le plus peuplé. En Uttar Pradesh, le Parti du Congrès veut donner aux élections locales de 2017 un avant-goût des élections générales de 2019, si ce n’est « un référendum sur Narendra Modi ». Et quoi de mieux, pour battre le parti nationaliste hindou (BJP) et sortir de sa « crise existentielle », que de nommer un membre de la dynastie Nehru-Gandhi comme candidat au poste de ministre en chef ? Le dévolu du parti s’est ainsi jeté sur la « charismatique » Priyanka Gandhi, arrière-petite fille de Jawaharlal Nehru, petite-fille d’Indira Gandhi, fille de Rajib et de Sonia, sœur de Rahul. Sa nomination pourrait intervenir avant le 19 mai, date à laquelle seront communiqués les résultats des élections locales du Bengale-Occidental, de l’Assam, du Tamil Nadu et du Kerala. En effet, puisque sa défaite est probable dans ces Etats, le Parti du Congrès ne souhaite pas qu’une nomination ultérieure de Priyanka Gandhi ne puisse être interprétée comme un « geste désespéré ».

Certes, si elle venait à être confirmée, la candidature de Priyanka Gandhi marquerait une première dans l’histoire de la dynastie Nehru-Gandhi. Jusqu’à présent, ses membres n’ont brigué que des postes nationaux, rappelle Scroll.in. Mais la stratégie, pensée par le think-tank du Parti du Congrès, est loin d’être infondée. Il s’agit de convaincre les castes supérieures et notamment celle des brahmanes – 20% de la population en Uttar Pradesh – qui se sentent lésées face à l’attention particulière qu’accorde Narendra Modi aux basses-castes et aux intouchables. S’il parvenait à séduire cette frange importante de la population, le Parti du Congrès jouirait également de son pouvoir de persuasion envers certaines castes inférieures ainsi qu’envers les musulmans. D’après Scroll.in, ces derniers ont en effet tendance à voter pour des partis soutenus par une caste hindoue qu’ils estiment apte à assurer leur protection. Ou, plus généralement, à voter pour le parti le mieux à même de battre le BJP.

The Indian Express – Nouvelle étape vers la normalisation de l’ancien « no man’s land » entre l’Inde et le Bangladesh. Les habitants des 51 anciennes enclaves bangladaises cédées à New Dehli le 1er août 2015 pourront voter lors de la sixième phase des élections locales au Bengale-Occidental, le 5 mai prochain. Une première depuis la partition de 1947 pour ces 9776 nouveaux votants : « Nous avons seulement assisté à des élections, mais n’y avons jamais participé », commente un jeune citoyen de 24 ans. Mais au delà de l’exercice de leur droit de vote, les résidents des anciennes enclaves demandent l’adoption de mesures concrètes : aménagement de leur territoire (routes, immeubles, écoles, hôpitaux), consécration de leurs droits de propriété, réservation d’emplois dans l’administration locale. Seuls les partis promettant de remplir ses exigences pourront s’attirer les faveurs de ces nouveaux électeurs, commente The Indian Express.
Dawn – Le gouvernement pakistanais devra financer sur ses fonds propres le coût de ses avions de chasse. Islamabad avait pourtant réussi à s’entendre avec le gouvernement américain pour l’achat de 8 avions F-16 : Washington était sensé subventionner cet achat à l’aide de son fonds pour le financement des Forces étrangères (FMF).

Mais le deal n’a pas été approuvé par le Congrès, notamment parce que les parlementaires américains craignent qu’Islamabad n’utilise ces armes contre l’Inde.

Par Alexandre Gandil, Alice Hérait et Juliette Morillot, avec Clea Chakraverty et Anda Djoehana Wiradikarta à Paris

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