Merveilles menacées d'Asie : la Baie d'Halong
Contexte
La Grande Muraille de Chine, le Taj Mahal en Inde, la baie d’Halong au Vietnam… Autant de merveilles naturelles ou architecturales, dont l’imaginaire surgit en un éclair à la simple évocation de l’Asie. Mais ces images d’Épinal ne sont pas épargnées par les maux de notre siècle au rang desquels tourisme intempestif, changement climatique et pollution. Dans cette nouvelle série, Asialyst se penche sur le sort d’une poignée de ces « merveilles menacées ». Une sélection subjective de quelques sites emblématiques face aux défis du XXIe siècle avec, en ligne de mire, la perspective de les surmonter.
Un lieu atypique et historiquement symbolique
Si l’on quitte le champ du mythe, Hạ Long pourrait être né d’un processus géomorphologique exceptionnel, venant de l’érosion d’un plateau calcaire il y a quelques millions d’années. Les remous provoqués par les tempêtes ne laissant place qu’aux roches les plus dures. C’est grâce à cette nature hors du commun, relativement peu dégradée, que la baie a pu trouver sa place au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1994. L’activité humaine y était certes limitée avant que le pays ne s’ouvre au tourisme. Car sur la baie d’Halong, on ne trouve que 4 petits villages flottants et une poignée d’îles habitées.
Un paysage affecté par l’activité humaine
Vers un tourisme plus responsable ?
Mais si l’éco-tourisme est une opportunité économique, l’initiative n’est pas dénuée de convictions. Plusieurs agences se sont unies pour former « The Responsible Travel Club », afin de promouvoir un tourisme plus responsable auprès des vacanciers et des entrepreneurs. Ce collectif préconise néanmoins du temps et des ressources dont la plupart des agences manquent. Par ailleurs, l’International Union for the conservation of nature (IUCN), une des plus grandes organisations internationales pour la protection de la nature, a formé la « Halong – Cat Ba Alliance » : un projet sur trois ans, qui vise à faciliter les partenariats entre le gouvernement vietnamien, les investisseurs et la société civile, dans le but de préserver l’intégrité du site.
A voir, la vidéo de présentation de la « Halong – Cat Ba Alliance » :
Si ces associations ont le mérite d’aider à sensibiliser les visiteurs, il suffit de jeter un coup d’œil aux forums touristiques sur le Net pour constater que les touristes se plaignent toujours autant de la quantité de déchets qui accompagnent leur séjour sur la baie. En juin 2016, un article du site The Diplomat vantait pourtant les mérites écologiques de certaines agences de luxe : l’une d’entre-elles proposait 30% de réduction à ses clients en échange d’une séance de ramassage de déchets pendant la croisière. Mais l’initiative était probablement peu rentable, puisque l’agence en question, contactée en décembre dernier par Asialyst, affirme ne plus organiser ce genre de circuit depuis deux ans.
La menace du réchauffement climatique
Pour autant, dire que la baie d’Halong est victime d’un afflux de visiteurs et d’investisseurs pollueurs incontrôlés, dans un pays avide de développer son industrie touristique serait une grossière erreur. Le Vietnam est l’un des pays les plus vulnérables aux changements climatiques. Le pays a ratifié de nombreuses conventions internationales sur l’environnement, notamment la Convention sur la protection du patrimoine mondial culturel et naturel. Depuis qu’Halong est reconnu patrimoine mondial de l’Humanité, le site est la priorité du gouvernement de la province de Quang Ninh, où les autorités s’efforcent d’allier développement du secteur touristique et conservation du patrimoine. Les activités de la baie sont donc régulées par de nombreux décrets et conventions. Les accès aux villages flottants sont par exemple limités, afin de ne pas affecter les modes de vie des habitants.
Avec ses 3260 km de côtes, le Vietnam n’échappera pas à la montée des eaux. Le réchauffement climatique affecte directement l’économie du pays, et le gouvernement vietnamien fut l’un des premiers pays émergents à se lancer dans une lutte sur le long terme. Dans la première décennie des années 2000, le Vietnam a pris d’importantes mesures pour ralentir la dégradation de l’environnement, promouvoir le développement durable et réduire les risques de catastrophes naturelles : gestion des ressources, campagnes de prévention, éducation, et préparation aux changements climatiques sont au programme depuis plus de 20 ans. En 2015, l’ONU, en coopération avec le gouvernement vietnamien, a investi 50 millions de dollars pour la construction d’infrastructures destinées à contrer la montée des eaux sur les côtes vietnamiennes. Pourtant, il est peu probable que la baie d’Halong bénéficie de ce processus, puisque la construction de digues modifierait sa raison d’être : un paysage naturel à l’activité humaine limitée. De fait, la baie n’est pas sur la liste du patrimoine en péril de l’UNESCO. La dégradation du site n’en reste pas moins bien réelle, et les efforts du gouvernement et de l’ONU pour le sauver des menaces environnementales semblent insuffisants face à un réchauffement climatique global et quasi-irrémédiable.
Autre problème que l’IUCN souligne : malgré le nombre conséquent de lois et de décrets pour réguler l’activité sur la baie d’Halong, le gouvernement vietnamien ne s’est pas assez investi pour les faire appliquer. Limiter le nombre de visiteurs pourrait être la seule solution à long terme : avec ses 5500 touristes quotidiens, la baie accueille bien plus qu’elle ne devrait. Désireuses de profiter des rendements potentiels de l’industrie touristique, les autorités vietnamiennes rechignent à limiter les investissements et l’afflux de visiteurs. Il n’est pas certain que promouvoir l’éco-tourisme seul, une goutte d’eau dans l’océan, suffira à préserver l’intégrité de la baie.
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