Politique
Essai

Hong Kong : l'État de droit autoritaire

Nathan Law, Joshua Wong et Alex Chow à la sortie de la Haute Cour à Hong Kong, le 27 août 2017. (Source : SCMP)
Nathan Law, Joshua Wong et Alex Chow à la sortie de la Haute Cour à Hong Kong, le 27 août 2017. (Source : SCMP)
Hong Kong change. Hong Kong perd son identité politique : ce système semi-démocratique qui protège les libertés fondamentales des citoyens et prône la séparation des pouvoirs. Bref, un État de droit certes imparfait, mais introuvable en Chine populaire. Ce système est désormais en voie de transformation autoritaire pour imposer les volontés de Pékin. Une transformation insidieuse, toute en manipulation de la loi, mais une transformation bien réelle. C’est ce que dénonce Benny Yiu-ting Tai dans China’s Sharp Power in Hong Kong. Asialyst en publie un premier extrait, traduit par le sinologue David Bartel.

Le sharp power ou pouvoir de nuisance

La Région administrative spéciale de Hong Kong sert – à son corps défendant – de terrain d’expérimentation au régime communiste chinois. Celui-ci y exerce un sharp power que l’on peut assez efficacement traduire ici par « pouvoir de nuisance ». Il pressurise, neutralise et affaiblit les valeurs libérales et les institutions démocratiques dans tous les secteurs de la vie civile et politique : lois, société civile, élection, religion, presses et médias, économie… Lors d’une conférence organisée pour les 4 ans du Mouvement des parapluies, un organisateur écrit en exergue : « Le cas de Hong Kong permettra à la communauté internationale de formuler une stratégie appropriée pour répondre à l’avancée globale de l’autoritarisme. »

C’est pour que ce souhait ne reste pas lettre morte que nous avons décidé que le fascicule de Benny Yiu-ting Tai devait exister en français. Asialyst en publiera régulièrement des extraits. Professeur de droit à l’Université de Hong Kong, Benny Tai est un des initiateurs de Occupy Central. Ce mouvement cherche à mettre la pression sur le gouvernement de la République populaire de Chine pour qu’il honore la promesse d’autoriser les Hongkongais à choisir et élire leur dirigeant au suffrage universel afin d’avoir enfin un mot à dire sur leur présent, et sur leur avenir*. Lui et d’autres activistes sont actuellement en procès pour incitation au désordre public et pour leur rôle dans le Mouvement des Parapluies de 2014. Ils risquent jusqu’à 7 ans de prison.

Lire notre article : Hong Kong : comment la Chine exerce son pouvoir de nuisance.

Après le mouvement des parapluies de 2014, le régime communiste chinois a entamé un processus pour faire progresser l’autoritarisme à Hong Kong. Ironiquement, l’outil le plus aiguisé à ses yeux est l’État de droit, élément crucial du système semi-démocratique hongkongais dans le passé. Pourtant, aux mains du régime communiste, il devient quelque chose d’entièrement différent de ce qui fonctionnait à Hong Kong depuis des années.
Usant de la nature contestable d’un État de droit doté de différents niveaux d’interprétation, le régime chinois adopte une conception très fine de la règle du droit. Il prétend qu’elle est le discours officiel de l’État de droit à Hong Kong. Selon une compréhension étroite de ce principe constitutionnel bien accepté, les dirigeants ont seulement besoin de se conformer à certaines exigences procédurales générales et d’appliquer les décisions grâce à des cours indépendantes en suivant quelques règles juridiques vaguement rédigées. Aucune disposition légale de fond ne contraint le détenteur du pouvoir, car toutes les lois, y compris la constitution, peuvent avoir leur sens réinterprété, voire être modifiées par sa seule volonté. De plus, aucune institution gouvernementale – y compris le tribunal – ne peut imposer de réelle contrainte sur le pouvoir puisque toutes ces institutions sont sujettes à la plus haute autorité, celle de ce même pouvoir. Cette interprétation de l’État de droit peut être assimilée à un État de droit autoritaire. Et même si elle ne peut contraindre le pouvoir tout en protégeant les droits fondamentaux des citoyens, elle peut fournir un degré variable de légitimation pour l’autorité selon la culture juridique de la communauté. C’est la raison pour laquelle les dirigeants autoritaires cherchent à adopter la loi comme un de leurs outils de gouvernance.
Cette conception très fine de l’État de droit contraste avec d’autres compréhensions bien plus épaisses. Selon l’approche téléologique suggérée par Martin Krygier, les différences fondamentales entre les interprétations de l’État de droit peuvent être clairement illustrées. Cette approche demande avant tout que le but ultime et supérieur de la loi dans un État de droit réside dans ce qui constitue cet État de droit et dans la manière d’y aboutir.
L’État de droit défendu par le régime communiste, allié au chef de l’exécutif hongkongais et à son gouvernement, place le maintien de l’ordre social comme la fonction première de la loi. Même au prix de l’octroi de pouvoirs arbitraires aux fonctionnaires du gouvernement et de la restriction disproportionnée des droits fondamentaux des citoyens. En insistant sur l’importance du respect de la loi par tous les fonctionnaires et les citoyens, l’ordre social peut être sécurisé. Toute personne qui refuse d’obéir à la loi sera considérée comme s’attaquant à l’État de droit. Si l’autorité de la loi est acceptée sans critique par le peuple de Hong Kong, quelle que soit son contenu, le pouvoir superficiel de Carrie Lam Cheng Yuet-ngor (林鄭月娥), la chef de l’exécutif, sera légitimé. Même si elle n’a pas été directement élue par l’ensemble de la population hongkongaise.
Cependant, de nombreux Hongkongais ont une vision bien plus épaisse de l’État de droit. Le maintien de l’ordre social est seulement considéré comme servant des objectifs légaux plus avancés et sophistiqués. Les pouvoirs du gouvernement doivent être limités par la loi pour en prévenir l’exercice arbitraire. Un pouvoir judiciaire indépendant est une condition nécessaire mais pas suffisante pour limiter les pouvoirs du gouvernement. Une justice indépendante ne signifie pas non plus la limitation adéquate des pouvoirs du gouvernement. De plus, même si ces derniers sont restreints, il n’est pas garanti que la loi puisse fournir une protection suffisante des droits des citoyens. En fin de compte, c’est le droit qui doit garantir de manière substantielle toute une gamme de droits au citoyens.
Selon l’État de droit autoritaire, les autres objectifs du droit sont considérés inférieurs au maintien de l’ordre social par le respect et l’obéissance à la loi. Le régime communiste se prépare à remplacer par l’État de droit autoritaire la compréhension plus épaisse généralement partagée par les Hongkongais. Redéfinir l’État de droit à Hong Kong comme un État de droit autoritaire aide à établir un Hong Kong autoritaire. Le paradoxe est que l’État de droit hongkongais est aujourd’hui confronté au défi le plus significatif des progrès de l’autoritarisme par le régime communiste au nom justement de « l’État de droit ».
Pékin utilise différentes méthodes pour mettre en oeuvre sa règle autoritaire. Différents incidents avant et après le remplacement de C. Y. Leung par Carrie Lam à la tête de l’exécutif hongkongais peuvent illustrer comment le régime chinois et le gouvernement de Hong Kong utilisent le droit pour construire pas à pas un Hong Kong autoritaire.

La Constitution ou la Loi fondamentale ?

Il existe de nombreuses dispositions de la Constitution de la Chine populaire en contradiction avec la Loi fondamentale à Hong Kong. D’où la création du principe « un pays, deux systèmes » qui a permis de pratiquer sous l’égide de la Loi fondamentale des systèmes politiques, législatifs, sociaux et économiques très différents des systèmes continentaux. À l’exception de l’article 31 de la Constitution qui autorise l’Assemblée nationale populaire à établir des Régions administratives spéciales quand c’est nécessaire, la Loi fondamentale évite de mentionner d’autres dispositions de la Constitution. L’article 11 de la Loi fondamentale stipule seulement que les systèmes et les politiques pratiqués à Hong Kong, y compris les systèmes sociaux et politiques, la méthode pour sauvegarder les droits et les libertés fondamentales de ses résidents, les systèmes exécutif, judiciaire et législatif, et les politiques conséquentes, doivent être fondés sur les dispositions de la Loi fondamentale.
Depuis 2014, le régime communiste chinois a commencé à souligner dans toutes ses déclarations officielles l’importance de la Constitution dans la gouvernance de Hong Kong. Il n’a cependant pas mis l’accent sur les dispositions socialistes de la Constitution, mais sur les intérêts supérieurs de la nation, comprenant la souveraineté, la sécurité nationale et le développement des intérêts de l’État-nation.
Les dispositions de la Constitution ne sont peut-être pas directement exécutoires dans les tribunaux hongkongais. Pourtant, le régime chinois peut réinitialiser le contexte constitutionnel à Hong Kong en y développant l’influence de la Constitution. Il favorise ainsi l’avancement de l’État de droit autoritaire, grâce en particulier à la capacité du comité permanent de l’Assemblée nationale populaire (ANP) à interpréter la Loi fondamentale.

L’incident des serments

La Loi fondamentale est la fondation constitutionnelle du système juridique hongkongais. Grâce au pouvoir d’interprétation de cette Loi par le Comité permanent de l’ANP, le régime communiste chinois peut lui donner n’importe quelle signification, quand il le désire. Peu importe si cette signification ne rentre pas dans le langage des instruments juridiques et si elle s’applique de façon rétroactive.
Certes, le régime chinois pense que le pouvoir d’interpréter la Loi fondamentale devrait être seulement utilisé dans des circonstances exceptionnelles puisque chaque fois qu’il l’est, il affaiblit l’autorité juridique de Hong Kong. Mais Pékin est désormais mieux préparé à utiliser cet outil constitutionnel pratique et puissant. Une fois que le fondement légal d’une décision politique controversée peut être établi grâce aux procédures décisionnelles formelles spécifiques, son autorité et sa légitimité seront acceptées par la majeure partie de la population hongkongaise. Peu nombreux sont ceux qui semblent savoir ou même s’intéresser vraiment aux sources de l’intervention juridique, à l’intégrité des procédures qui génèrent la justification légale, ou si cette justification est en soi libérale ou équitable. Sachant cela, le régime chinois peut normaliser l’utilisation du processus d’interprétation pour fournir des soutiens juridiques et constitutionnels à des décisions politiques controversées.
Même si un différend juridique ou constitutionnel peut être résolu par une procédure judiciaire à Hong Kong, le régime chinois peut donner une interprétation de la Loi fondamentale avant que le juge de Hong Kong ne rende sa décision. Ce dangereux empiètement de l’indépendance judiciaire de Hong Kong indique que Pékin ne fait pas confiance aux juges hongkongais. Il n’a aucun respect pour l’autonomie judiciaire de Hong Kong. Ce qui réduit ses inquiétudes de voir une décision politique controversée jugée par les tribunaux locaux. Et même si la compréhension de l’ANP du concept d’interprétation et ses interprétations peuvent aller à l’encontre du droit commun (Common Law), il se trouve que les juges hongkongais les avalisent sans les questionner. Ils n’osent pas s’opposer au pouvoir souverain du régime chinois. Ils semblent entièrement démunis quand il s’agit de défendre leur propre compréhension de l’État de droit face à des maîtres qui en ont une fort différente. L’incident de la prestation de serment des nouveaux députés au parlement hongkongais, le LegCo, illustre parfaitement les caractéristiques de l’État de droit autoritaire à Hong Kong.
Selon l’article 104 de la Loi fondamentale, les membres du LegCo nouvellement élus doivent jurer de défendre la Loi fondamentale et prêter allégeance à la Région administrative spéciale de Hong Kong. Dans le passé, un certain nombre de législateurs issus de l’opposition ont usé de méthodes irrégulières lors de leur prestation de serment pour exprimer leur opinion politique contre le gouvernement hongkongais et le régime communiste chinois. Des vêtements ou des accessoires ont été utilisés durant la lecture de leur serment officiel. Des mots ou des slogans ont été ajoutés, avant ou après le serment officiel. Même si cette assermentation a pu être considérée invalide, ils ont toujours été autorisés à la refaire.
Après les élections législatives de septembre 2016, plusieurs parlementaires du camp « localiste », la branche la plus radicale de l’opposition hongkongaise, ont été élus. Deux d’entre aux, Sixtus « Baggio » Leung (梁頌恆) et Yau Wai-ching (遊蕙禎) ont été accusés d’avoir eu des termes ou des comportements désobligeants lors de leur prestation de serment pour exprimer leur position séparatiste. Les serments de Leung et de Yau ont été invalidés, mais les deux législateurs ont été autorisés à prononcer de nouveau leur serment lors de la session parlementaire suivante par le président du LegCo. Le chef de l’exécutif hongkongais et son secrétaire à la Justice entamèrent alors une procédure légale pour obtenir une déclaration d’invalidité des serments qui empêche définitivement la prise de fonction de Leung et Yau, avant qu’ils n’aient une chance de prêter serment une seconde fois. Le comité central de l’ANP donna une interprétation de l’article 104 tout juste quelques jours avant que le tribunal de première instance n’ait rendu ses conclusions.
Cette interprétation est un amendement à l’article 104. Il ne clarifie en rien le sens de la disposition constitutionnelle. Selon l’interprétation, celui ou celle qui prête le serment prescrit par la loi doit le faire précisément, complètement, solennellement et sincèrement. Tout manquement sera considéré comme un refus de prêter serment. Si celui ou celle qui prête serment refuse ces dispositions, il ou elle sera disqualifié pour assumer toute fonction publique. Le comité permanent de l »ANP ajoute un arrangement introuvable dans le texte juridique : s’il est décidé que le premier serment est invalide, celui ou celle qui prête serment n’aura pas l’opportunité de le faire à nouveau.
Tous les niveaux de la justice hongkongaise, y compris la Cour d’appel supérieure, ont accepté l’autorité constitutionnelle de l’interprétation. Leung et Yau ont été disqualifiés avec succès. Quatre autres législateurs de l’aile plus modérée de l’opposition ont aussi été disqualifiés dans des procédures légales à l’initiative du chef de l’exécutif hongkongais et de son secrétaire à la Justice : ils auraient échoué à prêter serment précisément, complètement, solennellement et sincèrement, selon l’interprétation.

Le train rapide

Même si ce n’est pas un pouvoir explicitement mentionné dans la Loi fondamentale, le Comité permanent de l’ANP a développé un nouvel outil constitutionnel qui peut être considéré comme une extension de sa capacité d’interprétation. Prévoyant le défi juridique possible devant la mise en oeivre de l’État de droit autoritaire, le Comité a appris à précéder toute contestation en créant une décision qui confirme qu’une mesure est compatible avec la Constitution et la Loi fondamentale. Dans le cas d’une contestation sur la légalité d’une action future, le Comité peut donner une interprétation qui accorde un statut constitutionnel par la mesure en question. Comme tout le monde sait que le Comité fera de la sorte, il est espéré que ceux qui ont l’intention de mettre en question une mesure prendront peur. Prenons l’exemple de la décision du Comité de confirmer la constitutionnalité de l’arrangement de colocation du train rapide entre Hong Kong et Canton.
En 2010, l’exécutif hongkongais avance, en passant par le LegCo, un projet controversé. Il souhaite obtenir les financements d’une ligne de train rapide entre Hong Kong et Canton via Shenzhen pour se connecter au réseau à grande vitesse de Chine continentale. En raison des dépassements budgétaires du gouvernement, le budget alloué au projet passe d’environ 60 milliards de dollars hongkongais [plus de 6,6 milliars d’euros, NDLR] à presque 90 milliards [presque 10 milliards d’euros]. L’attrait majeur de ce train rapide est un accord de colocation pour que les passagers puissent régler les procédures douanières de Hong Kong et du Continent en un lieu unique. En 2017, l’exécutif propose que l’arrangement de colocation soit conduit au terminal de Kowloon Ouest, situé au cœur du territoire, où l’ensemble de la loi chinoise sera applicable, et où les autorités de Chine populaire exerceront leur juridiction en toutes matières, à l’exception de celles réservées au gouvernement hongkongais.
Nombreux sont ceux qui questionnent la compatibilité de l’arrangement avec les dispositions de la Loi fondamentale. Son article 18 indique que les lois nationales ne s’appliquent pas dans la Région administrative spéciale à l’exception de celles concernant la défense, les affaires étrangères et les autres sujets hors des limites de son autonomie, listés dans l’Annexe III de la Loi fondamentale. L’article 19 indique que les tribunaux hongkongais auront juridiction sur tous les cas sur le territoire, à l’exception des restrictions imposées par le système et les principes légaux antérieurs qui doivent être maintenues à Hong Kong.
*Hong Kong Bar Association, 2017.
En décembre 2017, le Comité permanent entérine une décision qui confirme la compatibilité de l’arrangement de colocation avec la Loi fondamentale. L’arrangement ne modifiera pas les frontières du territoire hongkongais, n’affectera ni son haut degré d’autonomie, ni les droits et libertés dont jouissent ses résidents. De plus, elle est bénéfique au développement économique de la ville. La décision est sévèrement critiquée par le Barreau de Hong Kong selon qui les dispositions de la Loi fondamentale auxquelles la décision fait référence ne peuvent fournir des bases juridiques fermes pour l’arrangement de colocation et explique pourquoi celui-ci ne contredirait pas l’article 18*.
Avec la confirmation du Comité permanent, la législation locale sur l’arrangement de colocation est sur le point d’être avalisée par le LegCo. Il est probable que la loi sera contestée par les tribunaux hongkongais quant à sa compatibilité avec la Loi fondamentale. Même si la décision n’est pas formellement une interprétation du Comité permanent, on peut prévoir que les chances d’invalider ce morceau de législation via une relecture juridique sont minces. Le Comité permanent peut utiliser n’importe quelle disposition de la Loi fondamentale et prescrire une autre interprétation pour fournir un support constitutionnel à l’arrangement de colocation. Toutes les disputes constitutionnelles devant les tribunaux hongkongais seraient alors effacées.
Comme lors de l’incident de la prise de serment, l’incident de la colocation affecte sévèrement l’État de droit à Hong Kong. Le régime communiste est de plus en plus préparé à utiliser la loi pour justifier toutes ses décisions alors qu’il peut entièrement contrôler le processus constitutionnel d’interprétation de la Loi fondamentale. Même si la lecture qu’en donne le Comité dépasse le sens plein et naturel du texte de loi et ne poursuit pas les procédures prescrites par la Loi fondamentale, personne ne peut contester son autorité. Comme le dit le Barreau de Hong Kong, tout acte sera compatible avec la Loi fondamentale « juste parce que le Comité permanent en a décidé ainsi ». La loi sera manipulée quand le régime chinois croit que de « bonnes choses » peuvent être faites.

L’hymne national

Selon l’article 18 de la Loi fondamentale, les lois nationales chinoises ne s’appliquent pas à Hong Kong, à l’exception de celles listées dans l’annexe III. Le Comité permanent peut ajouter une loi nationale à cette Annexe si elle est liée la défense ou aux affaires étrangères et à d’autres sujets hors des limites de l’autonomie hongkongaise, comme le précise la Loi fondamentale. Les lois de l’Annexe III doivent être appliquées localement par voie de promulgation ou de législation de la Région administration spéciale.
Toutes les lois regroupées dans l’Annexe III ne sont pas politiquement controversées. Sachant qu’il possède le pouvoir ultime de déterminer si un sujet appartient à la sphère de la défense, des affaires étrangères ou une question en dehors des limites de l’autonomie de la Région, le régime communiste peut facilement convertir le processus dépendant de l’article 18 et de l’annexe III pour le transformer en porte dérobée afin de légiférer directement à Hong Kong. Dès lors qu’une loi nationale est explicitement assimilée à un sujet concernant la défense, les affaires étrangères ou hors des limites de l’autonomie hongkongaise et est ajoutée à l’Annexe III, cette loi entrera en vigueur à Hong Kong. Qu’importe si l’objectif réel de la loi est de faire aboutir à un état de droit autoritaire. Exemple avec la promulgation de la Loi sur l’hymne national.
L’ANP entérine la Loi sur l’hymne nationale en septembre 2017 et la loi est ajouté à l’Annexe III de la Loi fondamentale par le Comité permanent en novembre de la même année. Le processus de promulgation locale de cette loi est désormais sur les rails. Plusieurs dispositions de ce texte attirent cependant de nombreuses préoccupations sur une transgression possible de la liberté d’expression de la population hongkongaise.
L’article 6 de cette nouvelle loi indique que l’hymne national de doit pas être joué ou chanté d’une manière préjudiciable à sa dignité. Selon l’article 7, les personnes présentes quand il est joué ou chanté doivent se lever et se tenir avec respect, et ne doivent afficher aucun comportement irrespectueux envers ledit hymne. Selon l’article 15, quiconque altère délibérément en public ses paroles ou sa partition, le joue ou le chante de manière péjorative ou déformée, ou bien l’insulte de toute autre façon, recevra un avertissement ou sera détenu jusqu’à 15 jours par le Département de la Sécurité publique. Là où l’action constitue une offense criminelle, le contrevenant est sujet à des poursuites criminelles en accord avec la loi.
De nombreux termes de cette nouvelle loi ne sont pas clairement définis. Les comportements correspondant à des « manières préjudiciables à la dignité de l’hymne national », « l’irrespect pour l’hymne », les « manières dommageables » ou les « insultes à l’hymne » restent globalement incertains. Si la juridiction locale se doit d’adopter directement les expressions de la loi chinoise, cela peut violer le droit des Hongkongais à la liberté d’expression. Les dispositions légales ne seront pas à même de satisfaire les exigences sur l’encadrement du droit parce qu’elles sont si problématiques qu’elles ne peuvent être « prescrites par la loi ». En effet, cette loi peut empêcher de nombreux citoyens hongkongais d’exprimer leur antagonisme légitime contre le régime communiste.
Même si on peut contester la constitutionnalité de la législation locale à appliquer la loi sur l’hymne national, il permis d’interroger la juridiction des tribunaux hongkongais pour revoir sa constitutionnalité. Cette question de constitutionnalité n’est pas encore résolue. Si, dans le futur, les tribunaux de Hong Kong concluaient qu’ils n’ont pas la capacité juridique constitutionnelle pour réviser une législation locale mettant en pratique une loi nationale applicable dans le cadre de l’Annexe III de la Loi fondamentale, alors le régime communiste aurait les main libres légalement pour limiter de façon disproportionnée les droits fondamentaux des Hongkongais. Ce qui pourrait compromettre la protection que l’État de droit offre aux citoyens.

L’élimination des candidats

Le régime chinois bénéficie désormais de l’entière coopération de l’administration de Carrie Lam. L’esprit de l’État de droit autoritaire est d’utiliser tous les espaces possibles d’un texte de loi pour établir l’autorisation légale d’une mesure autoritariste. Ce faisant, le sens du texte de loi peut être étendu ou déformé arbitrairement. Les procédures juridiques peuvent ignorer toute exigence d’équité procédurale. Même si le personnel exerçant le pouvoir juridique chargé de remplir une tâche autoritaire peut être confronté à des contestations légales dans le futur, avec l’autorité d’interpréter la Loi fondamentale comme support, le régime chinois peut aisément en choisir un article et en émettre une interprétation pour créer les bases constitutionnelles de la mesure autoritaire. La disqualification des candidats par des directeurs de scrutin au prétexte que leur soutien à la Loi fondamentale n’est pas sincère est un exemple de telles pratiques.
Après la disqualification réussie des conseillers législatifs élus, la vague de disqualification s’est étendue à tous les candidats indésirables. La section 40 de l’ordonnance du Conseil législatif l’indique : pour valider une candidature à l’élection au Legco, le ou la candidate doit signer une Déclaration de respect de la Loi fondamentale et de serment d’allégeance à la Région administrative spéciale.
La section 42A de la même ordonnance autorise les directeurs de scrutin à décider de la validité des candidatures. Mais jusqu’à présent, ils ont toujours utilisé cette disposition uniquement pour vérifier si la Déclaration était remplie dans les formes. Or, lors des élections au Legco en 2016, ils s’en sont servi pour déterminer si les nominés avaient réellement et sincèrement l’intention de respecter la Loi fondamentale, bien qu’il n’existe à ce sujet aucune disposition particulière. Les nominations de plusieurs candidats ont ainsi été déclarées invalides sous prétexte qu’ils avaient exprimé des opinions en faveur de l’indépendance de Hong Kong. Dans au moins un cas, un candidat a publiquement déclaré ne plus être pour l’indépendance de Hong Kong, mais sa nomination a quand même été invalidée. La raison invoquée par le directeur de scrutin : il n’était pas convaincu de la sincérité du changement de position du candidat.
La « ligne rouge » continue à être retracée. Lors de l’élection partielle de mars 2018, la nomination d’un candidat soutenant le droit des Hongkongais à décider démocratiquement de leur futur a aussi été invalidée. Cela aussi est désormais considéré comme ne pas respecter la Loi fondamentale. « Respecter la Loi fondamentale » n’est pas défini dans la Loi fondamentale. Quoi qu’il en soit, depuis l’élection du parlement en 2016, toute personne désirant être candidat doit aussi signer un formulaire de confirmation indiquant qu’elle comprend que respecter la Loi fondamentale signifie respecter aussi les articles 1, 12 et 159.
L’article 1 dispose que Hong Kong est une partie inaliénable de la Chine. Selon l’article 12, la ville est une région administrative locale de la République populaire dotée d’un haut degré d’autonomie directement sous la tutelle du gouvernement central. L’article 159 stipule qu’aucun amendement à la Loi fondamentale ne peut contrevenir aux politiques fondamentales regardant Hong Kong et mises en oeuvre par Pékin.
Il est vraisemblable que le directeur de scrutin traitera comme contraire au respect de la Loi fondamentale toutes les opinions qui nient, défient, questionnent ou même suggèrent une autre vision de Hong Kong que comme partie inaliénable de la Chine. Cependant, personne ne saura exactement ce qui ne sera pas toléré tant que le directeur de scrutin n’aura pas pris sa décision. En d’autres termes, celui-ci exerce désormais un pouvoir arbitraire sans norme claire qui limite les droits politiques des Hongkongais à se présenter à un élection.
Malheureusement, une décision du Tribunal de première instance a confirmé que le directeur de scrutin possède bien un tel pouvoir. S’appuyant fortement sur l’interprétation de la prestation de serment, le juge a seulement exigé de la part de ce directeur qu’il satisfasse des exigences spécifiques d’équité procédurale dans l’exercice du pouvoir. La Haute Cour pourra à l’avenir annuler cette décision, mais d’ici-là, le directeur du scrutin a le pouvoir légal de disqualifier les candidats potentiels selon des normes incertaines et mouvantes.
Le régime chinois peut maintenant agir par l’intermédiaire des fonctionnaires du gouvernement hongkongais et entériner la Décision qui lança le Mouvement des parapluies par une porte dérobée. Les personnes indésirables peuvent maintenant être facilement exclues et ne peuvent désormais plus se présenter à une élection. Il est à prévoir que ce même pouvoir sera utilisé à l’avenir pour les élections du chef de l’exécutif et même celles des conseillers de districts, à moins que les tribunaux hongkongais ne rétablissent les choses avant les prochaines scrutins.

Poursuites politiques et révision des peines

D’après l’article 63 de la Loi fondamentale, le département hongkongais de la Justice contrôle les poursuites criminelles et est libre de toute interférence. Le secrétaire à la Justice jouit de pouvoirs de poursuite indépendants comme le procureur général d’un système de droit commun. Maintenant, l’ensemble de l’administration de Hong Kong est sous la direction du régime communiste chinois et le pouvoir de poursuite n’est plus différencié. Il est désormais utilisé pour servir des objectifs politiques, et les exemples abondent de poursuites politiques ces dernières années. Les limites du présent texte ne permettent cependant de n’aborder qu’un seul cas, celui de la révision des peines des jeunes protestataires.
Au début du Mouvement des parapluies, trois leaders étudiants, Joshua Wong (黃之鋒), Nathan Law (羅冠聰) et Alex Chow (周永康) ont été impliqués dans des heurts au siège du gouvernement à Admiralty. Par la suite, ils ont été condamnés pour avoir incité d’autres personnes à participer à un rassemblement illégal. Law et Wong ont écopé de travaux d’intérêts généraux lors de leur premier procès. Chow a lui été condamné à de la prison avec sursis. Après avoir purgé leur peine, le secrétaire à la Justice a appliqué la révision des sentences par la Cour d’appel. Ils ont ainsi été emprisonnés pour six à huit mois d’après une nouvelle série de directives élaborées par la Cour d’appel concernant les affaires d’atteinte à l’ordre public. Ces nouvelles directives ont été développées par la Cour d’appel au regard de situations qui ont suivi le Mouvement des parapluies, alors que les altercations se multipliaient entre police et opposants.
Un groupe d’experts juridiques internationaux a critiqué cette décision de la Cour d’appel. Pour eux, elle est outrageusement injuste parce que les leaders étudiants avaient déjà purgé leur peine. Elle revient à imposer de nouvelles peines à Wong et Law qui avaient déjà effectué leurs travaux d’intérêt général, ce qui contredit le principe de la double incrimination selon laquelle personne ne peut être condamné deux fois pour la même offense. Les condamnations sont aussi perçues comme trop sévères.
Si la Cour d’appel a bien décidé d’alourdir les peines, la décision de lancer le processus de leur révision a été prise par le secrétaire à la Justice. Il n’existe pas de preuves tangibles pour étayer cette affirmation, mais il n’est pas irrationnel de suspecter une motivation politique derrière cette décision d’un secrétaire souhaitant répondre à une tâche assignée par le régime chinois.
Quoi qu’il en soit, la décision de la Cour d’appel révèle quelque chose de plus inquiétant encore : l’attitude de certains juges hongkongais face aux objectifs ultimes de la loi. « Ces dernières années, a ainsi déclaré dans son verdict le juge Wally Yeung (楊振權), vice-président de la Cour d’appel, un vent malsain souffle sur Hong Kong. Au prétexte de poursuivre leurs idéaux ou d’exercer leurs droits, certains agissent de manière irraisonnée et illégale. Ces personnes, incluant des individus éduqués, défendent qu’il faut « enfreindre la loi pour obtenir justice » et selon ce slogan, elles encouragent d’autres à enfreindre la loi. Non seulement elles refusent d’admettre que leurs activités illégales sont répréhensibles, mais elles avancent même que ces activités sont une source de fierté et d’honneur. Il est regrettable que ces inclinations intellectuelles vaniteuses et arrogantes aient influencé une certaine jeunesse, et l’aient poussée à s’engager naïvement dans des activités préjudiciables à l’ordre public et à perturber la paix lors de rassemblements ou de manifestations. » La Cour d’appel ne reconnaît par là aucune légitimité à la désobéissance civile qui motive ces jeunes protestataires.
Heureusement, les juges du Tribunal de dernière instance, dans leur jugement final, ont désavoué l’approche de Yeung. Selon eux, elle ne donne pas de fondement adéquat à une condamnation puisqu’elle ignore la culpabilité des personnes incriminées en cherchant à leur attribuer la culpabilité d’autres personnes. Plus encore, ils ont décidé que les nouveaux principes adoptés par la Cour d’appel ne pouvaient être appliqués rétrospectivement dans cette affaire. Les sanctions initiales des trois jeunes manifestants ont été rétablies. Contrairement aux sentences émises par la Cour d’appel, le Tribunal de dernière instance a très clairement affirmé que les tribunaux devaient considérer la désobéissance civile comme un facteur atténuant dans la détermination de la peine d’un accusé. La désobéissance civile doit être comprise comme un acte politique public, non-violent, conscient d’être contraire à la loi et accompli dans le but d’amener un changement de la loi ou des politiques du gouvernement.
Comme le montre le jugement de la Cour d’appel dans cette affaire, certains juges voient le maintien de l’ordre social comme extrêmement important. Leur compréhension de l’État de droit ne semble pas trop s’éloigner de l’État de droit autoritaire défendu par le régime chinois et le gouvernement de Hong Kong. Si de plus en plus de juges embrasse cette compréhension très étroite, la loi et l’État de droit à Hong Kong ne seront bientôt plus capables de contenir efficacement le pouvoir des autorités, ni de protéger convenablement les droits fondamentaux des citoyens.

La fin de l’obstruction parlementaire

Ces mesures pour disqualifier les élus au parlement ont réussi à affaiblir davantage l’opposition. Même si le camp pro-Pékin est toujours majoritaire au LegCo, l’opposition pouvait dans le passé utiliser de différentes façons les espaces alloués par les règles de procédure. Par exemple, faire obstruction pour empêcher ou retarder des décisions controversées de l’exécutif hongkongais. Désormais, les pro-Pékin détiennent même la majorité spéciale nécessaire pour amender les règles de procédure du LegCo. Ces règles ont ainsi été modifiées et tous les espaces autorisées à la chambre législative pour résister à l’empiétement du régime autoritaire par l’opposition ont été supprimées.
D’autres manipulations des règles de procédure par le camp pro-Pékin sont en cours. Puisqu’il possède la majorité au LegCo, son président et presque tous ceux qui y siègent sont dans le camp pro-Pékin. La 45ème règle de procédure du LegCo autorise son président ou toute personne dirigeant un de ses comités de prendre une décision finale en faisant un « rappel au règlement » (point of order). Cela devrait être un pouvoir limité et ne devrait concerner que les questions relatives au respect des règlements pendant les réunions du LegCo et de ses comités. Mais suivant l’esprit de l’État de droit autoritaire, le camp pro-Pékin veut étendre le périmètre de ce pouvoir et affirmer que le président du LegCo peut rendre une décision finale sur toutes les sujets concernant ses affaires. Aucun débat n’est autorisé sur les décisions finales du président du LegCo.
Plus encore, il sera désormais difficile de questionner une décision du président du LegCo en utilisant les procédures de révisions juridiques, puisque le Tribunal de dernière instance à déjà décidé qu’il n’interfèrerait pas avec les procédures internes du parlement. En conséquence, les travaux du LegCo sont désormais entièrement dominés par le camp pro-Pékin et le camp de l’opposition pourra difficilement utiliser les processus de la chambre législative pour défendre une conception plus large de l’État de droit.

La Sécurité nationale

Il est permis d’imaginer qu’après avoir ôté tous les obstacles à la chambre législative, l’exécutif hongkongais entérinera bientôt de nouvelles lois nécessaires pour faire avancer « l’autoritarisation ». La plus importante doit être la loi sur la Sécurité nationale sous l’article 23 de la Loi fondamentale, selon laquelle la Région administrative spéciale doit promulguer ses propres lois pour interdire tout acte de trahison, sécession, sédition et subversion contre le gouvernement central.
La dernière tentative de faire promulguer cette loi a été retirée en 2003 après que plus d’un demi million de Hongkongais eurent manifesté contre elle. Sans cette loi sur la Sécurité nationale, Pékin estime que Hong Kong est un lieu insuffisamment sécurisé et qui peut servir de porte d’entrée à des forces hostiles avides de s’infiltrer dans le régime autoritaire du Continent. Ces dernières années, le pouvoir communiste a cherché sans succès l’occasion de relancer ce processus législatif. Pourtant, le projet bien articulé d’État de droit autoritaire cherche à ouvrir la voie à cette action décisive.
L’article 23 pourrait être réintroduit sous une autre forme. Dans le camp pro-Pékin, certains ont déjà dénoncé l’innocuité de l’actuelle mouture de l’article : il n’a pas les moyens d’interdire les discours indépendantistes s’ils n’incitent pas explicitement à commettre des actes de violence ou tout autre délit sérieux.
Alors que le régime chinois développe son autoritarisme à Hong Kong, la ligne rouge politique se déplace continuellement. La loi sur la Sécurité nationale doit avant tout être capable d’interdire les discours pour l’indépendance de Hong Kong. Ensuite, les discours pour le droit des Hongkongais à décider de l’avenir politique de Hong Kong doivent aussi être bannis. Aujourd’hui, le simple fait d’évoquer la possibilité d’une indépendance avec l’établissement d’un ordre constitutionnel démocratique en cas d’effondrement du régime autoritaire continental est une sorte de discours interdit. Il est à prévoir que la ligne rouge politique soit de nouveau retracée selon les besoins du régime communiste. Avec la pleine coopération du chef de l’exécutif, de son administration et du LegCo, gagnant en légitimité grâce à l’État de droit autoritaire, de nouvelles lois seront bientôt promulguées dans la Région administrative spéciale pour servir le projet politique de Pékin.
Par Benny Tai Yiu-ting
Traduit de l’anglais par David Bartel
Les intertitres ont été modifiés par la Rédaction d’Asialyst

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A propos de l'auteur
Professeur de droit à la Hong Kong University, Benny Tai Yiu-ting est l'un des organisateurs du Mouvement des parapluies en 2014 à Hong Kong.
Chercheur indépendant, David Bartel vit à Hong Kong depuis dix ans. Obtenue en 2017 à l'EHESS, sa thèse porte sur les Lumières chinoises du XXème siècle et leur reconfiguration contemporaine. Il s'intéresse particulièrement aux liens entre histoire, politique et langage. La cooptation des discours théoriques postmodernes et postcoloniaux - en Chine et ailleurs - par la rhétorique nationaliste, et l’effacement de la culture au nom du culturel sont au cœur de ses recherches.