Revue de presse Asie - 24 octobre 2016

Pouvoir de Xi Jinping, Américains aux Philippines et rebelles maoïstes indiens

Xi jinping restera-t-il à la tête du parti communiste chinois ? Peut-être un début de réponse après le 6ème plénum du PCC qui s'ouvre ce lundi 24 octobre à Pékin. Copie d'écran du Straits Times, le 24 octobre 2016.
Xi jinping restera-t-il à la tête du parti communiste chinois ? Peut-être un début de réponse après le 6ème plénum du PCC qui s'ouvre ce lundi 24 octobre à Pékin. Copie d'écran du Straits Times, le 24 octobre 2016.

Asie du Nord-Est

South China Morning Post – Un code conduite pour les cadres du Parti communiste chinois. C’est assez osé de la part de Xi Jinping, qui ouvre ce lundi 25 octobre le 6ème plénum du PCC. C’est la dernière grande réunion des dirigeants du Parti avant le Congrès qui aura lieu à l’automne 2017. Le code de conduite des cadres fait partie des décisions qui y seront validés. Il signale de façon assez inédite la volonté de Xi de consolider encore son pouvoir. En principe, durant cette période « pré-congrès », le Parti procède au renouvellement de son élite dirigeante pour préparer la succession de l’équipe dirigée par Xi Jinping. Ainsi, 5 des 7 membres du saint des saints comité permanent du bureau politique du PCC doivent être remplacés l’an prochain, si la règle non écrite de Deng Xiaoping du départ en retraite pour les cadres de plus de 68 ans est toujours valable. De même, 5 sièges sur les 25 du bureau politique seront en jeu. Les patrons des partis dans les provinces et les têtes des gouvernements locaux sont déjà en plein changement.

Il faudra bien lire entre les lignes de la presse officielle pour comprendre ce qui se trame à la tête du pouvoir central à Pékin. En surveillant les détails des nominations, notamment celle de Wang Qishan, président de la très redoutée Commission centrale de contrôle et de discipline du Parti, et donc le chef de la lutte anti-corruption lancée par Xi Jinping depuis 2013. Wang aura 69 ans l’an prochain : il doit céder la place. S’il est maintenu en fonction, cela indiquera certainement que Xi s’apprête à un coup de force pour obtenir un troisième mandat de cinq ans jusqu’en 2022. Ce samedi 22 octobre, le South China Morning Post s’était fait l’écho d’un article de la Tribune du Peuple, journal affilié au Quotidien du Peuple, l’organe officiel du Parti. Selon l’éditorial, le parti a besoin d’un leader du type de Mao Zedong et Xi Jinping correspond parfaitement au profil.

Korea Times – Park Geun-hye est-elle en train de changer d’avis ? La présidente sud-coréenne a provoqué la surprise ce lundi 24 octobre en proposant de réviser la Constitution du pays, inchangée depuis 30 ans. Lors d’un discours parlementaire sur le budget 2017, elle a annoncé la création d’un organisme chargé de la révision constitutionnelle d’ici à la fin de son mandat en février 2018. Jusqu’alors, Park refusait tout débat sur la question plaidant qu’il ne s’agissait pas d’une priorité pour le pays et qu’il fallait avant tout s’atteler aux questions économiques et sécuritaires alors que la Corée du Nord multiplie les tests nucléaires. Elle a cependant plaidé cette fois-ci qu’avec l’arrivée imminente des élections présidentielles en 2018, il était temps de s’atteler à la question de la Constitution.

« La Constitution actuelle, qui prévoit un mandat présidentiel unique de cinq ans et qui est en vigueur depuis l’amendement de 1987 il y a 30 ans, était sans doute adaptée à la période de démocratisation passée, mais elle ressemble à présent à un vêtement qui ne nous irait plus », a déclaré la présidente. Cette décision a lieu alors que nombreux sont ceux appelant à une réforme de la vie politique sud-coréenne. L’objectif : diviser en plusieurs personnes les pouvoirs qui sont aujourd’hui alloués au seul président.

Straits Times – Reprise ou surplace ? Avancée ou recul ? Il est difficile de savoir ce qu’il ressort de la large discussion à huis clos de deux jours qui a eu lieu ce week-end à Kuala Lumpur entre un groupe d’anciens diplomates américains et des représentants du gouvernement de Pyongyang – discussion par ailleurs confirmée ce lundi 24 octobre par les autorités de Séoul et de Washington.

Cette rencontre est la dernière en date d’une série de pourparlers non officiels entre Américains et Nord-Coréens appelés communément Track 2, alors même que les deux pays n’entretiennent plus aucun contact officiel. En effet, depuis le mois de juillet dernier, le « royaume ermite » a coupé le dernier canal de discussion encore en activité – ou « canal de New York » – suite aux sanctions prises à l’égard de Kim Jong-un.

Etaient présents autour de la table dans la capitale malaisienne ce week-end, l’actuel vice-ministre nord-coréen des Affaires étrangères, et ancien vice-ambassadeur de Pyongyang à l’ONU, Han Song-Ryol, et Robert Gallucci, l’ancien négociateur en chef des accords de 1994 qui avaient vu le gel du programme nucléaire nord-coréen, nous précise le quotidien singapourien.

Pour Leon Sigal, un spécialiste académique des deux Corées présent lors des discussions, la question du programme nucléaire nord-coréen était sur toutes les lèvres. Selon les propos du chercheur cités par l’agence de presse sud-coréenne Yonhap, la principale divergence vient que les envoyés de Pyongyang souhaitent « d’abord signer un accord de paix avec les Etats-Unis avant d’aborder les questions militaires », alors que pour les négociateurs Américains, l’« arrêt du programme nucléaire est un prérequis à toute discussion ultérieure. »

Pour le Straits Times, cette table ronde se tient de façon concomitante à deux autres discussions. Tout d’abord, la possibilité d’un changement de politique de la part de Washington en cas de changement d’administration. En effet, de nombreuses voix se sont élevées de la capitale fédérale américaine ces derniers temps contre l’ineeficacité des sanctions et des menaces contre Pyongyang. Elles n’empêchent nullement le régime de Kim Jong-un de continuer à développer son arsenal nucléaire, jusqu’à menacer directement les Etats-Unis. Par ailleurs, des pourparlers sont en cours au sein du Conseil de sécurité de l’ONU pour la mise en place d’une nouvelle résolution – et de sanctions attenantes – condamnant le dernier essai nucléaire nord-coréen de septembre dernier.

Asie du Sud-Est

Reuters – Que voulait vraiment dire Rodrigo Duterte lorsqu’il annonçait une « séparation » avec les Etats-Unis ? Washington devrait avoir plusieurs réponses à ses questions aujourd’hui, ce lundi 24 octobre, alors que le ministre philippin des Affaires Étrangères, Perfecto Yasay, doit rencontrer le vice-secrétaire d’Etat américain en charge de l’Asie du Sud-Est, Daniel Russel. Ce dernier affirmait déjà ce matin que les relations entre Manille et Washington restaient « solides » même si la dernière déclaration de Duterte a soulevé de vives inquiétudes. Vendredi dernier, le 21 octobre, le président annonçait à Pékin qu’il se « séparait » des Etats-Unis, son allié de longue date, au profit de la Chine (voir notre revue de presse du 21 octobre).

Dès samedi, cet habitué des déclarations à l’emporte-pièce nuançait déjà ses propos précisant qu’il s’agissait avant tout de dépendre moins de son partenaire économique et militaire, rapporte The Philippine Star. « Rompre les relations avec notre ami le plus proche, notre seul allié militaire et notre partenaire stratégique irait à l’encontre de l’intérêt national. Mais une séparation avec cette ancienne puissance coloniale semble nécessaire pour mener à bien notre politique étrangère indépendante », expliquait de son côté Perfecto Yasay dans un post sur Facebook. Et d’ajouter : « Cela signifie se libérer des chaînes qui nous maintiennent prisonniers des investissements étrangers pour permettre à notre peuple de régler les problèmes que connaît notre pays sans avoir à se soucier d’une ingérence étrangère. »

Jusqu’à la prise de fonctions de Duterte le 30 juin dernier, Manille était l’un des plus fidèles alliés des Etats-Unis en Asie. Mais depuis, la relation entre les deux Etats s’est fortement détériorée, le président philippin n’acceptant pas les critiques des Etats-Unis contre sa lutte anti-drogue qui a déjà fait plus de 3 700 morts dans le pays. Duterte a ainsi qualifié le président Obama de « fils de pute » avant d’annoncer la fin du pacte militaire entre les deux Etats.

Channel News Asia – Pour la première fois, la junte s’en prend aux avocats. Sirikan Charoensiri est accusée de sédition et d’avoir désobéi aux autorités thaïlandaises samedi 22 octobre après avoir refusé de fournir les téléphones portables de ces clients : 14 étudiants qui avaient été arrêtés l’année dernière alors qu’ils manifestaient. Depuis le coup d’Etat de mai 2014, le gouvernement soutenu par les militaires tente de museler l’opposition : les manifestations et rassemblements ont été interdits et plusieurs journalistes, dessinateurs, opposants politiques ont été arrêtés et jugés devant un tribunal militaire provoquant de vives critiques de la part de la communauté internationale.

Sirikan Charoensiri est cependant la première avocate jugée pour sédition. Une façon, selon les militants de défense des droits de l’homme, de faire de la jeune femme un exemple pour ses confrères. Elle risque jusqu’à sept ans de prison (voir notre reportage du 22 février 2016).

TiMynamar Timestre – L’isolement du Rakhine se renforce. Alors que les écoles rouvrent ce lundi matin, le 24 octobre, dans cet Etat de l’Ouest birman en proie à des violences depuis le 9 octobre dernier, les ONG peinent toujours à atteindre la région pour fournir des aides aux milliers de personnes déplacées. « Les récents combats dans le nord de l’Etat Rakhine ont amené l’armée à bloquer l’accès à la région aux associations qui fournissent une aide essentielle aux personnes en dangers », déplore Brad Adams, directeur de Human Rights Watch en Asie. « Les Rohingyas [minorité musulmane dans la région, NDLR] ont été particulièrement touchés et beaucoup n’ont que cette aide pour survivre. »

La situation a dégénéré lorsque des hommes armés et masqués ont attaqué des postes de police à la frontière avec le Bangladesh provoquant la mort de neuf personnes le 9 octobre. Le gouvernement a alors déclaré le nord de la région « zone opérationnelle » rendant quasi impossible de connaître la situation réelle. Au total, plus de 10 000 Rohingyas auraient été déplacés selon ECHO, l’organisme d’aide humanitaire et de protection civile de l’Union européenne. Plusieurs voix s’élèvent, notamment chez les dirigeants de groupes rohingyas, accusant le gouvernement de crimes de guerre. « Certes, le gouvernement doit retrouver les responsables de l’attaque du 9 octobre mais il doit le faire dans le respect des droits de l’homme, et cela signifie laisser les journalistes et les ONG faire leur travail », conclut Brad Adams. Le gouvernement a pointé du doigt un groupuscule islamique attaché à un groupe Rohingya mais aucune preuve n’a, à ce jour, été apportée. Il s’agit de l’épisode de violences le plus meurtrier depuis les combats qui avaient fait rage dans la région en 2012.

Asie du Sud

Hindustan Times – Au moins 21 rebelles maoïstes, dont plusieurs leaders, ont été tués par les forces de sécurité indiennes dans l’est du pays aujourd’hui, lundi 24 octobre. Un groupe de 30 à 40 maoïstes s’étaient réunis dans une zone à cheval entre les régions de l’Andhra Pradesh et de l’Odisha où ils ont été pris en embuscade par la police indienne. 18 corps ont déjà été retrouvés pendant que les opérations se poursuivent.

Depuis un demi-siècle, la guérilla maoïste est repliée dans un « corridor rouge » de forêts au centre de l’Inde. Elle justifie ses combats par ses revendications en termes d’emplois, de terres et de meilleurs droits pour les minorités tribales qui vivent dans une grande pauvreté. Cette nouvelle attaque serait l’un des épisodes les plus meurtriers cette année. En juillet dernier, dix commandos paramilitaires indiens avaient été tués lorsqu’une série de bombes artisanales avaient été déclenchées au passage de leur convoi (voir notre revue de presse du 10 juillet). Au moins 7 000 personnes ont perdu la vie dans ce conflit entre 2005 et 2016, selon le site spécialisé South Asia Terrorism Portal. Pour comprendre les enjeux de la rébellion maoiste en Inde, (re)lire nos dossiers : « Inde : la guerre oubliée des maoïstes » et « Inde : le naxalisme, aux origines du maoïsme indien« .

The Express Tribune – Nouveaux affrontements entre l’Inde et le Pakistan. Selon le quotidien Express Tribune, deux civils – dont un enfant d’un an – sont morts et sept personnes ont été blessées dans une fusillade dans la région du Pendjab à la frontière avec le Jammu-et-Cachemire. La semaine dernière, un homme avait été tué et cinq autres personnes blessées lors d’une précédente attaque. Selon Nafees Zakaria, porte-parole du ministère pakistanais des Affaires étrangères, l’Inde a violé à plusieurs reprises le cessez-le-feu le long de la ligne de contrôle, frontière de facto entre les deux pays. « L’armée pakistanaise a répondu de manière appropriée », a-t-il affirmé sur son compte Twitter. Selon Nafees Zakaria, l’Inde aurait violé 90 fois le cessez-le-feu entre New Delhi et Islamabad. Ce dernier événement a lieu alors que les tensions entre le Pakistan et l’Inde sont au plus fort depuis l’attaque de la base militaire d’Uri le 18 septembre dernier. Depuis, New Delhi tente d’isoler Islamabad réitérant dès qu’elle le peut que son rival voisin est un Etat « terroriste », rappelle Dawn.
The Hindu – La production d’opium repart à la hausse. Selon des estimations de l’ONU, l’Afghanistan, premier fournisseur mondial, a vu une augmentation de 10% en un an des surfaces dédiées au pavot, matière première de l’opium, atteignant ainsi leur troisième plus haut niveau en 22 ans. Selon les Nations unies, cette tendance est due non seulement à une insécurité grandissante, qui empêche l’accès à certaines régions et la destruction des cultures notamment dans le sud du pays, mais aussi à de meilleures conditions climatiques. Une source d’inquiétude pour le gouvernement afghan : le général Baz Mohammad Ahmadi, vice-ministre de l’Intérieur chargé de la lutte anti-drogue, rappelle que le pavot « finance la plupart des guerres en Afghanistan : partout où vous voyez du pavot, vous avez des combats ». Depuis le printemps, les soldats américains déployés dans le pays n’ont cessé d’alerter sur « la très bonne récolte » qui permet aux Talibans de multiplier les offensives contre les capitales provinciales et les poches d’insécurité sur la plupart des grands axes.
Par Joris Zylberman, Cyrielle Cabot et Antoine Richard, avec Anda Djoehana Wiradikarta à Paris

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