Inde : le Bihar, un test politique, un enjeu économique
S’il était en Europe, le Bihar (100 millions d’habitants) serait le pays le plus peuplé, et son PIB (70 milliards de dollars) le classerait à la dernière place ; en Afrique, son revenu en parité de pouvoir d’achat le mettrait au niveau de l’Erythrée.
Le dernier de la classe
A l’origine de la pauvreté du Bihar
A cet héritage institutionnel, s’ajoutent des contraintes naturelles. Les districts du nord du Bihar, un quart de la superficie cultivée, sont périodiquement inondés par les crues de la rivière Kosi qui nettoient les semences et les engrais. La résolution de ce problème passe par des négociations entre l’Inde et le Népal.
Dans les années 1950 et 60, la croissance démographique du Bihar a été inférieure à la moyenne indienne. Elle l’a rattrapé dans les années 1970 et 80 et l’a dépassé entre 1990 et 2015. Ayant triplé entre 1950 et 2015, la population est plus jeune que la moyenne indienne. Du fait de la pression démographique, les propriétés ont été fractionnées et de nombreux paysans biharis ont émigré vers d’autres Etats, où ils vivent de petits boulots (conducteurs de rickshaw à Delhi, journaliers agricoles dans l’Uttar Pradesh et le Penjab).
Un Etat faiblement industrialisé
En 2001, le sud du Bihar a « bifurqué » pour devenir le Jarkhand (31 millions d’habitants). Le gouvernement de Patna n’ayant fait aucun effort pour promouvoir le secteur manufacturier, cette « bifurcation » a privé l’Etat de sa base industrielle. A l’origine de seulement 7% du PIB (50% au Gujarat et 18 % dans l’Union Indienne), le secteur manufacturier relève pour moitié d’activités informelles. L’un des rares atouts de l’Etat est l’agro-industrie dont le développement est freiné par les délestages d’électricité.
La « bifurcation » a renforcé la part des services dans l’économie alors que le pays est le plus pauvre du pays.
Question de gouvernance
En 1990, allié aux partis proches des intouchables, Lalu Prasad, un OBC de la caste des Yadav, a remporté les élections. Marquant l’avènement d’une caste soucieuse de développement, sa victoire aurait pu accélérer la croissance. Cela n’a pas été le cas. Ne manifestant aucun intérêt pour le développement, Lalu Prasad a mené une politique d’ « discrimination positive » des basses castes. Le Bihar a illustré le pire de la gouvernance indienne : la corruption et le népotisme. Après avoir cherché en vain à mettre cet Etat sous tutelle, Delhi a suspendu Lalu qui a fait élire son épouse Rabi Devri et a gouverné jusqu’en 2005.
Ayant rompu avec Lalu Prasad en 1994, Nitish Kumar a été élu en 2005 et a donné la priorité au développement. Ce qu’il a accompagné d’autres mesures nécessaires : la restauration de la sécurité, le succès dans la lutte contre la corruption, l’amélioration de la gouvernance (exigence de satisfaction des demandes aux administrations) et des efforts pour la formation. Ainsi, pour encourager la scolarisation dans le secondaire des jeunes filles des zones rurales, le gouvernement de Nitish Kumar leur offre une bicyclette.
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