Il y a 90 ans, "l'incident de Shanghai" annonçait la guerre sino-japonaise
Provocations des « ronins »
Victoire stratégique de Chiang Kaï-shek
L'extraterritorialité des concessions étrangères dans le Shanghai d'avant-guerre
Inspirée des capitulations imposées aux XVIème siècle par les Européens à l’Empire ottoman mais, bien avant, du statut des ligues commerçantes dans les villes libres du nord de l’Europe au Moyen-Àge, l’extraterritorialité ne signifie pas l’impunité judiciaire mais que le ressortissant d’un pays donné sera jugé non en vertu des lois locales, mais par ses compatriotes et selon les codes civil et criminel de son pays d’origine. C’est ainsi que les États-Unis avaient un tribunal, « The United States Court for China », présidé par un juge américain nommé par Washington. Les condamnés purgeaient leur peine dans une prison des Philippines – alors sous protectorat américain – ou à Hawaï. On imagine le casse-tête juridique que représentaient quatorze tribunaux différents qui jugeaient en fonction de systèmes juridiques différents dans la même ville. La Concession française avait simplifié en partie cette complexité en créant des cours mixtes où siégeaient à part égales juges français et chinois.
L’exterritorialité imposée dans la foulée des guerres de l’opium avait été envisagée dès ses origines comme temporaire, le temps que la Chine modernise sa justice et adopte des règles excluant l’obtention des aveux par la torture, le recours à des modes d’exécution « barbares » et reconnaissant les droits de la défense, entre autres. Bref, qu’elle adopte un code pénal et civil sur le modèle occidental. Cette complexité favorisait forcément les abus et les injustices les plus graves. Quand Chiang Kaï-shek cherche à imposer la journée de travail de huit heures au début des années 1930, les employeurs étrangers refusent en se retranchant derrière l’extraterritorialité.
Mais elle offrait aussi certaines protections en matière de liberté d’expression : il suffisait de placer nominalement un ressortissant étranger comme directeur pour qu’une publication échappe à la censure de Chiang Kaï-shek, la société éditrice étant censée être étrangère. D’où l’étonnante – bien que relative – liberté dont jouissaient la presse et l’édition à Shanghai, sans équivalent alors dans le reste de la Chine.
Soutenez-nous !
Asialyst est conçu par une équipe composée à 100 % de bénévoles et grâce à un réseau de contributeurs en Asie ou ailleurs, journalistes, experts, universitaires, consultants ou anciens diplomates... Notre seul but : partager la connaissance de l'Asie au plus large public.
Faire un don