Élections à Taïwan : le statu quo avec la Chine en danger ?

Contexte
Proclamée le 1er octobre 1949 à Pékin, la République populaire de Chine (RPC) annonce se substituer entièrement à la République de Chine. Cette dernière, dont les institutions se replient à Taipei au mois de décembre, avait été fondée sur les décombres de l’empire des Qing, le 1er janvier 1912. Dans un contexte de guerre civile entre communistes et nationalistes, chaque régime prétend alors représenter l’ensemble de la nation chinoise et refuse le principe de coexistence de deux Chine sur la scène internationale : la RPC compte bien « libérer Taiwan » (jiefang Taiwan, 解放台湾) tandis que la République de Chine, aux mains du KMT de Chiang Kai-shek, prévoit de « reconquérir le continent » (guangfu dalu, 光復大陸).
Si Pékin n’a jamais abandonné ses revendications de souveraineté sur Taïwan, Taipei est revenu sur son projet de reconquête armée au tournant des années 1990, à la faveur de la démocratisation et de la « taïwanisation » du régime (indigénisation de la République de Chine à Taïwan). Pour autant, ce processus n’a jamais conduit à reconnaître officiellement l’existence de la RPC ni sa souveraineté sur le continent.
Les premières élections législatives non partielles depuis le repli de 1949, organisées en 1992, et les premières élections présidentielles au suffrage universel direct tenues en 1996, ont consacré la division du paysage politique taïwanais entre deux partis : le KMT, ex-parti unique, et le PDP, fondé dans l’illégalité en 1986. Leur clivage s’articule autour de la trajectoire qu’ils souhaitent voir appliquée à Taïwan : « réunification » (tongyi, 統一) avec le continent pour le premier, versus « indépendance » (duli, 獨立 – c’est-à-dire reconnaissance de la coexistence de deux États), pour le second. Mais face à l’impossibilité de concrétiser ces projets à courte échéance dans des conditions convenables, les deux partis se sont accordés sur la défense du statu quo dans le détroit de Taïwan. Une solution qui ne saurait trop convenir à la RPC, toujours déterminée à faire usage de la force. Objectif : récupérer ce qu’elle considère comme un fragment de son territoire national, échappant injustement à son contrôle.
La rhétorique de la « mangue séchée »
Une élection en ombres chinoises
Retour de vague
« À tous mes chers amis qui ferment encore les yeux, tous les présidents élus ces vingt dernières années sont diplômés du département de droit de l’Université nationale de Taiwan [Taida, 台大 – l’université la plus prestigieuse du pays, NDLR]. Les diplômés de ce département font les meilleurs juges, procureurs et avocats du pays, mais en ce qui concerne le poste de président de la République, les résultats sont de moins en moins bons. […] Voulons-nous encore, en 2020, d’un président formé en droit dans cette université ? Ne pouvons-nous pas changer ? Je demande à tout le peuple taïwanais, à tous mes chers amis, de se pencher sur la question. »
Taïwan à la croisée des chemins ?
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