L'Asie et le coup de blues de la deuxième mondialisation
La mondialisation a repris après la Seconde Guerre mondiale avec la naissance en 1947 du GATT (accord général sur les tarifs douaniers et le commerce) qui a organisé plusieurs round de négociations multilatérales, jusqu’à la création de l’Organisation mondiale du commerce (1995) et le lancement du cycle de Doha qui s’est enlisé. Depuis déçus par le multilatéralisme, les Américains cherchent à lui substituer un « similarisme », en se faisant les promoteurs d’accords multi-latéraux de libre-échange (le Partenariat transpacifique en Asie, le TAFTA avec l’Europe) entre pays partageant les mêmes valeurs libérales.
Le ralentissement du commerce mondial
Alors que les échanges mondiaux augmentaient plus vite que le PIB jusqu’à la crise de 2008, ils évoluent depuis sur un rythme plus lent. Aussi, rapportés au PIB mondial, ils n’ont pas retrouvé le niveau d’avant la crise. Jusqu’alors, l’Asie était un moteur du commerce global et si elle représentait les trois quarts de sa croissance en volume, en 2015 elle n’y contribue plus qu’au quart. Les transformations en cours en Chine contribuent à cette évolution avec la baisse de la part relative du commerce de processing – l’assemblage de tissus, composants électroniques en produits finis – et la « remontée des filières » par les entreprises chinoises (ou les filiales étrangères basées en Chine), qui substituent des fabrications made in China aux importations. Le ralentissement pourrait être amplifié par le raccourcissement des « chaînes globales de valeur » depuis les dernières catastrophes naturelles – tsunami, Fukushima, inondations de Bangkok et tremblement de terre de Kyushu – qui ont illustré leurs fragilités.
Qu’en est-il des échanges de services (tourisme, transport, centre d’appels, informatique…) ? Se substituent-ils aux échanges de marchandises ? Non. D’une part, la valeur de ces échanges représente un montant très inférieur – cinq fois moins -, d’autre part, leur évolution n’est pas très différente : passée par un plafond, leur croissance ralentit. Le commerce international diminue-t-il car on produit davantage à l’étranger ? Non. Rapporté au PIB mondial le stock (montant cumulé) des investissements directs étrangers (IDE) s’est stabilisé et il a légèrement diminué en 2014. Cela concerne la finance : la lutte contre les paradis fiscaux et le durcissement de la régulation bancaire ont provoqué une baisse d’environ 25 % des flux de capitaux.
La mondialisation n’ a pas fait le plein
S’il se confirme, l’essoufflement de la mondialisation sera mieux accueilli au Nord qu’au Sud. En effet, Américains, Européens et Japonais sont de plus en plus sceptiques quant à ses bienfaits. Les candidats aux élections américaines ont compris qu’elle ne fait plus recette, à l’instar de Donald Trump mais aussi d’Hillary Clinton qui fustige le TPP après en avoir été l’avocate lorsqu’elle était Secrétaire d’Etat.
Vu du Sud, l’appréciation est différente. Née à l’initiative du Nord, la mondialisation a contribué au processus de convergence des revenus entre le Sud et le Nord. En particulier en Asie où elle a porté le « vol des oies sauvages » et l’envol de tous les pays, de la Corée du Sud à la Chine en passant par l’Indonésie. Car, comme le prédit un proverbe, « lorsque le vent souffle fort, même les dindes peuvent voler ». Le vent est retombé. Une mauvaise nouvelle pour les pays qui comptaient s’appuyer sur la mondialisation pour s’envoler à leur tour. Ce changement ralentira la convergence, à moins que comme l’annonce Robert J. Gordon et plus récemment le FMI à propos des perspectives américaines, le ralentissement du Nord soit plus marqué que celui du Sud.
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