La Chine unit ET divise l'ASEAN
La hantise de la « théorie des dominos »
Contrairement à ce qu’annonçait la théorie des dominos, la réunification du Vietnam en 1975 n’a pas déclenché de raz-de-marée. La menace chinoise s’est estompée et les priorités de l’ASEAN ont évolué de la politique vers l’économie. Donnant la priorité à l’intégration régionale, les chefs d’Etat ont alors engagé plusieurs programmes qui ont été autant d’échecs. Parmi eux, la promotion d’accords commerciaux préférentiels (PTA). Chaque pays devait préparer une liste de produits pour lesquels il acceptait d’annuler les droits de douanes sur leurs importations en provenance d’autres pays de l’ASEAN. Réticentes à ces mesures timides de libéralisation, les administrations les ont contournées en plaçant en priorité les produits les moins échangés : l’Indonésie, un archipel situé à l’équateur, a ainsi annulé les droits de douanes sur les importations de chasse-neige ! Au final, les échanges relevant du programme PTA ont représenté moins de 3 % du commerce de l’ASEAN.
En dépit des échecs de plusieurs tentatives, les chefs d’Etat de l’ASEAN ont signé en 1992 un accord de libre-échange, l’Asean Free Trade Agreement (AFTA). Un engagement accueilli avec beaucoup de scepticisme par tous les observateurs. Mais contre toute attente, l’ASEAN a mis en œuvre l’AFTA. Un succès que l’on peut attribuer, indirectement à la Chine.
En effet, contrairement aux apparences, l’objectif de l’AFTA n’était pas de promouvoir l’intégration régionale mais de répondre au défi que représentait l’ouverture de la Chine aux investissements directs étrangers (IDE). Car les pays de l’ASEAN, bien plus ouverts aux IDE que ne l’avaient été le Japon ou la Corée, redoutaient d’être marginalisés par la Chine. Plus que le contexte international de l’époque (naissance du Grand Marché en Europe et du Nafta – North American Free Trade Agreement – en Amérique Latine), cette crainte les a décidé à promouvoir l’ASEAN comme un marché unique auprès des investisseurs. Ainsi, dans un contexte international de baisse des tarifs, ils ont démantelé les barrières douanières qui freinaient les échanges intra-ASEAN. Si la construction de l’AFTA n’a pas empêché la Chine d’accueillir plus d’IDE que l’ASEAN, elle a contribué à améliorer l’attractivité de l’Association. Depuis 2014, cette dernière attire même davantage d’IDE que la Chine.
Le « comportement responsable » de la Chine dans la crise asiatique
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