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Kamala Harris ou Donald Trump : quelle différence pour l’Asie ?

La candidate démocrate à l'élection présidentielle américaine Kamala Harris et son adversaire républicain Donald Trump. (Source : NDTV)
La candidate démocrate à l'élection présidentielle américaine Kamala Harris et son adversaire républicain Donald Trump. (Source : NDTV)
Le choix des électeurs américains d’élire Kamala Harris ou Donald Trump à la Maison Blanche le 5 novembre prochain sera lourd de conséquences pour l’avenir politique et géostratégique de l’Amérique en Asie. Il sera déterminant pour ses alliés dans la région.
Le retour de Donald Trump à la tête des États-Unis serait perçu comme une catastrophe majeure pour Taïwan au premier chef. Mais aussi pour le Japon et la Corée du Sud, ainsi que d’autres pays de la zone qui y verraient la porte ouverte à la Chine communiste pour chasser l’Amérique de la zone et y établir durablement sa suprématie.
L’élection de Kamala Harris serait, en revanche, la garantie de la poursuite, peu ou prou, de la politique étrangère menée par Joe Biden. Une diplomatie fondée sur la priorité donnée à l’Asie : d’une part, la volonté de l’Amérique de contenir la montée en puissance de la Chine communiste et de l’autre, de renforcer les alliances politiques et militaires avec ses alliés dans la région.
Comme pour donner le ton de ce qu’il ferait s’il était réélu à la Maison Blanche, Donald Trump a déclaré publiquement le 16 juillet dernier que Taïwan devrait payer en échange de l’aide militaire qui lui est apportée par les États-Unis pour assurer sa défense face à la Chine. L’ex-président américain a tenu ces propos dans un entretien avec Bloomberg Businessweek, en réponse au journaliste lui demandant s’il défendrait l’île de Taïwan, revendiquée par Pékin comme faisant partie de son territoire.
« Je connais très bien ce peuple, je les respecte beaucoup. Ils nous ont pris environ 100 % de notre industrie des micropuces. Je pense que Taïwan devrait nous payer pour sa défense, a ainsi souligné Donald Trump. Vous savez, nous ne sommes pas différents d’une compagnie d’assurances. Taïwan ne nous donne rien », a-t-il ajouté non sans préciser que Taïwan se trouve à des milliers de kilomètres des États-Unis, laissant ainsi entendre que les Américains n’avaient nulle obligation de défendre les Taïwanais.
Ces propos avaient immédiatement jeté un froid à Taipei où le ministre de la Défense avait aussitôt dit que l’île devrait compter sur elle-même à l’avenir pour se défendre. Le Premier ministre taïwanais Cho Jung-tai avait, dès le lendemain, souligné que Taipei avait accru ces dernières années son budget militaire : « Nous souhaitons assumer davantage de responsabilités. Nous nous défendons nous-mêmes et assurons notre sécurité. »

« Nous devrions être très inquiets car Trump raisonne comme un homme d’affaires »

Ces commentaires sur Taïwan ont causé « une véritable commotion », explique Tony Hu, un ancien conseiller du Pentagone sur les affaires taïwanaises aujourd’hui basé à Taipei, cité par le site américain Politico. « Nous devrions être très inquiets [car] Trump raisonne comme un homme d’affaires, même s’agissant de la sécurité nationale des États-Unis et des questions de géopolitique globales. » De plus, ses propos sont inexacts puisque Taïwan paye rubis sur l’ongle pour les livraisons d’armes américaines, des sommes qui représentent « des milliards de dollars », souligne le porte-parole du département d’État Matthew Miller, interrogé sur les déclarations de Donald Trump.
Quant aux accusations portant sur le déclin des semi-conducteurs américains causé par les succès du champion mondial TSMC, elles sont démenties par le fait que la puissance du groupe taïwanais tient à un savoir-faire acquis indépendamment des technologies américaines, rappelle Chris Miller, professeur associé à la Fletcher School de la Tufts University dans le Massachusetts et auteur du livre Chip War : The Fight for the World’s Most Critical Technology (traduction française : La guerre des semi-conducteurs, l’enjeu stratégique mondial, éditions L’artilleur), également cité par Politico.
Cette déclaration en rappelle une autre, presque identique, du même Donald Trump. Ce dernier, en mai 2024, avait déclaré au magazine américain Time que les États-Unis pourraient retirer ses 40 000 soldats stationnés en Corée du Sud si ce pays « prospère » refusait de payer le coût de l’aide militaire américaine. « J’ai dit à la Corée du Sud qu’il est temps pour vous de payer. Ils sont devenus un pays très prospère. Nous avons payé l’essentiel de le leur [capacité] militaire, sans rien demander. » Une fausse assertion puisque la Corée du Sud, confrontée à la menace de son voisin nord-coréen et de la Chine toute proche, verse plus d’un milliard de dollars par an aux États-Unis à titre de compensation pour la présence militaire américaine.
Outre le tollé provoqué à Séoul, ces propos avaient suscité une onde de choc auprès des autres alliés des États-Unis dans la région, qui se sont mis à douter de la solidité sinon de la fiabilité de l’alliance avec les Américains pour le cas où Donald Trump était élu en novembre prochain. Un doute que la propagande de Pékin ne manque d’ailleurs jamais d’alimenter. Ces propos sont en réalité une illustration éloquente de l’idée que se fait Donald Trump du rôle des États-Unis sur la scène mondiale et de sa méconnaissance des enjeux stratégiques du globe. Pour lui, tout se résume à des transactions financières et tout est monétisé. Président, il faisait peu de cas des aspects géopolitiques ou de la nature des gouvernements avec qui traiter, qu’ils soient démocratiques, autocrates ou totalitaires.
*Australie, Bruneï, Canada, Chili, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour et Vietnam.
En résumé, sur la base de son slogan Make America Great Again (MAGA) qui reste le cœur de son discours politique, le candidat Donald Trump, 78 ans, campe sur ses positions de l’époque : priorité à l’isolationnisme afin de sauvegarder les intérêts des Américains. Lorsqu’il était arrivé à la Maison Blanche, l’une de ses premières décisions avait été en janvier 2017 de signer une série de décrets dont la sortie des États-Unis du Traité transpacifique (TPP Trans-Pacific Partnership). Cet accord de libre-échange entre les Américains et onze autres pays de la zone Pacifique* avait été signé par Barack Obama mais pas ratifié. Il avait donc suffi d’un paraphe du nouveau président pour sortir de cette entente âprement négociée pendant huit ans. Une alliance qui devait concentrer 40 % du PIB mondial et un tiers des échanges commerciaux de la planète. Ce retrait américain avait sonné l’alarme au Japon où les autorités redoutent plus que tout un désengagement des États-Unis face à la Chine.
En outre, Donald Trump a récemment plusieurs fois remis en cause les fondements mêmes de l’OTAN, laissant entendre que son pays pourraient s’en retirer et ne pas défendre un allié en cas d’attaque russe comme l’y obligerait l’un des principaux engagements pris par les membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord. En Europe, ces propos n’ont pas manqué de semer le doute et mis en lumière la probabilité d’un recul du soutien américain dans les années à venir en cas de victoire de Donald Trump le 5 novembre. En Asie, ces propos n’ont fait que renforcer les doutes.
« Toute suggestion selon laquelle les Alliés ne se défendront pas les uns les autres sape notre sécurité à tous, y compris celle des États-Unis, et expose les soldats américains et européens à un risque accru, avait déclaré dans un communiqué le secrétaire général de l’organisation, Jens Stoltenberg. L’OTAN reste prête et capable de défendre tous les Alliés et toute attaque contre l’OTAN entraînera une réponse unie et énergique. Je suis convaincu que les États-Unis resteront un allié fort et engagé au sein de l’OTAN, quel que soit le vainqueur de l’élection présidentielle. »

Xi Jinping, « un homme brillant », selon Trump

A l’occasion d’un rassemblement électoral, Donald Trump avait relaté une discussion qu’il aurait eue avec le dirigeant d’un État membre de l’Alliance atlantique. « Un des présidents d’un gros pays s’est levé et a dit : « Eh bien, monsieur, si on ne paie pas et qu’on est attaqué par la Russie, est-ce que vous nous protégerez ? », a raconté le candidat républicain lors d’un rassemblement en Caroline du Sud, avant de donner sa réponse : « Non, je ne vous protégerai pas. En fait, je les encouragerai à vous faire ce qu’ils veulent. Vous devez payer vos dettes. »
À l’issue d’une réunion des ministres des Affaires étrangères du Quad mi-juillet, le secrétaire d’État américain Antony Blinken s’est voulu rassurant à l’égard du Japon à l’approche du scrutin présidentiel du 5 novembre. Les États-Unis et le Japon « entretiennent une alliance qui […] non seulement existe depuis des décennies mais s’est renforcée. Précisément du fait de son intérêt, je pense – en réalité plus que cela même, je sais – qu’elle résistera, quel que soit le résultat des élections dans l’un ou l’autre de ces pays. » Le Dialogue quadrilatéral pour la sécurité dit « Quad » est une coopération informelle entre les États-Unis, le Japon, l’Australie et l’Inde mise en place dans les années 2000. Elle comprend des rencontres diplomatiques et des exercices militaires. Le régime chinois y voit une organisation visant à contenir son influence dans la région.
On se rappelle que Donald Trump a déclaré à maintes reprises qu’avec lui au pouvoir, la guerre en Ukraine serait réglée « en moins de vingt-quatre heures » sur la base d’un « plan secret » jamais explicité. Quelques jours après la tentative d’assassinat dont il avait été la cible, il avait déclaré benoîtement avoir reçu « une belle lettre » du président chinois Xi Jinping avec qui il « s’entendait très bien » lorsqu’il était à la Maison Blanche.
On se souvient aussi de sa rencontre quelque peu surréaliste en juin 2019 avec le dictateur nord-coréen Kim Jong-un à l’intérieur de la zone démilitarisée (DMZ) qui sépare la Corée du Nord et la Corée du Sud. Il avait même fait quelques pas sur le sol de la Corée du Nord, bras dessus bras dessous avec Kim Jong-un, une première pour un président américain, avant de poser aux côtés du leader nord-coréen pour les journalistes et les photographes sur la ligne de démarcation. Il avait fait part au numéro un nord-coréen de sa volonté de l’inviter à se rendre aux États-Unis et à la Maison Blanche.
« Cela se fera un jour ou l’autre », avait-il déclaré devant la presse. « C’est un grand jour pour le monde », s’était-il félicité devant un Kim Jong-un tout sourire qui avait parlé du « grand honneur » que serait pour lui de recevoir le président américain à Pyongyang, espérant ainsi « surmonter les barrières ». Cette rencontre était la troisième entre les deux hommes depuis un sommet historique à Singapour en juin 2018 puis leur rendez-vous raté de Hanoï, au Vietnam en février. Donald Trump pensait avoir trouvé en la personne de Kim Jong-un un « nouveau meilleur ami », avait alors confié John Bolton, ancien conseilleur à la sécurité national de la Maison Blanche. Ces trois rencontres improbables devaient néanmoins rester sans lendemain.
Officiellement, les alliés asiatiques des États-Unis n’ont jamais exprimé publiquement leurs inquiétudes dans la perspective d’une réélection de Donald Trump à la Maison Blanche. En réalité, au nom des intérêts nationaux, cela leur est impossible. Mais en privé, nombre de diplomates expliquent que ces pays ont depuis des mois entamé un travail de fond pour se préparer à une telle éventualité.
Début juillet, Donald Trump a décrit Xi Jinping comme « un homme brillant ». Ce qui a fait dire à Jason Hsu, un ancien politicien de l’opposition taïwanaise aujourd’hui conseiller à la Harvard Kennedy School, que « si le candidat à la Maison Blanche considère possible un accord avec le leader chinois qui engloberait Taïwan, cela pourrait créer une situation plutôt très mauvaise ». Avec lui à la Maison Blanche se poserait donc la question de l’engagement américain à défendre Taïwan. Or il n’existerait alors aucune garantie que les Américains voudraient « défendre Taïwan à des milliers de kilomètres alors que beaucoup d’entre eux ne sont pas en mesure de dire s’il s’agit de Taïwan ou de la Thaïlande ou de Tokyo », explique Douglas Paal, un ancien directeur de l’Institut américain à Taipei, de facto l’ambassade américaine dans l’île, sous le mandat du président de l’époque Georges Bush.

Kamala Harris dans la continuité de Joe Biden

Kamala Harris, 59 ans, la concurrente de Donald Trump dans la course à la Maison Blanche, n’a, pour le moment, pas dit grand-chose sur ce que serait sa politique étrangère en Asie pour le cas où elle ressortait gagnante au soir du 5 novembre. Mais plusieurs prises de paroles et événements qui ont jalonné son parcours de vice-présidente de Joe Biden depuis 2021 indiquent qu’elle suivrait globalement sa propre politique, que ce soit sur le plan géostratégique ou du respect des droits humains.
C’est ainsi qu’en 2022, elle est montée à bord d’un navire de la flotte des Philippines en mer de Chine du Sud pour y déclarer sa solidarité et rappeler le traité de défense liant les États-Unis avec ce pays. Elle avait dénoncé les manœuvres navales et les opérations de harcèlement de la Chine contre les Philippines comme étant « illégales et irresponsables ». La même année, à bord d’un navire de la flotte américaine stationné au Japon, elle déclarait que les États-Unis « continueront à soutenir la défense de Taïwan, en accord avec notre politique établie depuis longtemps », suscitant des critiques acerbes du régime chinois. Dans le passé, elle a également plusieurs fois exprimé des critiques envers les violations des droits humains en Chine de même que les opérations attribuées aux Chinois de pillages ou de piratages dans le cyberespace.
« Comme présidente, Harris continuerait probablement [de faire sienne] l’importance donnée par Biden au renforcement des alliances avec le Japon, la Corée du Sud et d’autres puissances régionales [en Asie] pour contrer la posture agressive de Pékin, estime Lily McElwee, chercheuse sur la Chine du Center for Strategic and International Studies basé à Washington, citée le 31 juillet par le Wall Street Journal. Il est quasi certain que ses options ont été formées par son rôle joué ces dernières années » en tant que vice-présidente.
Kamala Harris s’est rendue à quatre reprises en Asie et y a rencontré les dirigeants des cinq pays membres des traités d’alliance conclus par les États-Unis dans la région Indo-Pacifique (Japon, Corée du Sud, Philippines, Thaïlande, Indonésie). Elle a également rencontré le nouveau président de Taïwan, Lai Ching-te lorsqu’il était encore vice-président, de même que le président chinois Xi Jinping. « La vice-présidente a consacré beaucoup de son temps et de son énergie pour renforcer nos alliances et nos partenariats en Indo-Pacifique, ce qui constitue une part significative de notre stratégie d’ensemble visant à surpasser la Chine », soulignait une de ses assistantes, citée par le quotidien américain.
Jusqu’à présent, la direction chinoise s’est abstenue de prendre position entre Donald Trump et Kamala Harris. Il est cependant permis de penser qu’elle préférait l’option Donald Trump qui, même s’il a été le premier président américain à faire front contre la Chine, conduirait une politique étrangère isolationniste qui donnerait à Pékin les coudées franches pour marquer des points déterminants sur la scène internationale. En l’absence de déclarations officielles à Pékin, des commentaires éloquents sont apparus dans les médias chinois prenant pour cible l’apparence physique de la vice-présidente, ses origines ethniques indienne et jamaïquaine et le fait qu’elle est une femme, beaucoup d’entre eux doutant de ses capacités à battre Donald Trump.
En 2019, Kamala Harris a souligné que son pays entendait poursuivre le dialogue avec la Chine. « Sous mon administration, nous coopérerons avec la Chine sur des sujets tels que le changement climatique, mais nous ne permettrons pas que des violations des droits humains aient lieu sans réaction. » Pour le quotidien japonais Nikkei Asia, Kamala Harris, si elle remporte l’élection du 5 novembre, devrait vraisemblablement poursuivre la politique étrangère menée par Joe Biden puisqu’elle manque elle-même d’expérience dans ce domaine. « Son manque d’expérience en matière de politique étrangère serait quelque chose que les dirigeants asiatiques pourraient noter, explique Dhruva Jaishankar, directeur général du think tank américain Observer Research cité par le média japonais. Elle n’a pas exprimé d’opinion fortes sur [l’Asie]. Les questions de politiques étrangères pour lesquelles elle a été la plus engagée sont les questions de sécurité aux frontières et les questions migratoires en provenance d’Amérique Latine. »
En 2020, elle a néanmoins co-dirigé l’adoption au Congrès américain d’une loi, The Uyghur Human Rights Policy Act, qui autorise le gouvernement américain à imposer des sanctions contre toute entité ou individu reconnu responsable des abus ou actes de torture perpétrés contre la minorité ouïghoure dans la région du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, autrefois le Turkestan Oriental annexé par Pékin en 1950, la même année que le Tibet. Ancienne avocate, sénatrice et procureure de Californie, Kamala Harris s’est montrée très active pour combattre les actes de racisme contre les minorités ethniques aux États-Unis, y compris ceux visant les Asiatiques qui s’étaient multipliés pendant la pandémie de Covid-19.
Lorsqu’il a rencontré son homologue chinois Wang Yi le 27 juillet dernier à Vientiane (Laos), Le secrétaire d’État américain Antony Blinken en a profité pour dire au maître de la diplomatie chinoise que Kamala Harris, tout comme Joe Biden, était fermement engagée pour le respect d’un ordre international fondé sur des règles acceptées par la communauté internationale. Lors de cet entretien de plus d’une heure en marge d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Association des pays du Sud-Est asiatique (ASEAN), il a expliqué à Wang Yi que Joe Biden et Kamala Harris « estiment que la stabilité dans une relation est importante et que tous les deux croient également qu’il est important de maintenir l’ordre [international] basé sur des règles », a expliqué un responsable de haut rang du département d’État cité par le Washington Post.
Ces propos sont loin d’être anodins puisqu’ils illustrent la volonté de l’administration américaine actuelle d’informer la direction communiste chinoise du fait que la diplomatie américaine ne changera pas sur le fond en cas de victoire de Kamala Harris le 5 novembre. Les États-Unis, tout comme certains de ses alliés, estiment que l’objectif de la Chine communiste, partagé par la Russie, est de détruire l’ordre international actuel qu’ils estiment dominé par Washington, pour le remplacer par un autre qui leur serait acquis.
Le New York Times relève que Kamala Harris n’a jamais hésité à critiquer la posture agressive de la Chine en Asie. « Nous savons que Pékin continue de contraindre, d’intimider et d’exprimer des revendications sur la grande majorité de la mer de Chine du Sud », avait-elle déclaré en 2021 lors d’un discours prononcé à Singapour que rapporte le quotidien américain. Le même journal ajoute qu’elle avait, en septembre dernier en Indonésie, exigé de la junte birmane qu’elle « mette fin à des violences atroces » et exhorté à « rétablir » la démocratie en Birmanie. Pour autant, la vice-présidente a régulièrement refusé de tirer parti de ses origines raciales. « Je suis fière d’être Américaine », « je suis qui je suis et je m’en trouve bien ainsi », a-t-elle coutume de répondre à ceux qui l’interrogent sur ses origines indienne et afro-américaine.
Mais, comme l’explique The Economist dans sa dernière livraison, « son identité de première femme noire et d’Asie du Sud à concourir pour devenir présidente, si elle en fait bon usage, en ferait un symbole convaincant pour le rêve américain ». « Après des mois de campagne décousue, les Américains ont dans leurs mains une échéance capitale à un moment périlleux pour leur pays et pour le monde », conclut l’hebdomadaire britannique dans une allusion transparente aux semaines d’incertitudes suscitée par la santé vacillante de Joe Biden jusqu’à l’annonce de son retrait de la course à la Maison Blanche le 21 juillet dernier.
Par Pierre-Antoine Donnet

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A propos de l'auteur
Ancien journaliste à l'AFP, Pierre-Antoine Donnet est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages consacrés à la Chine, au Japon, au Tibet, à l'Inde et aux grands défis asiatiques. En 2020, cet ancien correspondant à Pékin a publié "Le leadership mondial en question, L'affrontement entre la Chine et les États-Unis" aux Éditions de l'Aube. Il est aussi l'auteur de "Tibet mort ou vif", paru chez Gallimard en 1990 et réédité en 2019 dans une version mise à jour et augmentée. Après "Chine, le grand prédateur", paru en 2021 aux Éditions de l'Aube, il a dirigé fin 2022 l'ouvrage collectif "Le Dossier chinois" (Cherche Midi). Début 2023, il signe "Confucius aujourd'hui, un héritage universaliste", publié aux éditions de l'Aube. Son dernier livre, "Chine, l'empire des illusions", est paru en janvier 2024 (Saint-Simon).