Société
Note de lecture

Livre : "Un taoïste n’a pas d’ombre" de Patrice Fava, les Chinois à la recherche de l’immortalité

Temple du Nuage blanc à Pékin. ((Source : Pixabay)
Temple du Nuage blanc à Pékin. ((Source : Pixabay)
Dans son livre Un taoïste n’a pas d’ombre, mémoires d’un ethnologue, paru en septembre 2023 aux éditions Buchet-Chastel, Patrice Fava, grand connaisseur de la Chine, dresse une somme de savoir impressionnante sur un pays où les croyances populaires sont encore bien vivantes, mais où, 74 ans après son arrivée au pouvoir, les ravages du Parti communiste sont partout visibles.

Contexte

Sinologue, ethnologue et anthropologue, Patrice Fava fait partie de ces savants qui ont le plus contribué, grâce à leur expérience sur le terrain, à comprendre la Chine et les Chinois. Diplômé de l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), il commence son périple dans le monde chinois en 1970. Il passe trois ans à l’ambassade de France à Pékin, multiplie les séjours à Taïwan, épouse une Chinoise et tourne des films essentiellement consacrés au taoïsme. De Pékin, où il est installé, il publie en 2013 Aux portes du ciel, puis un essai littéraire, L’Usage du Tao, ainsi que de nombreux textes érudits en chinois.

L'ethnologue français Patrice Fava. (Source : France TV)
L'ethnologue français Patrice Fava. (Source : France TV)
« Les Chinois, par bien des côtés, vivent dans un univers où le merveilleux et l’imaginaire occupent une place si importante, que j’ai fini par partager leur manière d’habiter le monde, explique l’auteur. Cela dit, dans la société actuelle, plus préoccupée par son leadership que par son histoire religieuse, devenir taoïste est un paradoxe et un choix à contre-courant des directives officielles. »
Voilà résumé le fil rouge de ce livre de 493 pages qui représente pour le lecteur un voyage extraordinaire dans le temps de cette Chine à la fois ancienne et contemporaine, à qui Patrice Fava a consacré sa vie en faisant sien ce précepte : « Le propre du taoïsme : cultiver son monde intérieur. »
Lui-même élève de Kristofer Schipper, le meilleur connaisseur occidental du taoïsme qu’il a fréquenté pendant cinquante ans jusqu’à son décès, il est aussi un ami proche du célèbre sinologue Simon Leys ainsi que du professeur de chinois de l’Inalco et sinologue Jacques Pimpaneau, eux aussi décédés, le premier en 2014 et le second en 2021.
Mais d’abord ce constat glaçant : « La manière dont les Occidentaux écrivent l’histoire politique de la Chine est si différente de celle des Chinois qu’il n’y a aucun dialogue possible entre eux et nous. Il faut définitivement renoncer à toute forme de complicité et savoir surtout que les Chinois n’ont aucune envie d’entendre les étrangers critiquer leur pays. Les discours négatifs que tiennent, entre eux, les étrangers sont très mal venus, même en privé. La guerre froide entre communisme et démocrates fait partie du monde bipolaire que nous a légué l’histoire. »
Tout le long de ce livre savant, le lecteur découvre la passion de l’auteur pour le taoïsme (道教), ce monde d’une incroyable richesse spirituelle toujours vivante et même, dans certains lieux des immensités chinoises, en état de renaissance. Mais il trouvera aussi dans cet ouvrage une sorte de cri de désespoir, le sien, face à un monde qui s’en va, celui de la culture et du savoir, remplacé par celui du matérialisme et de l’hyperconsommation.

« Directeurs du destin »

Mais qu’est-ce qu’un taoïste ? Ceux qu’on appelle les daoshi (道士), littéralement les « dignitaires du Tao », se définissent comme « les délégués du ciel qui propagent la culture » (datian xuanhua, 大天宣化). Autrement dit, « ils sont le bras armé de la justice divine, les alter ego des dieux et les directeurs du destin. Ils savent, par leurs rituels, modifier la carte du ciel de ceux qui sont menacés par de mauvais présages. »
Les maîtres taoïstes reçoivent au moment de leur ordination un office (zhi) dans l’administration céleste qui leur donne le pouvoir d’influer sur les décisions du Ciel et d’entrer en relation avec les Officiers des Trois mondes (Sanguan, 三官) qui gouvernent le ciel, la terre et le monde aquatique. C’est au nom de cette théorie que les empereurs ont eu recours à leurs services jusqu’à la fin de l’empire.
Pour ces prêtres taoïstes, le monde des morts est comme celui des vivants. Ils sont les représentants des lois cosmiques et, à ce titre, ils peuvent intervenir dans la sphère céleste et sauver les morts des épreuves qu’ils subissent. Les taoïstes interviennent dans le destin de ceux qui habitent dans l’autre monde.
« Les taoïstes ont été les premiers écologistes de l’histoire et demeurent attachés au respect de la nature », écrit Patrice Fava avec raison. J’y ajouterai pour ma part les shintoïstes au Japon qui, eux aussi, ont adopté depuis des siècles ce respect infini de leur environnement naturel. Tout comme ce culte non dit de la place qui devrait être celle de l’être humain sur cette planète aujourd’hui détruite avec férocité par ce libéralisme échevelé construit autour de l’appât du gain.
*Qui conjure le mauvais sort et détourne sur d’autres les influences maléfiques.
Ce monde secret mais éblouissant des taoïstes est fait de rituels étrangers pour les néophytes, mais pas pour Patrice Fava qui en connaît tous les aspects : « Leurs rituels ont à la fois une dimension cosmique et une fonction apotropaïque*. Eux-mêmes se définissent comme les intermédiaires entre les dieux et les hommes et « répandent la culture au nom du Ciel ». La communauté qui les invite, et les paie pour leurs services, compte sur l’efficacité de leurs rituels pour préserver la paix, éviter les catastrophes, assurer de bonnes récoltes, autant de choses qui, pour les Occidentaux, n’ont pas de sens, car depuis bien longtemps déjà, ils ne croient plus ni au destin, ni au surnaturel. Il y a dans cette fête un imaginaire et des références que seules peuvent partager ces communautés villageoises qui vivent principalement de la terre et ont encore les deux pieds dans leur propre culture. »
La Chine et son identité culturelle doivent beaucoup au taoïsme, antérieur au bouddhisme venu d’Inde bien plus tard. « Il était évident que toute la peinture de paysage dans laquelle pendant des siècles s’est exprimée le génie de la Chine était redevable en premier lieu au taoïsme et à sa conception de la nature. Vivre en ermite dans les montagnes a toujours été l’idéal des taoïstes et de tous ceux qui cherchaient à fuir les intrigues de la cour et de ses rivalités », écrit Patrice Fava.
L’ethnologue n’est pas tendre pour ces religieux occidentaux venus en Chine dans l’espoir de convertir les Chinois : « Que les missionnaires s’entêtent à vouloir supprimer les « superstitions » chinoises en les remplaçant par celles du christianisme relève de l’impérialisme culturel qui ne devrait pas avoir cours. La liturgie funèbre des Chinois qui est infiniment plus riche que celle de nos pasteurs et curés devrait, au contraire, être un objet de recherche et un sujet d’admiration. »

« Divers actes d’un opéra »

La vie et la mort, la naissance et le grand départ pour l’autre monde. Les taoïstes proposent leur vision depuis des temps immémoriaux dans la Chine ancienne. Un enterrement dure, en principe, 49 jours. L’ensemble des cérémonies ont pour but de faire du mort un immortel. « Ses rituels s’apparentent aux divers actes d’un opéra dont le dénouement sera la montée au ciel du défunt. »
Patrice Fava explique avoir emprunté le titre de son ouvrage au célèbre alchimiste Ge Hong qui, au IVème siècle, avait peut-être été celui qui parlait le mieux de leur quête de l’immortalité qui a tant préoccupé les taoïstes de son temps et des siècles suivants.
« La religion chinoise, comme l’était celle des Grecs, est une religion votive, explique l’auteur. La formule qui explique le mieux les actes de dévotion et qui est affichée dans tous les temples tient en quatre caractères : « 有求必应 » (you qiu bi ying), « Demandez et vous serez exaucé ». Les maîtres taoïstes en tant que dépositaires des textes sacrés, des formules et des pratiques rituelles qui leur permettent de communiquer avec les dieux, sont aussi, dans le monde des hommes, les directeurs du destin. Or, dans la société chinoise, le concept de destin occupe une place centrale, alors qu’il a disparu depuis plusieurs siècles des mentalités occidentales. »
Patrice Fava rend compte avec tristesse des destructions considérables de temples et monastères dans cette Chine communiste. « Pourquoi fallait-il détruire Pékin, alors qu’on a préservé Florence et Venise, Avignon et Kyoto ? », s’interroge l’auteur qui « assiste, le cœur serré, à la destruction de Pékin ».
« Aucun pays n’aura délibérément et de façon aussi radicale anéanti son patrimoine matériel et immatériel, insiste Patrice Fava. Les temples, qui faisaient partie des Terres de bonheur dans lesquelles la société civile affirmait de façon égalitaire, démocratique et apolitique sa place au sein de l’empire (tianxia, 天下), n’existent plus, désormais, que dans les livres. » Ainsi en va de la destruction, méthodique, du temple des nonnes Guzimiao (姑子庙) à Pékin. « Tous les voisins sont sur le pas de leur porte pour regarder impuissants les travaux de démolition. Que dans un lieu si chargé d’histoire, on détruise un temple qui était là depuis cinq cents ans prouve que la Révolution culturelle n’est pas finie. »
À l’époque de la République (1911-1949), la capitale comptait près de trois mille temples. Il n’en reste que moins d’une dizaine en activité. Dont le célèbre Baiyunguan (白云观寺), le temple des nuages blancs, haut lieu de la religion chinoise qui était autrefois voué à assurer la paix de l’empire et le maintien de son divin représentant, le Fils du Ciel.
« Il n’y a pas un seul endroit à Pékin où la tradition chinoise soit restée aussi vivante. souligne l’auteur. Le Baiyunguan est un conservatoire. Les taoïstes s’y adonnent à la calligraphie et à la peinture, à la musique et à la méditation, aux arts martiaux, à la médecine, aux arts divinatoires, mais aussi et surtout à l’approfondissement de l’histoire et de la culture taoïste. »
Avec la folie des hommes, l’industrialisation, l’idéologie dominante, « d’année en année, le ciment et le carrelage enlaidissent les villes et les campagnes. Mais cette Chine, victime d’une industrialisation sauvage, dilapidée, dont l’arrière-pays se tiers-mondise dramatiquement, est encore un joyeux espace de fête », veut croire Patrice Fava.

Forclusion historique

L’auteur décrit avec passion cette Chine qui résiste aux assauts incessants du « progrès » qu’apporteraient l’idéologie communiste et le consumérisme. « L’État n’a pas réussi à transformer la Chine en phalanstère marxiste. Les paysans qui sont porteurs d’une tradition trop forte n’ont jamais vraiment opéré cette conversion. Ils continuent de se tenir dans la relation Homme-Ciel (« tianren he yi », 天人合一), qui est encore la clé de voûte de l’édifice. »
Non seulement la communication avec le ciel n’a pas été rompue mais « c’est justement l’inverse qui se produit ». « La passion du jeu, la place qu’occupe la nature, « l’immémoriale structuration religieuse du temps », comme le dit Marcel Gauchet, continuent d’éloigner les Chinois de la foi marxiste », affirme Patrice Fava qui vit actuellement à Pékin.
Le processus qui les fera « sortir de la religion » prendra certainement encore du temps. Le disque dur de la société paysanne n’est pas intact, mais l’essentiel des données qu’il contenait a été sauvegardé. L’auteur poursuit en expliquant que l’avenir de la Chine se dessine de façon fort différente dans les villes et les campagnes et que, surtout, les antagonismes idéologiques ne sont pas les mêmes à Pékin et en province. « La fin du communisme en Chine a beaucoup préoccupé les observateurs étrangers après la chute du mur de Berlin, mais ce ne sont, jusqu’à présent, ni les étudiants, ni les ouvriers, ni les nouveaux riches, ni les soi-disant sectes religieuses, qui ont ébranlé l’appareil. Le processus de sortie du communisme n’est pour personne à l’ordre du jour », constate l’auteur.
« L’histoire de ces cinquante dernières années n’a encore été ni écrite, ni vraiment pensée collectivement, ajoute patrice Fava. On est toujours dans la forclusion historique et ses corollaires : la dénégation et l’amnésie. La canonisation de Mao, sous différentes formes : saint patron des chauffeurs de taxi, dieu du Sol dans son pays natal, dignité protectrice associée aux ancêtres et saints locaux, réincarnation du bodhisattva Manjusri ou empereur céleste, fait surtout penser à l’arbre qui cache la forêt ! Le Parti tient le glaive, les paysans le bouclier, mais ces deux armes sont aussi solides l’une que l’autre, ce qui fait qu’aucune ne peut être brisée. »
De fait, dans cette Chine devenue communiste en 1949 et soumise à une dérive idéologique chaque jour plus radicale, « la religion, qui, pour la majorité des observateurs, n’apparaît pas comme une composante majeure de la vie sociale, occupe en fait une place centrale, mais diffuse, explique Patrice Fava. Le centre est partout, la circonférence nulle part. L’État n’a pas cherché à absorber la religion, comme dans les démocraties européennes, mais à la contenir dans des limites si étroites, en attendant de la supprimer complètement. Si aujourd’hui, non seulement elle survit, mais fonctionne, comme grille d’interprétation et comme système de représentation, c’est aussi parce que dans cette société agraire, se perpétuent des modes de production, des formes communautaires, des valeurs, qui sont restées intactes. »
D’où ce constat : « Si le christianisme, comme on l’a souvent expliqué, a tissé la trame du développement économique et social des sociétés capitalistes, les trois grandes doctrines confucianiste, bouddhiste et taoïste ont joué un rôle semblable en Chine, et continuent d’irradier bien des sphères de la société. On ne comprend pas grand-chose à la Chine si on ne connaît pas son histoire, disait calmement Jacques Gernet. Venant de lui, cette petite phrase reste lourde de sens. Dans ce pays, on respire le parfum de l’histoire, comme lorsqu’on traverse un champ de lavande. »

« Les gardes rouges pourraient bien revenir les tourmenter »

L’auteur raconte avec autant de ferveur que de passion ses expériences vécues dans cette Chine profonde bousculée par cette pseudo-modernité de « progrès » qui, portant, ne change guère. Ses pages vous apportent une lecture aussi délicieuse que porteuse d’espoir.
Dans ces campagnes, loin de la fureur des cités géantes, « j’éprouve le même sentiment que Segalen qui a trouvé, en Chine, « l’autre pôle de l’expérience humaine » et dont il a cherché à pénétrer l’impénétrabilité, l’éternelle incompréhensibilité. Quand je regarde ce qui se passe à six heures du soir dans la rue, j’ai l’impression d’être au cinéma. Un petit garçon lit une bande dessinée sur le porte-bagage du vélo de sa maman. Il est fort bien installé dans son fauteuil en bambou avec repose-pieds. Un grand-père avec une jolie barbichette a été chercher sa petite fille à l’école. Sur son tricycle, style pick-up, il y a aussi de la place pour une cage à oiseaux. La petite fille avec ses rubans rouges dans les cheveux est sortie d’un conte de fées. Les oiseaux lui font la fête, comme Blanche-Neige dans la forêt. »
Mais l’idéologie est là et bien là. Car si ces images sont celle d’une Chine éternelle, la réalité est aussi autre. « Paradoxalement, ces mêmes Chinois semblent s’être débarrassés du passé. Dans aucun des appartements, on ne saurait deviner qu’on est en Chine ! Tout est copié de l’Occident. Il faut ouvrir les tiroirs pour découvrir les baguettes et les médicaments chinois. Il n’y a sûrement aucun autre exemple dans le monde de cette forclusion du passé. J’attribue ce phénomène au traumatisme de la Révolution culturelle pendant laquelle tout ce qui appartenait à l’art et à la culture d’autrefois a fini dans les flammes. »
Pour ajouter aussitôt cette phrase lourde de sens et de lucidité : « Les gardes rouges pourraient bien revenir les tourmenter. » Une allusion transparente à la radicalisation du régime depuis l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir, ce dernier s’entourant d’un culte de la personnalité qui ressemble étrangement à celui du dictateur Mao Zedong. Il cite le célèbre poème de Zheng Banqiao, « Nande hutu » (难得糊涂) : « Pas facile d’être stupide ». Dans l’une de ses lettres, le poète dit : « La richesse et l’honorabilité ont le pouvoir d’abêtir les gens, la pauvreté et l’obscurité font mûrir leur intelligence. »
Patrice Fava est un observateur attentionné auquel rien n’échappe, doublé d’un contemplateur qui s’émeut devant le spectacle sans cesse renouvelé de la vie. Il nous témoigne sa jubilation à contempler cette Chine multiple. « Rien ne me prédisposait à passer ma vie en Chine. […] Où que je sois, j’ai envie de voler des images des gens qui passent. N’est-ce pas une forme de bonheur que d’être absorbé par tout ce qui vous entoure ? »
Plus loin, il cite son ami disparu Simon Leys, de son vrai nom Pierre Ryckmans, qui, dans son essai sur L’attitude des Chinois à l’égard de leur passé, oppose l’extraordinaire continuité des valeurs spirituelles de la civilisation chinoise associée à l’indifférence des Chinois pour leur culture matérielle. Pour le sinologue, ce phénomène de préservation, d’un côté de l’esprit des choses et de l’autre la destruction, s’observe tout au long de l’histoire de la Chine.
« La civilisation chinoise n’a pas logé son histoire dans ses bâtiments », écrit Simon Leys. Ce qui fait dire à Patrice Fava : « Il a sans doute raison mais cela ne pourra jamais servir d’excuse à la destruction de Pékin qui fut l’ancienne capitale des envahisseurs mongols, puis des empereurs Ming et Qing. Ce devrait être l’une des plus belles villes du monde ». Or dans cette Chine communiste et mercantile, « l’ampleur du truandage, de la corruption, du crime, des trafics de toutes sortes mériterait une nouvelle étude. Les techniques s’affinent, les escrocs se multiplient, la société est de toutes parts gangrenée par l’argent. Les enlèvement d’enfants se chiffrent probablement par milliers. »
« La fonction impériale, poursuit l’auteur, au terme d’une confrontation douloureuse avec l’Occident et le monde chrétien, s’est peu à peu désacralisée, mais la Chine, comme bien des sociétés traditionnelles, a longtemps partagé l’idéal déclaré de vivre dans sa relation immémoriale avec le Ciel, les ancêtres et les dieux. Aujourd’hui, les autorités rejettent la plus grande partie de leur héritage religieux, mais la Chine n’est pas pour autant sortie de la religion. »
Et de conclure ainsi : « Tel est le paradoxe de la situation actuelle. Le Japon est shinto, l’Occident chrétien, le monde arabe musulman, l’Asie bouddhiste, mais la Chine d’aujourd’hui n’a pas de religion officielle ! Cela n’empêche pas les temples de se reconstruire à travers tout le pays, les fêtes et les pèlerinages de se multiplier ». Si, comme le disait Jacques Gernet la morale chinoise est de tonalité stoïcienne et enseigne qu’il faut accepter tranquillement le destin et se contenter de son lot, « cela n’aura pas empêché qu’a plusieurs reprises une étincelle ait mis le feu à la plaine et qu’un jour il ne sera probablement plus possible de l’éteindre ».
Par Pierre-Antoine Donnet

À lire

Patrice Fava, Un taoïste n’a pas d’ombre, mémoires d’un ethnologue en Chine, Buchet-Chastel, 2023, 493 pages, 26 euros.

Soutenez-nous !

Asialyst est conçu par une équipe composée à 100 % de bénévoles et grâce à un réseau de contributeurs en Asie ou ailleurs, journalistes, experts, universitaires, consultants ou anciens diplomates... Notre seul but : partager la connaissance de l'Asie au plus large public.

Faire un don
A propos de l'auteur
Ancien journaliste à l'AFP, Pierre-Antoine Donnet est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages consacrés à la Chine, au Japon, au Tibet, à l'Inde et aux grands défis asiatiques. En 2020, cet ancien correspondant à Pékin a publié "Le leadership mondial en question, L'affrontement entre la Chine et les États-Unis" aux Éditions de l'Aube. Il est aussi l'auteur de "Tibet mort ou vif", paru chez Gallimard en 1990 et réédité en 2019 dans une version mise à jour et augmentée. Après "Chine, le grand prédateur", paru en 2021 aux Éditions de l'Aube, il a dirigé fin 2022 l'ouvrage collectif "Le Dossier chinois" (Cherche Midi). Début 2023, il signe "Confucius aujourd'hui, un héritage universaliste", publié aux éditions de l'Aube. Son dernier livre, "Chine, l'empire des illusions", est paru en janvier 2024 (Saint-Simon).