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Puissance militaire : entre la Chine et les États-Unis, qui a l'avantage ?

Levée de drapeau devant le porte-avions chinois Shandong, le 17 décembre 2019. (Source : USNI)
Levée de drapeau devant le porte-avions chinois Shandong, le 17 décembre 2019. (Source : USNI)
La Chine a investi d’énormes sommes d’argent ces dernières années pour la modernisation de ses forces armées. L’ambition de Pékin : conquérir la domination militaire mondiale. L’armée chinoise a, de ce fait, réalisé d’impressionnants progrès. Mais sans doute pas au point de rivaliser encore avec la puissance militaire des États-Unis. Ni aujourd’hui ni peut-être avant très longtemps.
Revue de détail. Les efforts militaires chinois sont tels qu’un général américain a qualifié la Chine de « principale menace pour les prochaines décennies » pour les États-Unis. Lors d’une audition en 2017 devant le Congrès en vue de sa nomination au poste de chef d’état-major interarmées, le général Joseph Dunford avait affirmé que les « menaces les plus importantes » à ses yeux restaient « celles qui n’étaient pas encore apparues ».
Lors d’un nouveau passage devant le comité des Forces armées du Sénat, le 26 septembre 2017, il en a identifié une : la Chine, alors que beaucoup aurait misé sur la Corée du Nord, voire la Russie et l’Iran. « Si je regarde jusqu’en 2025 et que je considère la démographie et la situation économique, je pense que la Chine représente probablement la plus grande menace » pour les États-Unis, avait alors déclaré le général Dunford.
« La Chine a mis l’accent sur la limitation de notre capacité à projeter notre puissance et vise à affaiblir nos alliances dans le Pacifique », avait-il expliqué. En outre, « les Chinois semblent engagés à augmenter les dépenses militaires » afin de doter leurs forces armées de « capacités susceptibles de dégrader les principaux avantages technologiques américains ».
Alors qu’en est-il ?

Infanterie chinoise nombreuse mais mal équipée et mal entraînée

Les dépenses militaires américaines se sont élevées à 778 milliards de dollars l’an dernier, de très loin le premier budget militaire de la planète. Mais Washington ne doit pas perdre de temps car le budget militaire chinois a grimpé de 6,8 % cette année après des hausses continues depuis deux décennies.
La Chine détient le record mondial du nombre de soldats d’active : deux millions en 2019. Le Pentagone a, lui, soumis au vote du Congrès un budget pour l’an prochain qui prévoit 1,35 million de soldats d’active.
Pourtant ce qui compte n’est pas le nombre soldats mais plutôt combien d’entre eux sont engagés dans les techniques les plus sophistiquées de la guerre. Or il se trouve que les soldats de l’Armée populaire de libération chinoise sont soit équipés de matériels obsolètes, soit ne sont pas mesure de combattre efficacement du fait d’un entraînement inadéquat. Cependant, Pékin n’est pas resté les bras ballants. Le gouvernement chinois a débloqué des fonds pour la mise au point et la fabrication d’armes automatiques pour l’infanterie.
Face à l’infanterie chinoise, 6 333 chars américains, le plus grand dispositif de blindés du monde derrière la Russie, selon le magazine américain Forbes.. La Chine dispose, quant à elle, de 5 800 chars.

Domination américaine écrasante dans les airs

S’agissant des forces aériennes, la domination américaine face à la Chine est écrasante. Les États-Unis disposent en-effet de 13 000 avions de combat, dont des F-35 Lightning et des Raptor F-22 qui font partie des avions de combat les plus redoutables de la planète, selon un rapport du World Air Forces 2021 publié par la revue Flight Global.
Face à cet arsenal aérien américain la Chine aligne un peu plus de 2 500 avions, dont environ 2 000 sont des avions de combat, selon le rapport 2020 de China Military Power. Le chasseur chinois le plus sophistiqué est le J-20, aussi connu sous le nom de Mighty Dragon. Il a été conçu pour se mesurer au F-22 américain. Mais sa capacité à se mesurer à cet avion reste à prouver puisqu’aucun combat n’a eu lieu jusqu’à ce jour.
Les deux pays travaillent également à produire de nouveaux bombardiers. La Chine a déjà dans sa gibecière le Xian H-20. Les États-Unis, eux, ont développé le B-21 Raider Stealth Bomber de nouvelle génération.

Porte-avions chinois obsolètes et arsenal nucléaire incomparable

Reste enfin la flotte. Un terrain crucial où la Chine possède le plus grand nombre de navires : 360 bâtiments contre 297 pour les États-Unis. Mais là aussi, outre le fait que le nombre ne fait pas la qualité, les Américains possèdent un avantage sur les Chinois avec un total de 11 porte-avions à propulsion nucléaire, tous capables d’accueillir plus de 60 avions de combat qui décollent grâce à des catapultes ultra perfectionnées. Quant à la Chine, elle ne possède que deux porte-avions à propulsion classique aisément repérables. Il s’agit du Liaoning et du Shandong, dont la technologie obsolète date des années 1980 et qui ne peuvent accueillir que 24 à 36 chasseurs J-15.
Il nous faut mentionner ici l’arsenal nucléaire dont disposent les États-Unis et la Chine. Là encore, rien de comparable puisque les États-Unis disposeraient de 5 800 têtes nucléaires, dont 1 400 en alerte permanente et prêtes à être lancées à tout instant, à comparer avec 250 à 350 têtes côté chinois.

Les trois déficiences de l’armée chinoise

Ajoutons encore que l’industrie chinoise de l’armement a rencontré ces dernières années des difficultés dans la production de nouvelles armes. Une étude du think tank américain Rand Corporation énumère trois domaines où l’Armée populaire de libération rencontre des déficiences : les semi-conducteurs de dernière génération, les sous-marins furtifs et les moteurs d’avions de chasse.
C’est ainsi que les systèmes d’armement chinois stagnent « plusieurs années derrière » ceux des États-Unis. Il en va ainsi des chasseurs J-20 et J-31 comparés aux Lockheed Martin F-22 et F-35, les premiers largement distancés par les avions américains.
Mais gardons en mémoire les récents propos du président chinois Xi Jinping. Le 1er juillet dernier, prenant la parole sur la place Tiananmen au cœur de Pékin à l’occasion du 100ème anniversaire du Parti communiste chinois, il a promis à tous ceux qui oseraient intimider la Chine de « se fracasser la tête et répandre le sang ». À méditer.
Par Pierre-Antoine Donnet

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A propos de l'auteur
Ancien journaliste à l'AFP, Pierre-Antoine Donnet est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages consacrés à la Chine, au Japon, au Tibet, à l'Inde et aux grands défis asiatiques. En 2020, cet ancien correspondant à Pékin a publié "Le leadership mondial en question, L'affrontement entre la Chine et les États-Unis" aux Éditions de l'Aube. Il est aussi l'auteur de "Tibet mort ou vif", paru chez Gallimard en 1990 et réédité en 2019 dans une version mise à jour et augmentée. Après "Chine, le grand prédateur", paru en 2021 aux Éditions de l'Aube, il a dirigé fin 2022 l'ouvrage collectif "Le Dossier chinois" (Cherche Midi). Début 2023, il signe "Confucius aujourd'hui, un héritage universaliste", publié aux éditions de l'Aube. Son dernier livre, "Chine, l'empire des illusions", est paru en janvier 2024 (Saint-Simon).