Politique

Photoreportage : Taïwan se mobilise pour la démocratie en Birmanie

Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Taïwanais et Birmans de Taïwan ensemble sur la place de la liberté à Taipei dimanche 28 mars. Un rassemblement au lendemain de la mort d’au moins 90 manifestants pro-démocratie, tués en Birmanie par la junte qui a repris le pouvoir le 1er février. C’est le second rassemblement en soutien à la démocratie birmane à Taïwan et contre la répression sanglante des manifestants anti-putsch. Le 21 mars, environ 400 manifestants s’étaient retrouvés. Cette fois, ils étaient de 1 000 à 3 000, selon les organisateurs.
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Près de 40 000 Birmans vivent dans l’archipel de Taïwan, de facto indépendant. Le cœur d’une des plus grandes communautés de migrants se rassemble autour de Huaxin Street, dans le quartier de Zhonghe à New Taipei City. L’histoire de la communauté birmane remonte à la guerre civile chinoise. La plupart sont des sino-birmans qui ont fui la Birmanie vers 1954, en même temps que les quelque 7 000 soldats du Kuomintang rapatriés à Taïwan à cette époque. D’autres sont venus plus tard, fuyant la répression et le sentiment anti-chinois.

Contexte

La Birmanie connaît son plus grand soulèvement depuis 1988. Des centaines de milliers de personnes engorgent les rues des grandes villes du pays pour protester contre un coup d’État militaire commis par la junte birmane le 1er février dernier. Aung San Suu Kyi, Première ministre de facto depuis 2015, ainsi que plusieurs hommes politiques ont été arrêtés par la junte qui a repris le contrôle total du gouvernement. Les militaires ont instauré l’État d’urgence pour une durée d’un an, dénonçant des « fraudes massives » aux élections de novembre dernier, où la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND), le Parti d’Aung San Suu Kyi, a remporté plus de 80 % des voix.

Depuis que le pays a pris son indépendance des autorités britanniques en 1948, la Birmanie a connu principalement un régime militaire. Les manifestations de 1988 ont vu émergé la personne d’Aung San Suu Kyi comme une icône de la lutte pour la démocratie, ce qui lui a valu le prix Nobel de la paix en 1990. En 2015, celle qu’on surnomme « The Lady » et la LND ont remporté les premières élections libres du pays.

Officiellement, Taïwan n’entretient pas de relations diplomatiques avec la Birmanie. Mais comme avec la plupart des pays du globe, l’archipel maintient un bureau de représentation dans la plus grande ville du pays, Rangoun.

Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
La manifestation du dimanche 28 mars était organisée par l’University-Youth Prayer Committee, un groupe d’étudiants birmans et taïwanais, créé en réaction au coup d’État militaire militaire en Birmanie.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Zhang Zheng-li est birmane et vit à Taïwan depuis plus de vingt ans : « Je viens exprimer mon soutien, la réaction du gouvernement birman est excessive. Ce qu’il fait au peuple birman, je ne peux pas l’accepter. »
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
« Nous devons montrer que l’on se tient aux côtés du peuples birman », insiste Dora. Birmane et étudiante en économie à l’Université de Nantou, à Taïwan, elle est l’une des organisatrices du rassemblement. Elle souligne l’importance de contribuer financièrement à la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND), le parti d’Aung San Suu Kyi : « Taïwan et la Birmanie sont similaires à certains niveaux : nos deux pays sont menacés par la Chine. »
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)

« Taïwan peut être un exemple pour la Birmanie »

Cindy est taïwanaise et étudie au département Asie du Sud-Est de l’Université de Nantou. « Taïwan peut être un exemple pour la Birmanie. Nous avons surmonté la loi martiale et sommes devenus une démocratie. Par des manifestations à travers le monde, nous pouvons faire monter une prise de conscience internationale. »
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Le salut aux trois doigts levés, signe de la rébellion dans le film Hunger Games, a été popularisé en 2014 lors du mouvement de contestation contre le coup d’État en Thaïlande et est devenu un symbole d’aspiration à la démocratie. Adopté lors des manifestations anti-putsch dans de nombreuses villes de Birmanie depuis le 1er février, le geste est repris à Taipei en signe de solidarité.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Des moines bouddhistes se sont invités à l’événement et ont récité des prières en soutien aux manifestants pour la démocratie. En Birmanie, de nombreux moines soutiennent la Tatmadaw, la junte militaire. Ils défendent une vision ethno-centrée et radicale.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Depuis le 1er février dernier, près de 30 enfants ont été tués dans les affrontements entre la junte et les manifestants.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Une manifestante réclamant la libération de la prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Les organisateurs rejouent le coup d’État militaire et les scènes de violences commises en Birmanie ces deux derniers mois.
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Rassemblement en soutien aux manifestants birmans pro-démocratie et contre le coup d'État militaire du 1er février 2021, à Taipei le 28 mars 2021. (Copyright : Naomi Goddard)
Les nombreux intervenants ont dénoncé et décrit les violences commises par la junte. Le rassemblement s’est achevé dans une atmosphère émouvante pour beaucoup de participants.
Par Alice Hérait (texte) et Naomi Goddard (photos), à Taipei

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A propos de l'auteur
Journaliste, Alice Hérait est spécialisée sur les questions contemporaine en Asie-Pacifique, et plus particulièrement sur le monde sinisé. Elle est titulaire du Master Hautes Etudes Internationales (HEI) à l'Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO). Sinophone, elle a vécu un an à Taïwan, où elle a étudié à l'Université Nationale de Taiwan (國立台灣大學). Elle nourrit un vif intérêt pour les relations entre Pékin et Taipei.
Naomi Goddard est une photographe portraitiste et documentaire britannique basée à Taipei. Elle est co-fondatrice de Minim Photo Studio et a produit pour des clients tels que The Guardian, Foreign Policy, CNN ou Culture Trip. Son travail reflète sa curiosité pour l'homme et son mode de vie. Ses projets évoquent les relations humaines et la formation de l'identité en fonction de la culture et du lieu de vie. Consulter son site.