Politique
Reportage

Coronavirus : des centaines de citoyens mongols toujours bloqués en Europe

Les étudiants mongols, bloqués à Prague en raison des mesures prises par la Mongolie pour empêcher toute contamination au Covid-19 dans le pays, réclament le droit de rentrer chez eux. (Crédit : Kafkadesk)
Les étudiants mongols, bloqués à Prague en raison des mesures prises par la Mongolie pour empêcher toute contamination au Covid-19 dans le pays, réclament le droit de rentrer chez eux. (Crédit : Kafkadesk)
Plus de 2 500 ressortissants mongols sont bloqués dans de nombreux pays européens, dont la France, depuis que le gouvernement de la Mongolie a fermé les frontières à ses propres citoyens, au mois de mars dernier, pour éviter toute contamination au coronavirus.

« Nous sommes désespérés. Nous n’avons pas de visas, pas d’argent, pas d’emploi, pas d’assurance médicale et aucun soutien de la part notre gouvernement », déplore Oyunaa, fondatrice du groupe Facebook « Les Mongols bloqués en Europe » (Европид гацсан Монголчууд), qui elle-même est coincée en Hongrie depuis plus de cinq mois. « Pour autant que je sache, nous sommes 241 en Hongrie, 260 en République tchèque, 160 en Lettonie et en Pologne, 264 en Allemagne, 60 en France, 370 en Grande-Bretagne, 130 en Suède et 80 en Autriche et en Irlande, » énumère-t-elle. Beaucoup d’entre eux sont des touristes, étaient en voyage d’affaires ou rendaient visite à des amis et à de la famille.

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« Nous avons adressé de nombreuses demandes à notre ambassade et aux organisations gouvernementales pour qu’ils envoient plus de vols vers l’Europe pour nous rapatrier, mais sans succès », ajoute Oyunaa, expliquant que la capacité limitée du gouvernement permet aujourd’hui d’organiser seulement deux vols par mois. De plus, précise-t-elle, malgré le fait que les compagnies aériennes hongroise Wizz Air et polonaise LOT aient accepté de rapatrier les Mongols bloqués chez eux avec leurs propres appareils, le gouvernement mongol ne leur permet toujours pas de revenir. « Nous ne comprenons pas pourquoi ils ne peuvent pas tout simplement accepter ces offres puisqu’ils nous disent que Mongolian Airlines n’a pas la capacité de transporter tous les citoyens », lance-t-elle.
Eparpillés à travers l’Europe, ces ressortissants mongols multiplient les campagnes de protestation et essaient de faire entendre leur voix pour obtenir plus de vols. Ils supplient le gouvernement mongol d’autoriser les vols de rapatriement étrangers à atterrir dans le pays.

« Nous sommes désespérés, explique Oyunaa. Nous ne savons pas comment convaincre le gouvernement mongol de nous laisser rentrer chez nous. Nous sommes tellement désespérés et nous n’avons personne vers qui nous tourner, à part la presse. »

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Nous avons parlé à des représentants des nombreux étudiants mongols qui étaient venus étudier en Hongrie, financés par la bourse Stipendium Hungaricum, qui se retrouvent ajourd’hui coincés dans le pays. « Notre bourse et notre assurance médicale ont expiré en juin. Nous n’avons plus aucun soutien financier, aucune assurance médicale et aucune possibilité de trouver un emploi ici en Hongrie. Nous voulons rentrer en Mongolie avec notre diplôme. Il est du devoir du gouvernement de nous rapatrier chez nous », disent-ils, affirmant que jusqu’à présent, seuls quatre étudiants ont eu la chance de pouvoir rentrer.
Ceux qui débarquent en Mongolie, expliquent-ils, doivent rester en quarantaine pendant 21 jours dans des hôtels et centres dédiés, auxquels s’ajoutent 14 jours de plus en quarantaine à domicile. Le coût du rapatriement et de la quarantaine représenteraient l’équivalent de 1 500 euros. « C’est très cher pour nous qui sommes bloqués dans les pays européens depuis 5 mois sans aucun revenu », dénoncent les représentants des étudiants mongols.

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En République tchèque, précise Dash, l’une de ces étudiants, environ 260 personnes se sont inscrites à l’ambassade de Mongolie à Prague pour retourner au pays. « Je suis venue en République tchèque début mars pour le travail. J’étais censée y rester une seule semaine, dit-elle. J’ai laissé mes deux fils seuls à la maison et je m’inquiète vraiment pour eux. Nous avons envoyé de nombreuses demandes, y compris au ministère des Affaires étrangères et à l’ambassade de Mongolie à Prague. Mais toujours rien… »
Le Premier ministre mongol Ukhnaagiin Khürelsükh avait annoncé le mois dernier que le pays maintiendrait des mesures strictes contre le coronavirus jusqu’à ce qu’un vaccin soit trouvé. Ce qui pourrait vouloir dire que le pays risque de rester fermé pendant encore longtemps, y compris à ces propres ressortissants. La Mongolie ne dénombre officiellement à ce jour aucun décès lié au coronavirus. Enclavé entre la Russie et la Chine, le pays était l’un des premiers pays à fermer ses frontières face à la pandémie de Covid-19.
Cet article a été initialement publié en anglais sur le site Kafkadesk.

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A propos de l'auteur
Franco-britannique né à Paris en 1989, Tom Eisenchteter est diplômé en Sciences Politiques de l’Université de Nottingham. Après avoir travaillé à Johannesburg à la Chambre de Commerce franco-sud-africaine, il rejoint l’ONU à Bangkok où il vit pendant trois ans. Spécialisé en politique thaïlandaise et en géopolitique régionale, il rejoint le bureau régional de la Fédération Internationale de la Croix Rouge à Kuala Lumpur d’où il couvre notamment le typhon Haiyan aux Philippines et le tremblement de terre au Népal. Aujourd’hui de retour en France, il travaille dans la promotion des relations franco-asiatiques à Paris.