Thaïlande : l'économie en deuil
Une consommation en berne
Prise en tenaille
Malheureusement, depuis quinze ans, ces points forts n’ont pas changé. On recense peu de nouveaux venus parmi les vingt premiers postes des exportations – sur les 1 500 de la nomenclature à quatre chiffres – qui représentent 45 % du total. Une stabilité préoccupante dans une région où lorsque l’on ne court pas, on régresse. La Thaïlande est confrontée à l’apparition de nouveaux exportateurs (Vietnam, Cambodge, Birmanie) qui ont des coûts plus bas, et elle subit les conséquences de la montée en gamme de l’industrie chinoise qui érode ses positions dans la chaîne globale de valeur. Ainsi entre 2000 et 2015, ses exportations de disques durs vers la Chine ont été divisées par trois car cette dernière intègre ces fabrications.
Paradoxalement, alors que l’agriculture emploie 40 % de la population au travail, la Thaïlande est confrontée à des pénuries de main-d’œuvre non qualifiée. L’industrie légère et également l’agriculture attirent des travailleurs immigrés venus du Cambodge, de Birmanie ou du Laos. Par ailleurs, faute d’une bonne adéquation entre l’offre du système scolaire et la demande de main-d’œuvre des entreprises, un tiers des diplômés de l’université fait un « petit boulot » dans le secteur informel. Du fait des tensions sur le marché du travail, le salaire d’un ouvrier qualifié, est plus élevé à Bangkok qu’à Shanghai, selon les statistiques de l’Union des Banques Suisses.
La réponse à ce défi passe par plus d’investissement, une réforme de l’enseignement et des efforts de R&D dans un pays qui n’en fait aucun. Le préalable à ces « y a qu’à » est la levée des incertitudes politiques. Entre-temps, la Thaïlande continuera de capitaliser sur ses points forts dans les services dont le tourisme. Ce dernier profite non seulement du gisement chinois, mais aussi d’un secteur de santé performant qui attire des patients étrangers — 3 millions en 2015 – et qui rassure les seniors, notamment les Japonais, qui choisissent de s’installer en Thaïlande pour leur retraite. Sur ce dernier point, le savoir-faire thaïlandais va se renforcer ; en effet, avec le Vietnam et la Corée, la Thaïlande est l’un des pays qui vieillit le plus vite, car aujourd’hui sept millions de Thaïlandais ont plus de 65 ans (un sur dix). Dans vingt ans, ils seront 16 million (un sur quatre). Soit le même rapport que dans la France de 2035 !
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