L'Asie dans le débat Trump/Clinton, Duterte en Chine et guerre de l'eau indienne
Asie du Nord-Est
C’est Donald Trump qui a, pour l’essentiel, soulevé le cas chinois – accusant entre autres Pékin d’être responsable des « maux économiques » américains et d’avoir son rôle à jouer dans le règlement de la crise nucléaire nord-coréenne. Hillary Clinton s’est limitée a citer trois fois la Chine, notamment en matière de cyberespionnage – sans la cibler directement. Pour autant, toutes les références au pays n’ont pas été négatives : le candidat républicain s’est par exemple appliqué à souligner la qualité des aéroports chinois. Une lubie que n’ont pas manqué de relever les internautes, plus ou moins satisfaits.
Pour autant, Donald Trump n’a toujours pas précisément formulé de politique chinoise, estime le directeur du Carnegie-Tsinghua Centre à Pékin, Paul Haenle. « Il prend la Chine pour exemple afin de montrer son attachement à la défense des intérêts américains dans le monde. » Concernant Hillary Clinton, un expert de l’Institut des études américaines de l’Académie chinoise des sciences sociales, Yuan Zheng, estime que la retenue actuelle de la candidate démocrate pourrait bien ne pas perdurer tout au long de la campagne. Cela dépendra de l’opinion publique américaine.
Quelle que soit l’issue de l’élection, la Chine aura fort à faire avec le nouveau président des Etats-Unis. « Trump sera très dur avec Pékin en matière de politique commerciale tandis que Clinton renforcera la coopération avec ses alliés asiatiques, tels que le Japon et les Philippines, afin de contrer l’influence géopolitique chinoise dans la région », commente Zhang Yuquan, expert en relations internationales à l’Université Sun Yat-Sen de Guangzhou.
Le quotidien japonais Mainichi a ainsi tenu à répondre aux invectives de Trump. En vertu de l’accord nippo-américain sur le statut des forces armées de 1960 (Japan-U.S. Status of Forces Agreement), Tokyo se doit de financer « l’accueil des troupes américaines ». Il prend également en charge, depuis 1987, l’intégralité des frais de main-d’oeuvre des employés civils de ces installations – normalement imputés aux Etats-Unis. Au total, le Japon paye donc 70 % des coûts liés à l’accueil des bases américaines sur son sol – contre 30 à 40 % pour les autres nations telles que la Corée du Sud et l’Allemagne.
La semaine dernière, les autorités chinoises avaient promis qu’elles enquêtaient sur l’entreprise ; la police et le ministère des Affaires étrangères la soupçonnant même de « graves crimes économiques » (voir notre revue de presse du 20 septembre). Une annonce « inhabituellement explicite de la part de Pékin », commente le South China Morning Post. Car malgré le renforcement des contrôles aux frontières imposé depuis mars – à la suite des nouvelles sanctions onusiennes contre Pyongyang – la Chine est toujours soupçonnée d’entretenir une politique « accomodante », voire laxiste, avec son voisin, notamment en matière « d’activités commerciales illicites ».
Asie du Sud-Est
Objectif de Rodrigo Duterte : se détourner ainsi des Etats-Unis en faveur de la Chine et de la Russie. Selon lui, ses relations avec Washington sont en effet arrivées à « un point de non retour », rapporte le Straits Times. Il tentera donc d’initier des accords commerciaux avec Pékin et Moscou, même si le peso philippin est au plus bas depuis sept ans. Lundi dernier, Duterte aurait par ailleurs dit au Premier ministre russe Dimitri Medvedev qu’il était sur le point « de fanchir le Rubicon, c’est-à-dire, atteindre un point de non retour, avec les Etats-Unis ».
Les relations entre Washington et Manille se sont fortement déteriorées depuis l’arrivée au pouvoir de Rodrigo Duterte au mois de juin. Ce dernier est fortement critiqué pour sa « guerre anti-drogue » qui a provoqué la mort d’au moins 3 000 personnes depuis cette date. A l’approche du sommet de l’ASEAN au Laos début septembre, le président philippin avait par ailleurs traité son homologue américain de « fils de pute », ce qui avait provoqué l’annulation de leur rencontre. La semaine dernière, les Etats-Unis et l’Union européenne déclaré ensemble leurs inquiétudes face à la situation aux Philippines. Une critique qui a de nouveau valu la colère de Duterte.
Le ministre philippin des Affaires étrangères, Perfecto Yasay a cependant rapidement nuancé les propos de son président qui a, selon lui, simplement voulu « dramatiser son ressenti » rapporte le Philippine Star .
« Après avoir effectué un bilan de santé avec un médecin, nous avons pu déterminer que ces maux étaient dû au voyage épuisant qu’elle vient d’effectuer. Elle avait mal au ventre de ne pas avoir pu manger normalement et mal à la tête à force d’utiliser l’ordinateur », précise un communiqué. Aung San Suu Kyi avait débuté son voyage à Londres le 10 septembre dernier avant de se rendre à Washington où elle avait notamment rencontré Barack Obama puis à New York assister à l’Assemblée générale de l’ONU.
Pour l’ancien président Thein Sein, cet épisode révèle un problème d’organisation de la part du gouvernement. Ce dernier serait trop centré sur Aung San Suu Kyi et devrait penser à répartir les fonctions de la Premier ministre de facto entre plusieurs personnes.
Ce territoire est source de conflits entre Djakarta et Pékin, les Chinois considérant que ces îles sont situées dans l’une de leurs zones de pêche traditionnelles. Une affirmation que l’Indonésie réfute. Mi-juin, les tensions entre les deux pays s’étaient renforcées. L’Indonésie, qui a accéléré sa répression de la pêche illégale ces derniers mois, avait ouvert le feu sur un chalutier chinois et blessé un pêcheur qui naviguait dans cette zone (voir notre revue de presse du 20 juin).
Pourtant, les revendications territoriales de la Chine ne comprennent pas les îles Natuna, situées à 2 000 km de ses côtes. Mais la « ligne à neuf traits », revendiquée par Pékin pour délimiter sa souveraineté maritime sur près de 90% de la mer de Chine du Sud, empiète sur la zone économique exclusive de l’Indonésie, dont les limites ont été fixées en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, et qui donne la possession de cette zone à Djakarta.
Asie du Sud
Hier, lundi 26 septembre, le Premier ministre indien Narendra Modi a organisé une rencontre avec les membres des ministères des Ressources en Eau et des Affaires étrangères afin d’étudier ses possibilités d’action sur le traité de l’Indus, rappelle The Hindu. Si aucune décision visant à abroger le traité n’a été signée, l’Inde a décidé de suspendre les discussions bilatérales avec le Pakistan via la Commission permanente sur le partage de l’Indus, qui officie depuis la signature du traité, quant à la gestion des ressources du fleuve. Modi a cependant affirmé accroître son utilisation des fleuves dans l’Etat du Jammu-et-Cachemire. Le Premier ministre indien fait donc fi des dernières contestations du Pakistan face à la construction d’un important projet hydraulique dans le Cachemire indien. Islamabad avait appelé à soumettre l’affaire à la Cour permanente d’arbitrage de la Haye. En 2013, la Cour avait donné raison à l’Inde. Une décision qu’a refusé le Pakistan, demandant à ce que le dossier soit réetudié.
Quoi qu’il en soit, l’Inde ne pourrait pas rompre unilatéralement le traité de l’Indus, rappelle Dawn, dans un entretien avec un avocat de la Cour suprême. Ce dernier rappelle que les deux Etats doivent s’accorder pour appeler à la suspension du traité. Malgré tout, si l’Inde venait à ne plus en respecter les modalités, Islamabad n’aurait aucune marge de manoeuvre pour obliger New Delhi à limiter ses actions. En revanche, traité ou non, aucun Etat en amont n’a le droit de couper l’accès à l’eau au pays en aval et l’Inde se retrouverait dès lors sous le joug de la loi internationale, commente le quotidien pakistanais.
Lors du sommet de l’ONU à New York, la chef de la diplomatie indienne a réitéré son souhait « d’isoler le Pakistan », rapporte le Firstpost dans un second article. Elle l’accuse de nouveau de favoriser le terrorisme et appelle de fait la communauté internationale à rompre les relations avec Islamabad.
Côté pakistanais en revanche, on se félicite des progrès que ces exercices militaires conjoints permettront de faire en matière de contre-insurrection : Islamabad dispensera ses techniques tandis que Moscou opèrera des démonstrations avec son matériel. D’après le quotidien pakistanais, c’est la dégradation de ses relations avec les Etats-Unis qui a poussé la Russie à se rapprocher du Pakistan et de la Chine, contribuant à une recomposition de l’équilibre des puissances en Asie. « Il n’y a ni alliés ni ennemis permanents en relations internationales », conclut un général de brigade pakistanais à la retraite.
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