Revue de presse économique – 20 novembre 2015

L'Eco de la presse asiatique

Avec une baisse de 0,8 % de son PIB, le Japon est en récession. Copie écran du site ENCA.
Le Japon en récession. Les deux termes ont longtemps semblé aussi antinomiques qu’une pizza aux sushis, qu’un yaourt au wasabi ou que des « abenomics » sauce déflation. Il faudra pourtant s’y habituer. C’est la deuxième fois que le produit intérieur brut de l’Archipel se contracte depuis l’arrivée au pouvoir de Shinzo Abe en 2012. Les fameux plans de relances portant le nom du Premier ministre, et perçus comme LA potion magique au redressement économique, n’ont donc pas suffi à insuffler l’envie d’investir aux entreprises. La troisième économie du monde est en crise en raison de problèmes internes, et pas seulement à cause d’importations chinoises en diminution. La croissance devrait toutefois repartir au cours du trimestre assurent les autorités nippones. Même chose en Chine où Xi Jinping s’est voulu rassurant devant le Forum de coopération économique Asie-Pacifique (APEC). Malgré une économie au ralenti, affirme le président chinois, la Chine contribue à 30 % de la croissance mondiale.

Récession au Japon, 'croissance moyenne' en Chine et recul de l'inflation en Inde

Japon : Nouveau recul du PIB au troisième trimestre

The Japan Times (Japon) – 16.11.2015 – Si les entreprises japonaises ont rarement gagné autant d’argent, elles ont dans le même temps rarement aussi peu investi. Ce paradoxe, l’agence Bloomberg et The Japan Times l’expliquent par le ralentissement de l’économie chinoise et le manque de perspectives mondiales. Résultat : selon les chiffres publiés lundi par le gouvernement nippon, le recul enregistré au troisième trimestre est plus prononcé qu’attendu. Le PIB japonais s’est en effet contracté de 0,8 % en rythme annualisé au troisième trimestre. Après les 0,7 % du deuxième trimestre, on peut parler de récession. C’est clairement un échec pour le chef du gouvernement, estime le Wall Street Journal.
Ces données devraient mettre la pression à la fois sur Shinzo Abe et sur le gouverneur de la Banque du Japon afin d’établir de nouvelles mesures de relance budgétaire et monétaire. Jusqu’à présent, le Premier ministre a plaidé pour des politiques de relance qui ont affaibli le yen et stimulé les bénéfices des sociétés. Mais ces dernières n’ont semble-t-il pas suffisamment confiance en l’avenir pour investir. « La plupart des analystes s’attendent à une croissance modeste pour le trimestre en cours, pointe The Japan Times, les entreprises hésitant toujours à puiser dans des bénéfices records pour augmenter les salaires. »

Xi Jinping : « La Chine contribue à 30 % de la croissance mondiale »

Global Times (Chine) – 16.11.2015 – Le président chinois parle d’une « croissance moyenne », mais le chiffre ferait rêver bon nombre de gouvernement dans le monde. L’économie chinoise devrait en effet continuer à croître d’environ 7 % cette année, selon des propos de Xi Jinping tenus en arrivant au sommet du G 20 à Antalya au sud-ouest de la Turquie. Malgré le ralentissement économique, la Chine contribue encore pour 30 % à la croissance mondiale, et cela signifie que le pays reste une puissance économique mondiale majeure a déclaré le chef de l’Etat chinois. Le 13ème plan quinquennal (2016-2020) qui vient d’être adopté, vise à construire une « société modérément prospère » en doublant le Produit Intérieur Brut du pays d’ici à 2020 et augmentant le revenu des résidents urbains et ruraux, a ajouté Xi Jinping.

Inde : recul de l’inflation malgré une flambée des prix de l’oignon

The Indian Express (Inde) – 16.11.2015 – Le quotidien anglophone indien a choisi une illustration pas forcement des plus simples à comprendre pour éclairer ses lecteurs. On y voit un système d’engrenage : d’un côté, les prix à la consommation ; de l’autre, le pouvoir d’achat des ménages et sur le côté droit, une inflation qui tend à diminuer depuis un an. Malgré la hausse des prix des légumes en raison d’une mauvaise mousson, les prix ont baissé en octobre avec un recul de moins 58,95 % sur le prix des pommes de terres, moins 16,32 % pour l’essence, moins 1,62 % pour les biens manufacturés. Dans l’alimentaire en revanche, les prix des fruits et légumes ont augmenté de 2,56 %, le lait de 1,75 %, le blé de 4,68 % et l’oignon de… 85,6 %.
Manille, capitale des Philippines, reçoit l’APEC, le Forum de coopération économique de l’Asie-Pacifique. Copie écran du site du média hongkongais South China Morning Post.

Bataille de traités à l'APEC et retour du 'small is beautiful' en Asie

APEC à Manille : Etats-Unis et Chine avancent leurs pions

South China Morning Post (Hong Kong) – 17.11.2015 – C’est une bataille de sigles et d’alliances qu’ont une nouvelle fois menée Washington et Pékin lors du sommet de l’APEC. Le forum de coopération économique Asie-Pacifique s’est terminé hier jeudi à Manille par une déclaration commune sur la croissance inclusive. Mais en coulisses, Américains et Chinois étaient à la manœuvre pour imposer leurs pactes d’alliances : le traité de libre-échange de l’APEC dans la région Asie-Pacifique (FTAAP) est l’option que tente d’imposer Pékin à ses alliés, tandis que Washington pousse le Japon, la Corée du Sud, la Thaïlande, l’Indonésie et sept autres pays a signer un accord de Partenariat Transpacifique (TPP) excluant la Chine et pièce centrale du « pivot asiatique » de Barack Obama.
Pour comprendre la partie de jeu de go qui se joue en ce moment en Asie-Pacifique, le South China Morning Post invoque Rudyard Kipling, célèbre auteur du Livre de la Jungle, mais aussi et surtout infatigable voyageur et grand connaisseur de l’Asie. Au XIXème siècle, la couronne Britannique et la Russie tsariste n’avaient d’yeux que pour l’Asie Centrale. Une ambition obsédante et dévastatrice qui a contraint les deux puissances à dérouler une armée d’espions et de diplomates sur le terrain afin d’essayer de contenir les visées de l’adversaire. En bref, à sortir le « Grand Jeu » selon l’expression de l’écrivain britannique.
Au XXIème siècle, les cartes ont été depuis longtemps rebattues. La partie se joue désormais entre la Chine et les États-Unis, indique la plume du quotidien hongkongais. Alors que la « nouvelle route de la soie » proposée par la direction communiste se dessine en Asie centrale, la première et la deuxième économie du monde dégainent leurs traités de libre-échange de façon à tenter d’imposer leur suprématie. L’enjeu est de taille : les activités militaires et diplomatiques des deux pays dans les mers de Chine visent à contrôler une zone où circule 40 % du commerce mondial.

La Thaïlande danse à la fois avec le TTP et le FTAAP

The Nation (Thaïlande) – 20.11.2015 – Il faut aller plus loin que le Partenariat Transpacifique (TPP), a fait savoir le Général Prayut à Manille ce jeudi 19 novembre. Pour le Premier ministre thaïlandais et grand ami de pékin, les négociations doivent être poursuivies pour réaliser la zone de libre-échange de l’Asie-Pacifique (FTAAP) afin d’englober tous les membres de l’APEC. Actuellement, le TPP comporte 12 pays : L’Australie, le Sultanat de Brunei, le Canada, le Chili, le Japon, la Malaisie, le Mexique, la Nouvelle-Zélande, le Pérou, Singapour, les Etats-Unis et le Vietnam. L’objectif, a expliqué le chef du gouvernement thaïlandais, est de parvenir à la déclaration de Bogor sur la libéralisation du commerce et de l’investissement d’ici à 2020.

Asie : l’esprit startup contre le « too big to fail »

The Korea Herald (Corée du Sud) – 15.11.2015 – On connaît le syndrome de l’éléphant et le fameux « too big to fail » qui empêcherait les multinationales de sombrer. Dans une économie dominée pendant des décennies par des grands groupes horizontaux, et dont les productions vont de l’aviation civile au papier toilette, le slogan avait valeur de religion. Sauf que si les « chaebols » – les fameux grands groupes – sont toujours là en Corée du Sud, certains ont fini par quitter la scène comme le groupe Daewoo. Ce n’est donc pas toujours la taille qui compte, estime Andrew Sheng dans le Korea Herald. Car aujourd’hui, sur ce plan-là aussi, Internet à tout changé.
Via le web, les petites et moyennes entreprises ont désormais accès aux marchés du monde entier. La preuve en Chine où l’on compte seulement 2 800 sociétés cotées, autant dire une goutte d’eau rapportée aux 40 millions de PME que compte l’empire du milieu. Les grandes entreprises découvrent qu’à trop grandir, elles deviennent complexes à gérer. Les déboires récents de Volkswagen en sont l’une des meilleures illustrations. Une analyse qui s’applique également au monde de la finance. Les membres du G20 entendent mettre un terme à l’ère des banques « too big to fail », rapporte l’agence Bloomberg.
« Mon pari, conclu Andrew Sheng, c’est que le prochain Apple sera une startup de moins de cinq ans dont jamais personne n’aura entendu parler. Ce sera probablement dans le domaine des bio-technologies, avec la production d’un nouveau médicament ou d’un nouvel outil médical qui va changer la médecine. Et cette startup est davantage susceptible d’émerger en Asie, en raison des efforts massifs réalisés par les gouvernements du continent pour promouvoir les nouvelles entreprises, d’Osaka à Shenzhen, en passant par Singapour et Bangalore. »
Le TGV chinois va bientôt rouler en Thaïlande. Copie d’écran du Bangkok Post.

Trains chinois en Thaïlande et 'Uber ultra low-cost' au Pakistan

Thaïlande : deux nouveaux trains chinois

Bangkok Post (Thaïlande) – 18.11.2015 – Une noria de TGV chinois prêts au départ. La photo a été prise en Chine évidemment, mais il sera peut-être possible de voir demain la même scène en Thaïlande, semble indiquer le Bangkok Post avec ce cliché qui vient illustrer un article consacré à un futur accord-cadre pour le développement de projets ferroviaires en partenariat avec les chemins de fer chinois. Depuis que les militaires se sont ré-installés au pouvoir en Thaïlande, Pékin se frotte les mains. On l’a vu en matière de concessions minières ou pour le pétrole, c’est la même chose aujourd’hui dans le domaine des infrastructures.
Après plusieurs mois de négociations et de multiples retards, un accord-cadre vient d’être approuvé par le gouvernement thaïlandais concernant la construction de deux nouvelles lignes de train reliant Nong Khai-Nakhon à Ratchasima-Kaeng et Bangkok-Kaeng à Khoi-Map Ta Phut. Au total, 867 kilomètres de tracé pour un budget de 9,1 milliards d’euros – 350 milliards de baths. « Les partenaires chinois apportent la technologie nécessaire au percement des tunnels, à la construction des ponts et la mise en place du système d’exploitation ferroviaire », explique notre confrère Chatrudee Therapat. La partie thaïlandaise aura en charge la gestion de l’impact environnemental, la question des expropriations, le génie civil, l’approvisionnement du chantier en électricité et en matériaux de construction.

Pakistan : Le Business Express Lahore-Karachi reprend du service

Dawn News (Pakistan) – 19.11.2015 – Le Business Express devrait bientôt reprendre les rails, mais avec plusieurs modifications dont un arrêt de deux minutes en gare de Bahawalpur. Ces changements interviennent un peu plus d’une vingtaine de jours après la prise de contrôle par l’Etat de cette ligne autrefois non-stop entre Lahore et Karachi. Pour l’instant, on en est encore aux tâtonnements. Les Chemins de fer du Pakistan n’ont en effet toujours pas retrouvé le rythme de croisière, en termes commerciaux, des trains 303 et 304 gérés jusqu’au 28 octobre dernier par une compagnie entièrement privée. L’accord signé entre les autorités et la société Four Brothers International doit servir de modèle en matière de joint-venture public/privé. Problème : la ligne enregistre une baisse de 30 % de son taux d’occupation, selon un responsable cité par Dawn.
Au total, 486 passagers peuvent prendre place à bord. Constitué de 9 compartiments « classe affaire » climatisés, de deux locomotives électriques et d’un wagon pour les bagages, le Business Express nouvelle formule comprendra désormais 4 compartiments « classe affaire » et 6 compartiments « standards » climatisés. Un appel d’offre a été lancé pour la gestion de la voiture-restaurant. Inauguré le 3 février 2011 par le Premier ministre de l’époque Yousuf Gilani, la ligne doit également permettre d’établir de nouvelles normes pour le secteur public et améliorer l’ensemble des performances des chemins de fer pakistanais.

Rixi : les « Uber rickshaw » de Lahore

The Express Tribune (Pakistan) – 19.11.2015 – C’est devenu un « marronnier » comme disent les journalistes, autrement dit une nouvelle qui revient avec régularité et ne surprend plus personne. Les applications mettant en relation clients et véhicules avec chauffeurs sont désormais légions en Asie. On notera toutefois avec The Express Tribune la création de « Rixi » à Lahore. Cette fois, l’idée est venue des chauffeurs eux-mêmes, et pas n’importe lesquels puisqu’il s’agit de conducteur de trois roues. Les fameux Rickshaw d’Asie du Sud, qui offrent des courses rapides et peu chères dans des mégalopoles en proie aux embouteillages.
Problème : la plupart des chauffeurs de trois roues n’ont pas les moyens de posséder un smartphone. Impossible dans ces conditions d’établir une relation avec les clients potentiels via Internet. C’est donc par SMS que sont formulées les commandes, explique au quotidien anglophone Adnan Zafar Khawaja. Pour l’instant, 8 000 Rickshaw sont connectés ; ils devraient être 40 000 dans les trois ans à venir, selon le patron fondateur d’IdeaCentricity à l’origine de ce nouveau service. Un produit qui entre totalement dans ce que les voisins indiens appellent le Jugaad, la « frugalité source d’innovation » telle que décrite par Michel Testard sur Asialyst. Un « Uber ultra low-cost » en quelque sorte, alors que le Uber américain annonçait en octobre dernier son arrivée sur le marché pakistanais.
Des robots-domestiques en Chine. Copie d’écran du site IBN Live.

Des robots comme domestiques en Chine, hausse des salaires des fonctionnaires en Inde et communauté économique de l'ASEAN

Chine : ma concierge est un robot

The China Daily (Chine) – 19.11.2015 – Le petit personnel n’est plus ce qu’il était, ou en tous cas il est devenu trop onéreux. C’est ce que pense China Vanke, le plus grand promoteur immobilier du pays le plus peuplé du monde. Pour faire face aux augmentations de salaire en Chine, la compagnie a décidé de recruter une armée de robots pour s’occuper des tâches domestiques et de l’accueil des résidences pour Chinois fortunés. Il est ainsi possible aujourd’hui d’acheter un robot serveur pour 40 000 yuans (5 850 euros) sur la plate-forme de vente en ligne Taobao, explique le China Daily, même si ces derniers ont du mal encore à trouver preneurs, note le site Tech In Asia.
China Vanke développe de son côté ses propres systèmes automatisés pour des services de conciergerie, de sécurité et de transport. Voilà qui rappelle ce qui se passe dans l’ex-atelier du monde, dans l’est de la Chine où, là aussi, les employés sont progressivement remplacés par des automates sur les chaînes de montages. Le patron de Foxconn, Terry Gou, a ainsi affirmé qu’il allait bientôt utiliser jusqu’à un million de robots dans ses usines, rapporte The Straits Times. « Nous estimons qu’avec la croissance actuelle et les changements de structure au sein du personnel en Chine, au moins 30 pour cent de nos emplois seront remplacés par des robots », affirme le président de China Vanke. Parmi les modèles déjà en service, une voiture sans conducteur et un robot de patrouille. Le « cyber balayeur de plancher » devrait quant à lui entrer en service à la fin du mois.

Inde : hausse des salaires et des pensions des fonctionnaires

Times of India (Inde) – 19.11.2015 – C’est une sacrée aubaine pour les fonctionnaires en activité et les retraités, écrit le journal anglophone. La commission en charge des émoluments de la fonction publique vient de recommander dans un rapport de 900 pages, un passage à 18 000 roupies par mois (255 euros) minimum pour le salaire de base ainsi que d’autres augmentations concernant l’ensemble des grilles. Ces recommandations ont un impact sur le budget de l’Etat et des chemins de fers indiens notamment. Au total, l’augmentation globale des salaires et pensions approchera les 23,55 %, indiquent les auteurs du rapport. Ces directives seront effectives à compter du 1er janvier 2016.

L’ASEAN au service des travailleurs pauvres

Jakarta Post (Indonésie) – 20.11.2015 – Derrière le tapis rouge et les palaces de l’APEC, la pauvreté a la vie dure, racontait en début de semaine The Philippine Star. Dans le même esprit, le Premier ministre malaisien espère que la Communauté économique de l’ASEAN bénéficiera aux travailleurs pauvres et non qualifiés. Najib Razak compte pour cela sur un afflux direct d’investissements étrangers créateurs d’emplois.
Voilà dix ans que les 10 pays d’Asie du Sud-Est membres de l’ASEAN tentent de créer d’une communauté économique sur le modèle de l’Union européenne. Cette entité sera officiellement inaugurée à la fin du mois de décembre prochain. Il y a du travail avant que cette communauté économique ne soit pleinement intégrée, a encore affirmé le Premier ministre malaisien, l’objectif étant notamment de réduire le taux de chômage de l’ASEAN aujourd’hui à 3,3 %.
Par Stéphane Lagarde

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A propos de l'auteur
Stéphane Lagarde est l'envoyé spécial permanent de Radio France Internationale à Pékin. Co-fondateur d'Asialyst, ancien correspondant en Corée du Sud, il est tombé dans la potion nord-est asiatique il y a une vingtaine d’années.
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