Politique
L'Asie du Nord-est dans la presse

Japon : Shinzo Abe toujours plus fragilisé par le scandale de l'école vétérinaire

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe lors d'une conférence de presse dans sa résidence officielle le 19 juin 2017. (Crédits : AFP PHOTO / Toshifumi KITAMURA)
Le Premier ministre japonais Shinzo Abe lors d'une conférence de presse dans sa résidence officielle le 19 juin 2017. (Crédits : AFP PHOTO / Toshifumi KITAMURA)
Rien ne va plus pour le Premier ministre japonais Shinzo Abe. Déjà empêtré avec son épouse dans une histoire de vente illégale de terrain public à une école nationaliste d’Osaka (lire notre article), voilà qu’une nouvelle accusation de favoritisme commence à s’envenimer dangereusement. Ces affaires constituent autant de plomb dans l’aile du Parti Libéral Démocrate au pouvoir. Les élections de l’assemblée métropolitaine de Tokyo prévues ce dimanche 2 juillet risquent de prendre des allures de référendum sur la politique gouvernementale.
« La fondation éducative Kake ne m’a jamais fait de don à but politique. Pas plus qu’elle n’a acheté de bon pour la collecte de fond du parti. » Ainsi se défend Hakubun Shimomura, le responsable de la section tokyoïte du PLD – et ancien ministre de l’Education –, cité par le Straits Times. Selon le Mainichi Shimbun, ce groupe éducatif aurait fait en 2013 et 2014 deux dons successifs d’1 million de yens (près de 7 700 euros) au comité de soutien politique de Shimomura. Des contributions qui n’ont pas été enregistrées au nom de la fondation Kake mais comme provenant de 11 entreprises auprès desquelles cette dernière a rassemblé ce montant. Le comité de soutien est donc accusé d’avoir violé la loi de financement des partis politique, laquelle dispose que tout don de plus de 2 millions de yens (environs 15 500 euros) doit être déclarés. L’étau se resserre autour du parti du Premier ministre dans le cadre de l’affaire de « l’école vétérinaire Kake ». Abe est accusé d’avoir fait usage de son influence pour accélérer les démarches administratives concernant l’implantation d’une faculté de médecine vétérinaire au sein d’une université détenue par un de ses amis dans le département d’Ehime.
Cette révélation tombe à point nommé pour les détracteurs d’Abe. Comme l’expliquait le Japan Times le 20 juin dernier, la télévision publique NHK a révélé un document prouvant que le chef du gouvernement nippon a consenti à la construction de l’école Kake bien avant que le comité ministériel chargé d’examiner la commission ne se réunisse. Le texte en question serait le résumé d’une conversation entre Koichi Hagiuda, le vice-secrétaire général du Cabinet, et Yutaka Tokiwa, le chef du bureau de l’enseignement supérieur. Hagiuda y annonce clairement que le bureau du Premier ministre veut voir le projet Kake « réalisé à tout prix » et désire que l’école vétérinaire ouvre ses portes « au plus tard en avril 2018 ». Ce dernier a par la suite démenti avoir reçu de telles instructions et déclaré avoir accepté les excuses du ministre de l’Education pour avoir produit un document au contenu « particulièrement erroné ». Les protagonistes risquent gros. Si ce document couplé aux accusations contre le chef du PLD de Tokyo se révèlent exactes, cette affaire de trafic d’influence se transformerait en scandale de corruption.
Ainsi, la majorité gouvernementale se retrouve plus que jamais en mauvaise posture alors qu’elle s’engage dans la dernière ligne droite avant l’élection de l’assemblée métropolitaine de Tokyo. La municipalité est dirigée depuis 2016 par Yuriko Koike, membre du PLD qui a préféré se présenter sans étiquette contre le candidat du parti. Koike a fondé son propre micro-parti pour ces élections, le Tomin First no Kai (« Les Tokyoïtes d’abord », ou TFK) afin de ravir au parti de Shinzo Abe la majorité à l’assemblée qui lui manque pour mener à bien ses politiques. Koike semble en bonne posture dans cette campagne, imposant aux autres candidats ses thèmes de prédilection, comme l’interdiction de fumer dans les lieux publics, indique la Nikkei Asian Review.
Par ailleurs, poursuit le site économique japonais, la déclaration de soutien de la ministre de la Défense Tomomi Inada à l’un des candidats « au nom du ministère de la défense, des Forces d’Autodéfense, du ministre et du PLD », achève de mettre le cabinet Abe dans l’embarras. La « gaffe » a provoqué un tollé parmi toutes les formations politiques engagées dans la course électorale. En violant le devoir de neutralité politique de son administration et tout particulièrement des forces armées japonaises, la ministre a bafoué l’article 15 de la constitution. Dans un éditorial d’aujourd’hui jeudi 29 juin, le très écouté quotidien de centre-gauche Asahi a d’ailleurs appelé à sa démission. Un cafouillage qui risque d’être celui de trop pour le PLD a quatre jours de ce scrutin symbolique.
Par Emeric Des Closières

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