Culture
Analyse

Le Tibet à l'honneur du festival des cinémas d'Asie de Vesoul

Scène du film "Jinpa" du réalisateur tibétain Pem Tseden, Cyclo d'or du Festival international des cinémas d'Asie (FICA° à Vesoul en 2019. (Source : Film Linc)
Scène du film "Jinpa" du réalisateur tibétain Pem Tseden, Cyclo d'or du Festival international des cinémas d'Asie (FICA° à Vesoul en 2019. (Source : Film Linc)
C’est l’un des rendez-vous incontournables des passionnés de cinéma asiatique. La 26ème édition du Festival international des cinémas d’Asie (FICA) de Vesoul, en Haute-Saône, aura lieu du 11 au 18 février prochain. Au total, 84 films seront présentés au public, avec un regard inédit sur le cinéma tibétain.
Neuf films en compétition officielle, huit documentaires, 24 films traitant de la thématique « Liberté, Egalité, Créativité » ou encore 14 films venant du Tibet. Cette année encore, l’offre du FICA est pléthorique. « Une occasion pour les spectateurs de découvrir des œuvres venues de toute l’Asie, du Proche à l’Extrême-Orient, de l’Oural au Pacifique et du canal de Suez à l’océan Indien », se félicite Jean-Marc Therouanne, à l’origine de l’événement.
Neuf films en compétition officielle, huit documentaires, 24 films traitant de la thématique "Liberté, Egalité, Créativité" ou encore 12 films venant du Tibet composeront la 26ème édition du Festival international des cinémas d'Asie de Vesoul, du 11 au 18 février 2020. (Crédit : FICA)
Neuf films en compétition officielle, huit documentaires, 24 films traitant de la thématique "Liberté, Egalité, Créativité" ou encore 12 films venant du Tibet composeront la 26ème édition du Festival international des cinémas d'Asie de Vesoul, du 11 au 18 février 2020. (Crédit : FICA)

Renommée mondiale

Aux manettes de l’événement depuis 26 ans, Martine et Jean-Marc Therouanne, deux habitants de Vesoul. « Mon épouse parcourt l’Asie en sac à dos depuis ses 18 ans. C’est d’ailleurs sur une plage en Thaïlande que nous nous sommes rencontrés, raconte Jean-Marc Therouanne. Passionnée par le cinéma, elle est vite devenue directrice du ciné-club de Vesoul. En 1995, année centenaire du cinéma, nous avons eu envie de marquer le coup. C’est à ce moment-là qu’a jailli l’idée de créer un festival. »
Un quart de siècle plus tard, le festival est un succès, attirant chaque année plus de 30 000 spectateurs. Le couple a depuis reçu plusieurs récompenses, dont le « Korean Cinéma Award » au festival international de cinéma de Busan en 2018, rendant hommage à leur travail.
Pour cette 26ème édition, neuf films d’Afghanistan, de Chine, du Bangladesh ou encore du Sri Lanka seront en compétition pour remporter le Cyclo d’Or, l’équivalent de la Palme d’or pour le FICA. Parmi eux, Saturday Afternoon du réalisateur Mostafa Sarwar Farooki, qui raconte un attentat dans un café de Dacca ; John Denver Trending du réalisateur philippin Arden Roz Condez, ou encore Children Of The Sun du Sri-Lankais Prasanna Vithanage, une histoire d’amour impossible sur fond de colonisation britannique.

Naissance d’un cinéma tibétain

« Pema Tseden est le premier réalisateur à avoir remporté deux fois le Cyclo d’Or à Vesoul pour Tharlo en 2016 et Jinpa en 2019, rappelle Jean-Marc Therouanne. Il nous a paru important de mettre l’accent sur la naissance d’une cinématographie. Avant Pema Tseden et son brillant disciple, Sonthar Gyal, il n’existait pas de cinéma tibétain. Il fallait marquer d’une pierre blanche cette naissance. »
De nombreux films seront ainsi projetés en présence des deux réalisateurs. Parmi eux, The Grassland, le premier court-métrage de Pema Tseden : un couple doit traverser les plaines tibétaines et se retrouve confronté à trois jeunes voleurs. Les spectateurs pourront aussi découvrir Balloon, sa dernière production : la vie ordinaire de Darje et Drolkar avec leurs trois fils jusqu’à la découverte d’un préservatif qui va briser l’harmonie familiale.
Du côté de Sonthar Gyal, les spectateurs pourront découvrir Lhamo et Skalbe, une dramatique histoire d’amour sur fond d’opéra tibétain. « Dans Lhamo and Skalbe, explique Sonthar Gyal, j’ai voulu aborder l’impuissance d’un individu pris dans les tourments de l’époque actuelle, lorsque les valeurs de l’amour et du mariage se heurtent au contexte social. »
Pema Tseden reçoit pour la deuxième fois le Cyclo d’or à Vesoul avec Martine et Jean-Marc Thérouanne et Bastian Meiresonne, le 1é février 2019. (Copyright : Jean-Francois Maillot)
Pema Tseden reçoit pour la deuxième fois le Cyclo d’or à Vesoul avec Martine et Jean-Marc Thérouanne et Bastian Meiresonne, le 1é février 2019. (Copyright : Jean-Francois Maillot)

Hommage à Ronit Elkabetz

L’autre grand rendez-vous de cette édition sera sans nul doute l’hommage à l’actrice israélienne Ronit Elkabetz. « En vingt ans de carrière et 27 films, elle est devenue un véritable symbole du cinéma israélien, souligne le directeur du festival. Dès son premier film, elle a incarné des personnages féminins très forts. Elle essaie dans chacun de ses rôles de changer les choses, de briser les barrières sociales, de se battre pour l’amour et la féminité, quitte à aller à l’encontre des règles et traditions de son pays. Lui rendre hommage est notre façon de montrer qu’elle est plus que jamais vivante. »
Le festival retracera ainsi sa carrière en 11 films emblématiques, notamment avec La visite de la Fanfare d’Eran Kolirin, qui sera diffusé lors de la cérémonie de clôture du festival le 18 février.

« Liberté et créativité »

L’été dernier, Jean-Marc Therouanne et sa femme annonçaient sur les réseaux sociaux la condamnation à un an de prison et deux ans d’interdiction de quitter le territoire du réalisateur iranien Mohammad Rasoulof pour cause de « propagande contre la République islamique ». Un choc pour les deux organisateurs qui avaient eu le plaisir d’accueillir le cinéaste en 2015. Sans nul doute, cet événement aura inspiré la thématique choisie cette année: « Liberté, égalité, créativité ».
« A travers les 24 films qui composent cette thématique, précise encore Jean-Marc Thérouane, nous nous sommes interrogés sur les différentes expressions que peut prendre la création artistique : accomplissement personnel dans Ivre de femmes et de peinture du Coréen Im Kwon-Taek, ou Dunia de la réalisatrice israélienne Jocelyne Saab, moyen de dénonciation comme dans Junction 48 de l’Israélien Udi Aloni ou encore vecteur de sagesse. »
Par Cyrielle Cabot

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A propos de l'auteur
Jeune journaliste diplômée de l’école du CELSA (Paris-Sorbonne), Cyrielle Cabot est passionnée par l’Asie du Sud-Est, en particulier la Thaïlande, la Birmanie et les questions de société. Elle est passée par l’Agence-France Presse à Bangkok, Libération et Le Monde.