Culture
Souvenirs de reportages en Asie du Sud-Est

Revoir Phnom Penh

Vue aérienne de Phnom Penh le 30 décembre 2019. (Source : Wikimedia Commons)
Vue aérienne de Phnom Penh le 30 décembre 2019. (Source : Wikimedia Commons)
Comprendre l’Asie, c’est aussi mesurer en un vol d’avion l’histoire parcourue. Notre chroniqueur Jacques Bekaert est revenu dans la capitale cambodgienne ces dernières semaines. Une expérience d’une facilité déconcertante pour ce journaliste qui avait dû attendre près d’une décennie avant d’avoir son premier sésame pour Phnom Penh. Récit.
Arrivé en Thaïlande début 1979, l’une de mes premières actions fut de demander un visa pour le Cambodge. Apres une demi-douzaine de tentatives, j’en étais toujours réduit à visiter les camps de réfugiés à la frontière pour faire quelques dizaines de mètres à l’intérieur de ce pays dont je rêvais déjà enfant. Mais de visa point. Je me suis même adressé à une connaissance au sein du Parti Communiste belge, un clerc de notaire rencontré lors de manifestations contre la guerre du Vietnam, l’Espagne de Franco, ou les fusées Pershing « pour la guerre », contrairement aux Soyouz « pour la paix ». Mais rien n’y fit jusqu’au jour où lors de la conference des non-alignés à New Dehli en 1983, je fis la connaissance du ministre vietnamien des Affaires étrangères, le très pragmatique Ngueyn Co Thach. Il me promit que j’irais au Cambodge « avant la fin de l’année ». Et au Vietnam. Il tint parole.
Cependant, ce que j’écrivis dû déplaire aux responsables de presse du monde socialiste, et le visa suivant ne me fut accordé qu’en 1988.
Aujourd’hui, aller au Cambodge est infiniment plus simple. Trois solutions : obtenir le visa à l’une des ambassades de ce pays dans le monde, en faire électroniquement la demande et il vous attendra à l’arrivée à Phnom Penh ou Siem Reap, ou bien le prendre directement en arrivant sur le sol cambodgien, en payant 5 dollars de plus, muni d’une photo récente. Ce que je fis il y a quelques semaines, à l’aéroport de Pochentong.
Un ami avait réservé pour moi deux chambres dans un hôtel charmant, un « boutique-hôtel », ayant en plus volé avec Bangkok Airways, une « boutique airline ». L’hôtel, l’Anise Villa, se situe rue 400, à deux pas du boulevard Mao Tse Tung.
Piscine, chambres equipées de tout le confort moderne, télévision à écran plat, généreux petits déjeuners, menus variés pour les autres repas, service empressé sans être obséquieux, voila qui me changeait de mes vieux hôtels des années quatre vingts, à l’électricité incertaine (comme le Monorom ou le Sukhalai). Mais pas d’ascenseur, ni carte de crédit. On paye en bahts, mais surtout en dollars, la monnaie officieuse du pays.
Et Phnom Penh ? Il fallu plus d’une heure et demie à notre taxi pour arriver, par un dédale de rues poussiéreuses, à l’hôtel. Outre les voitures, dont beaucoup très luxueuses, il faut ajouter des centaines de Tuk Tuk de fabrication indienne, de chariots tirés par des motos et de piétons forcés de marcher dans la rue, les trottoirs servant souvent de parking pour les grosses cylindrées.
La présence de l’empire du milieu est discrète au centre de la capitale. Mais elle est omniprésente dans les faubourgs où les enseignes en chinois le disputent à celles en khmer, voire en anglais.
Les touristes, me dirent plusieurs personnes proches du milieu s’occupant de visiteurs étrangers, ne restent que rarement plus de deux ou trois jours à Phnom Penh. Quant aux autres – la majorité -, ils vont directement à Sieam Reap, et ses temples angkoriens.

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A propos de l'auteur
Jacques Bekaert (1940-2020) fut basé en Thaïlande pendant une quarantaine d'années. Il est né le 11 mai 1940 à Bruges (Belgique), où sa mère fuyait l’invasion nazie. Comme journaliste, il a collaboré au "Quotidien de Paris" (1974-1978), et une fois en Asie, au "Monde", au Far Eastern Service de la BBC, au "Jane Defense Journal". Il a écrit de 1980 a 1992 pour le "Bangkok Post" un article hebdomadaire sur le Cambodge et le Vietnam. Comme diplomate, il a servi au Cambodge et en Thaïlande. Ses travaux photographiques ont été exposés à New York, Hanoi, Phnom Penh, Bruxelles et à Bangkok où il réside. Compositeur, il a aussi pendant longtemps écrit pour le Bangkok Post une chronique hebdomadaire sur le vin, d'abord sous son nom, ensuite sous le nom de Château d'O. Il était l'auteur du roman "Le Vieux Marx", paru chez l'Harmattan en 2015, et d'un recueil de nouvelles, "Lieux de Passage", paru chez Edilivre en 2018. Ses mémoires, en anglais, ont été publiées en 2020 aux États-Unis sous le titre "A Wonderful World".