Culture
Photographes d'Asie

Portfolio : en voie de disparition, les jeux au marché de nuit à Taïwan

Jeux au marché de Khaosiung, dans le sud de Taïwan, en nombre 2001. (Copyright : Bruno Birolli)
Jeux au marché de Khaosiung, dans le sud de Taïwan, en nombre 2001. (Copyright : Bruno Birolli)
Suite de notre série photographique dans l’univers ludique de l’Asie, avec aujourd’hui les jeux du marché de nuit à Kaohsiung, au sud de Taïwan.
Double-cliquez sur les diaporamas pour les visualiser en plein écran.
Les jeux comme que l’on voit à Yucheng Road – le marché de nuit de Kaohsiung – étaient omniprésents en Asie jusque dans les années 1980. Descendants directs des attractions qui se regroupaient autour des marchés bien avant l’arrivée des Occidentaux, ces divertissements populaires, destinés en grande partie aux enfants, ont progressivement disparu, détrônés par les consoles électroniques. Les vieilles générations se souviennent qu’on en trouvait à Singapour dans les pasar malam (les marchés de nuit). Ces jeux aux multiples variantes – la créativité est infinie en la matière – s’inspirent des bingos ou copient les flippers : ils sont comparables aux jeux de nos foires foraines. Les gains sont d’ordinaire une peluche ou un bibelot. Mais même si ces jeux ont mieux résisté à Taïwan, là aussi ils sont en voie d’extinction. Série photo réalisée en novembre 2011.
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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

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Jeux au marché de Kaohsiung, dans le sud de Taïwan, en novembre 2011. (Copyright : Bruno Birolli)

 
 

Jeux asiatiques

De 1998 à 2002, j’ai profité de mes reportages à travers l’Asie pour trouver le temps de photographier des joueurs. Jouer est une des grandes activités humaines au même titre que la guerre, l’amour, le travail depuis la nuit des temps. Et le jeu est bien plus présent en Asie qu’en Occident. Dès le XIXème siècle, les voyageurs européens constataient la passion du jeu des Asiatiques et ils y voyaient la marque d’un appât du gain insatiable qu’ils réprouvaient comme un vice atavique. Cette condamnation morale absolvait les empires coloniaux de la responsabilité d’avoir construit des champs de courses, des canidromes, d’avoir fondé des loteries ou d’avoir enfermé le fantan – un vieux jeu de hasard – dans les casinos, afin de vider les poches des populations indigènes et financer la « mise en valeur » de ces territoires. L’opium remplissait la même fonction.

En vérité, les enjeux sont le plus souvent symboliques, quelques euros juste de quoi donner un peu de sel aux parties. En toutes occasions, on joue. Lors des fêtes du Nouvel An chinois, le mahjong réunit parents éloignés ou voisins de palier. Pendant les cérémonies hindouistes à Bali, la fonction religieuse des jeux de hasard est ouvertement affirmée. Le jeu donne une communauté aux exclus. Les « cages men » de Hong Kong – ces pauvres sans famille qui vivent dans des cages grillagées de la taille d’une paillasse – se retrouvent sur le parvis des temples. Une fois libérés des camps où ils ont été condamnés après 1975 et marginalisés ensuite pour le restant de leurs vies par les vainqueurs du Nord, les anciens soldats du Sud Vietnam constituent une sorte de contre-société souterraine autour des combats de coq clandestins.

Suivre le déroulement d’une partie est certes divertissant. Comprendre les règles de cette multitude de jeux inconnus hors de ces pays n’en est pas moins stimulant. Mais ma fascination va aux joueurs. Les visages rendent compte des différences ethniques ; les habits sont un indicateur de la condition sociale de chacun ; les lieux donnent un aperçu de l’habitat ; les situations suggèrent des modes de vie et le niveau de développement du pays. Mes images relèvent d’une préoccupation sociologique : saisir des instantanés des sociétés asiatiques. Ce qui confère aux joueurs asiatiques une qualité : être de bien meilleurs perdants que les Occidentaux, en prenant leur échec d’un cœur léger, avec fair-play.

B.B.

A voir, le premier portfolio de cette série : Portfolio : échecs, go ou combats de coq, ce que les jeux disent de l’Asie

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A propos de l'auteur
Longtemps journaliste en Asie pour le Nouvel Observateur, Bruno Birolli a vécu à Tokyo (en 1982 puis de 1987 à 1992), à Hong Kong (1992-2000), à Bangkok (2000-2004) et à Pékin (2004-2009). Peu après son retour à Paris, il a troqué ses habits de journaliste pour celui d’auteur. Il a publié des livres historiques ("Ishiwara : l’homme qui déclencha la guerre", Armand Colin, 2012 ; "Port Arthur 8 février 1904 – 5 janvier 1905", Economica, 2015) avant de se lancer dans le roman. "Le Music-Hall des espions", publié en 2017 chez Tohu Bohu, est le premier d’une série sur Shanghai, suivi des "Terres du Mal" (Tohu Bohu, 2019). La seconde édition de son livre "Ishiwara, l’homme qui déclencha la guerre" est disponible en impression à la commande sur tous les sites Amazon dans le monde.