Culture
Expert - Vins d’Asie

Vietnam : l'excellente surprise du Ladora Chateau Dalat

Un homme assis devant une boutique du centre-ville de Hanoi proposant du vin, des chocolats et autres boissons au moment des célébrations du Tet, le 23 janvier 2017.
Un homme assis devant une boutique du centre-ville de Hanoi proposant du vin, des chocolats et autres boissons au moment des célébrations du Tet, le 23 janvier 2017. (Crédit : HOANG DINH NAM / AFP).
Un bon vin vietnamien ? Voilà une question qui peut paraître incongrue. C’est pour sortir des idées reçues que j’ai demandé à un ami qui passait quelques jours de vacances au Vietnam de me ramener ce qu’il pouvait trouver sinon de bon, du moins d’intéressant.
Le Vietnam ne m’est pas inconnu. J’ai du y aller une bonne centaine de fois. Surtout à l’époque où je collaborais activement au service Asie du Sud-Est de la BBC. L’histoire, la culture, les coutumes de ce pays m’attirent depuis longtemps. J’ai lu des dizains de livres sur le Vietnam. Y compris de nombreux numéros des remarquables Cahiers du Vieux Hue, et de la revue France–Asie dirigée par René de Berval – dont je rachetais tout ce que je trouvais chez les bouquinistes d’Hô-Chi-Minh-Ville. De plus, loin de se mirer dans sa grandeur passée, le Vietnam a une culture contemporaine riche : on y trouve des écrivains, des poètes, des musiciens et des cinéastes qui commencent à être connus sur la scène internationale.
Oui, mais des vins ? Ceux que j’avais dégusté auparavant étaient buvables, sans plus. Des vins sans ambitions, que j’ouvrais par devoir plus que par envie. Mais cette fois, avec le Marlot du Chateau Dalat, on a fait un bond qualitatif. Ce vin est issu des chais de Ladora, les premiers vinificateurs totalement professionnels du pays, qui ont pris plusieurs années à préparer les vignes et acheminer l’équipement d’Italie. D’ailleurs, le personnel de Ladora a été formé en Europe, et ils sont aujourd’hui suivis par des experts étrangers.
Ce Merlot 2014 provient d’un vignoble de près de 100 hectares situé dans la province centrale de Nhin Tuan. Au Vietnam, comme dans d’autres pays d’Asie, la demande pour des vins de qualité ne cesse d’augmenter. De nombreux citoyens, ayant acquis une certaine aisance financière, entendent vivre mieux, et profiter des plaisirs de la vie. En outre, comme le vin – bu avec modération, bien entendu – semble avoir de salutaires bénéfices pour la santé de ses partisans, on peut s’attendre à ce que d’autres vignobles apparaissent dans un futur proche.
Ainsi, en 2015, les Vietnamiens ont consommé plus de 32 millions de litres de vin, dont la grande majorité venait de l’étranger. Par comparaison, la France en boit annuellement 42 millions de litres. Remarquons à ce propos qu’en 1960, la consommation française s’élevait à 100 millions de litres et que, malgré la baisse, surtout chez les jeunes qui lui préfèrent des alcools plus fort, la France reste le pays où l’on boit le plus de vin au monde, devant le Portugal et l’Italie (selon des chiffres de 2015). Pour finir de planter le décor, sachez aussi que le Merlot est à la base de quelques-uns des plus grands vins du bordelais, spécialement le Saint-Emilion et le Pomerol. Il se présente sous la forme d’un raisin riche, ample, onctueux.
Le Merlot du Chateau Dalat est donc fort bon. Tellement que le vin que nous avons bu, mon ami Ian et moi-même, nous a surpris, par son moelleux et sa longueur en bouche. C’est le vin phare de Ladora non sans raison ! Attendez-vous à voir bientôt sur le marché des Shiraz et des Sauvignon blancs, voire des Cabernet Sauvignon. Après tout, si la Thaïlande, avec un climat plus ingrat, arrive à fournir des vins de qualité, on peut s’attendre, dans quelques années, à voir les vins produits au Vietnam leur faire concurrence. Et cela ne serait que justice !

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A propos de l'auteur
Jacques Bekaert (1940-2020) fut basé en Thaïlande pendant une quarantaine d'années. Il est né le 11 mai 1940 à Bruges (Belgique), où sa mère fuyait l’invasion nazie. Comme journaliste, il a collaboré au "Quotidien de Paris" (1974-1978), et une fois en Asie, au "Monde", au Far Eastern Service de la BBC, au "Jane Defense Journal". Il a écrit de 1980 a 1992 pour le "Bangkok Post" un article hebdomadaire sur le Cambodge et le Vietnam. Comme diplomate, il a servi au Cambodge et en Thaïlande. Ses travaux photographiques ont été exposés à New York, Hanoi, Phnom Penh, Bruxelles et à Bangkok où il réside. Compositeur, il a aussi pendant longtemps écrit pour le Bangkok Post une chronique hebdomadaire sur le vin, d'abord sous son nom, ensuite sous le nom de Château d'O. Il était l'auteur du roman "Le Vieux Marx", paru chez l'Harmattan en 2015, et d'un recueil de nouvelles, "Lieux de Passage", paru chez Edilivre en 2018. Ses mémoires, en anglais, ont été publiées en 2020 aux États-Unis sous le titre "A Wonderful World".