Politique

Corée du Sud : Park Geun-hye ne s'excuse plus, elle contre-attaque

La présidente sud-coréenne Park Geun-hye interviewée dans l'émission en podcast du journaliste conservateur Jeong Kyu-jae, le mercredi 25 janvier 2017 à Séoul. (Copie d'écran du Korea Times)
La présidente sud-coréenne Park Geun-hye interviewée dans l'émission en podcast du journaliste conservateur Jeong Kyu-jae, le mercredi 25 janvier 2017 à Séoul. (Copie d'écran du Korea Times)
« Une montagne de mensonges. » C’est ainsi que la présidente sud-coréenne Park Geun-hye a repoussé les accusations contre elles lors de son premier interview depuis le vote de sa destitution. Tollé dans la classe politique et dans l’opinion publique. Celle qui adoptait une attitude contrite il y a encore quelques semaines n’est plus désormais sur le mode de l’excuse.
Elle avait choisi son hôte. C’est à la très conservatrice émission en podcast Jeong Kyu-jae TV que Park Geun-hye a accepté de donner, ce mercredi 25 janvier, son premier interview depuis le vote d’une procédure de destitution contre elle le 9 décembre dernier. Et la présidente sud-coréenne n’y est pas allée de main morte. Le scandale de corruption et de trafic d’influence qui la submerge avec sa confidente Choi Soon-sil ? Une « montagne de mensonges » ! Park n’a pas donné de détails très précis pour argumenter, note le Korea Times. La chef d’Etat s’est contentée de qualifier cette affaire de « complot » organisé de longue date. Et de nier toutes les allégations ou « rumeurs » autour d’elle : « Ces absurdités montrent comment les malentendus, la fiction et les mensonges sont empilés. » A propos de son amie Choi Soon-sil, Park a joué l’étonnement : « J’ai appris des choses que j’ignorais sur elle, comme le fait qu’elle ait créé de nouvelles entreprises et qu’elle cherchait un intérêt personnel dans les projets d’Etat. » Étonnement aussi au sujet de la liste noire d’artistes opposés au gouvernement qu’elle aurait ordonné de dresser : la Présidente a déclaré ne « rien savoir ».

Cette apparition surprise a laissé tous les partis politiques « sans voix » et « stupéfaits », à l’exception du Saenuri, le parti au pouvoir. Selon le député d’opposition Joo Seung-yong, Park devrait « clarifier ses revendications devant la Cour constitutionnelle si elle est accusée à tort comme elle le prétend ». La porte-parole du Parti démocratique de Corée (DPK) Park Kyung-mee va plus loin : elle qualifie cette interview de « sale tour de manipulation des médias » : « La Présidente essaie de tromper les gens en faisant croire que le scandale était une conspiration préméditée contre elle. Mais le peuple est trop intelligent pour être trompé. » Même jugement sévère à lire dans le Korea Times, pour qui l’entretien a montré « pourquoi le public la déteste » et « pourquoi elle devrait être retirée du pouvoir ».

L’indignation s’est propagée jusqu’à des groupes civiques, indique le Hankyoreh. Hier jeudi 26 janvier, le Comité d’urgence pour la démission immédiate de Park Geun-hye a distribué des tracts demandant son arrestation, ainsi que celles du vice-président de Samsung Lee Jae-yong et de l’ancien secrétaire des Affaires civiles de la Maison-Bleue, Woo Byung-woo.

Pourquoi Park a-t-elle adopté une attitude antagoniste alors qu’elle jouait profil bas il y a encore quelques semaines ? Pour le Hankyoreh, son interview est une « campagne de relations publiques » pour ralentir l’horloge de son procès de destitution et rallier le peuple avant les vacances du Nouvel an lunaire. Le journal rappelle l’apparition récente de la présidente sud-coréenne devant la tombe de son père, l’ancien dictateur Park Chung-hee : sa stratégie actuelle semble être un « appel à la nostalgie » afin de mobiliser les opposants à sa destitution. Même isolée et suspendue de ses fonctions, Park espère toujours éviter l’impensable pour elle : la fin prochaine de sa carrière politique.

Par Joana Hiu

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