Politique
L'Asie du Nord-Est dans la presse

Corée du Sud : le très attendu procès Choi Soon-sil

File d'attente pour s'inscrire au procès Choi Soon-sil ce vendredi 16 décembre à Séoul. Copie écran Hankook Ilbo
Pour un peu, on se croirait à une audition de téléréalité. Plus de 200 personnes ont fait la queue ce vendredi matin 16 décembre devant la cour de justice à Séoul pour pouvoir assister au procès public de Choi Soon-sil. La conseillère de l’ombre de la présidente Park Geun-hye est soupçonnée de trafic d’influence et de corruption.
La première audience de Choi Soon-il doit se tenir ce lundi 19 décembre. Nul doute que ce procès sera très suivi. Devant la cour de justice du district de Seocho à Séoul, plus de deux cent personnes attendent le tirage au sort. 150 d’entre elles pourront assister à ce procès de la sulfureuse conseillère par qui le scandale est arrivé. Les moins six degrés au thermomètre n’empêchent pas l’enthousiasme. Cris dans la file d’attente : « Super, j’ai ma place ! », « Moi aussi, j’en ai une ! » Nous ne sommes pas à un entretien d’embauche, mais l’ambiance est tout aussi électrique, raconte le reporter du Hankook Ilbo.

Dispense scolaire pour assister au procès

Certains sont venus en bus, d’autres en train… Parmi les présents, des étudiants en droit, des salariés, mais aussi des lycéens : « J’ai fait une heure trente de transport en commun ce matin, confie Lee Hyo-jang. Mon professeur m’a accordé une dispense spéciale pour que je puisse assister à l’audience poursuit cette élève du lycée Maegoe d’Emseong. » « Après l’examen pour le baccalauréat, j’ai été à plusieurs manifestations à Séoul, raconte Jeong Yoo-mi, elle aussi lycéenne. Face à un tel scandale, nous devons rester mobiliser. »

Voilà plus de deux mois que chaque week-end, des millions de Sud-Coréens manifestent contre la présidente Park Geun-hye qu’ils soupçonnent d’avoir été manipulée par sa conseillère et amie Choi Soon-sil. Le parlement a voté la semaine dernière la destitution de la chef de l’État. Une commission parlementaire a été mise en place pour un scandale qui a des ramifications dans tous les secteurs de la société. Parmi les principaux accusés, la désormais célèbre Madame Choi que les caricaturistes croquent volontiers en habits blancs et portant des lunettes de soleil sur les cheveux.

« Cuillère en argile » contre « cuillère en or »

Comme pour les manifestations aux chandelles, la file d’attente devant la cour de justice ce vendredi matin rassemblent de nombreux jeunes qui se disent fatigué des privilèges des puissants. Ceux qui sont nés avec une « cuillère en argile » dans la bouche, contre ceux qui ont eu droit à une « cuillère en or ». Dès le début de ce vaste scandale d’état, les soupçons ont pesé sur la fille de la conseillère de la présidente, Jeong Yu-ra accusée d’avoir bénéficié d’une dérogation illicite pour être admise à la prestigieuse université féminine d’Ewha à Séoul. Dans une société où la course aux diplômes est vécue comme une guerre et même comme une souffrance par de nombreuses familles, ce genre de passe-droit n’est plus toléré.

C’est aussi contre cette toute puissance des « héritiers » et notamment des filles et des fils des familles à la tête des chaebols, les puissants conglomérats coréens, que manifestent une partie de la population depuis le début du scandale. « Je veux voir qui sont les privilégiés, explique ainsi Min Hyu-ho, que le Hankook Ilbo décrit comme un salarié. Je veux savoir comment ils sont, je veux voir leur visage. » « C’est la première fois que je m’apprête à assister à un procès, raconte encore Lee Jeong-man. Visiblement ému, ce retraité est venu avec son épouse : « Je suis tellement fâché, j’ai envie de crier devant Choi Soon-sil, ajoute-t-il. Oui, je veux lui crier ma colère à la figure. »

Par Stéphane Lagarde

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A propos de l'auteur
Stéphane Lagarde est l'envoyé spécial permanent de Radio France Internationale à Pékin. Co-fondateur d'Asialyst, ancien correspondant en Corée du Sud, il est tombé dans la potion nord-est asiatique il y a une vingtaine d’années.