Politique
L'Asie du Nord-Est dans la presse

La Chine ne se voit pas remplacer les Etats-Unis, malgré la parade de Xi à l'APEC

Le président chinois Xi Jinping entouré de son homolgue russe Vladimir Poutine et du ministère philippin des affaires étrangères Perfecto Yasay, lors de la tradutionnelle "photo de famille" de l'APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation) au Centre des Conventions de Lima au Pérou le 20 novembre 2016.
Le président chinois Xi Jinping entouré de son homolgue russe Vladimir Poutine et du ministère philippin des affaires étrangères Perfecto Yasay, lors de la tradutionnelle "photo de famille" de l'APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation) au Centre des Conventions de Lima au Pérou le 20 novembre 2016. (Crédits : AFP PHOTO / Martin BERNETTI)
C’est la question lancinante depuis dix jours : l’Amérique isolationniste de Trump va-t-elle céder sa place de leader mondial à la Chine ? Non, répond Pékin par la voix de son quotidien officiel Global Times, car elle « n’a pas la capacité de diriger le monde d’une manière globale, et en outre, ni le monde ni la Chine n’y sont prêts psychologiquement ».
A regarder la visage rayonnant de Xi Jinping, on ne peut s’empêcher de penser que le sommet de l’APEC (le forum de coopération économique de l’Asie-Pacifique) à Lima est un peu le sien. Bien sûr, il faut attendre l’investiture de Donald Trump à la Maison-Blanche le 20 janvier prochain et les premières décisions de son administration. Mais depuis la victoire du magnat de l’immobilier, l’Asie, plongée dans l’angoisse, fait comme si tout était (presque) plié : le TPP – le vaste accord de libre-échange initié par Barack Obama et qui exclut la Chine – est mort-né ; Xi Jinping n’a plus qu’à se baisser pour ramasser la mise afin d’attirer les pays asiatiques vers sa propre zone de libre-échange, le RCEP (Regional Economic Comprehensive Partnership), qui exclut les Etats-Unis. C’est ce qu’écrit le New Yok Times ce lundi 21 novembre. D’ailleurs, selon Tan Jian, l’un des délégués chinois au Pérou cité par le South China Morning Post, le RCEP serait « meilleur » que le TPP car « beaucoup moins dur à appliquer pour les pays asiatiques en développement ».

Ecoutons les déclarations du président chinois hier dimanche 20 novembre à Lima : « Nous devons nous en tenir à notre agenda et prendre des mesure plus concrètes pour mettre en oeuvre au plus tôt la FTAAP [Free Trade Area of Asia-Pacific, une autre zone de libre-échange plus consensuelle et plus vague, décidée en 2014 pour harmoniser entre les 21 Etats-membres de l’APEC le mille-feuilles d’accords commerciaux], et cela afin d’engendrer une économie avec une plus grande ouverture en Asie-Pacifique », a lancé Xi Jinping selon l’agence officielle Xinhua. Pékin en chantre du libre-échange contre Washington en repli : la situation doit faire enrager toutes les entreprises étrangères, et occidentales en particulier, qui se cassent les dents en ce moment sur un marché intérieur chinois en voie de fermeture.

Pour autant, la Chine ne veut pas endosser plus de responsabilités sur la scène mondiale. Dans son éditorial de ce lundi, le Global Times le dit tout de go : « La Chine ne saurait égaler les Etats-Unis en termes de puissance globale. […] Que la Chine puisse diriger le monde en remplacement de l’Amérique, cela dépasse l’imagination. » Exemple avec l’accord de Paris sur le climat : « Si Washington s'[en] retire, la Chine peut maintenir ses engagements, mais elle ne sera pas capable de combler la perte ainsi causée », écrit l’éditorialiste. De même, « si les Américains s’engagent sur un chemin anti-libre-échange, le désordre ainsi occasionné irait bien au-delà des capacités de la Chine à en contrer les effets. »

Pour l’instant, la Chine se garde bien de crier victoire trop tôt, car elle sait bien que la transition du pouvoir présidentiel à Washington est un long processus. Mais indéniablement, Xi Jinping a su saisir l’occasion de ce sommet de l’APEC pour lancer à Donald Trump un avertissement : la Chine ne brigue pas la couronne américaine de l’hégémon global, mais les Etats-Unis ne pourront plus ralentir sa montée en puissance. En Asie-Pacifique du moins.

Par Joris Zylberman

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