Revue de presse Asie - 4 novembre 2016

Responsabilité de Park Geun-hye, manifestation à Djakarta et Panamagate pakistanais

Si Park Geun-hye s'est une nouvelle fois excusée pour le scandale qui l'entache, elle ne semble pas disposée à s'écarter spontanément du pouvoir. Copie d'écran du Korea Times, le 4 novembre 2015.
Si Park Geun-hye s'est une nouvelle fois excusée pour le scandale qui l'entache, elle ne semble pas disposée à s'écarter spontanément du pouvoir. Copie d'écran du Korea Times, le 4 novembre 2015.

Asie du Nord-Est

Korea Times« C’est de ma faute. […] Je suis profondément désolée d’avoir abandonné les personnes qui m’ont soutenue. » Par ces mots, la présidente sud-coréenne Park Geun-hye a reconnu sa « responsabilité » dans le scandale de trafic d’influence déclenché par son amie et confidente Choi Soon-sil. « Dans l’ombre », cette dernière aurait « tiré les ficelles du gouvernement » et en aurait retiré de l’argent.

Park, « le visage blême », s’est également dite prête à coopérer avec la justice sur l’enquête en cours « si cela s’avère nécesaire » et « assumera ses responsabilités » si tout « comportement inapproprié » de sa part venait à être découvert. Néanmoins, la présidente ne semble pas prête à lâcher les rênes du pouvoir, refusant de commenter la proposition de l’ensemble de la classe politique (depuis les députés de son propre parti jusqu’à l’opposition) visant à former un « gouvernement neutre ». Elle a par ailleurs nié les rumeurs de rites chamaniques au palais présidentiel ou d’embrigadement dans une pseudo-religion.

South China Morning Post – Ce qui devait arriver, arrive. Face au scandale prolongé des serments des députés localistes hongkongais, l’Assemblée nationale populaire (ANP, organe législatif suprême de la République populaire de Chine) s’est saisi du dossier. Angle d’approche : l’interprétation de l’article 104 de la Loi fondamentale hongkongaise, mini-constitution de l’ex-colonie britannique. Le texte demande aux représentants des pouvoirs législatif, exécutif et judificaire de « prêter allégeance à la région administrative spéciale de Hong Kong, République Populaire de Chine ». Or dans leurs serments, Sixtus Baggio Leung Chung-hang et Yau Wai-ching ont « insulté la Chine » en employant un « langage grossier », note le South China Morning Post.

Craignant pour « la souveraineté nationale et l’unité territoriale » chinoises, le président et vice-président de l’ANP ont envoyé un courrier au Comité sur la Loi fondamentale hongkongaise (organe de travail placé sous l’autorité du Comité permanent de l’ANP), requérant l’interprétation par ses membres dudit article. Cela pourrait bien couper l’herbe sous le pied du Tribunal hongkongais de Première Instance, qui doit prochainement rendre son jugement sur l’affaire. Sixtus Baggio Leung Chung-hang a même déclaré que l’interprétation de l’ANP « conduit l’Etat de droit et le système judiciaire hongkongais tout droit vers la mort ». De son côté, Alan Hoo Hong-ching, président de l’Institut sur la Loi fondamentale, explique que Pékin profitera de l’occasion pour livrer son interprétation non seulement sur les modalités de la prise de serment, mais aussi – et surtout – sur ce que signifie la « loyauté envers la République populaire de Chine ».

Asahi Shimbun – L’échec de la politique agressive d’assouplissement monétaire de la Banque centrale japonaise, première « flèche » des Abenomics, devrait fortement inciter le Premier ministre nippon Shinzo Abe à changer de politique économique. C’est en tout cas l’avis du quotidien Asahi Shimbun qui publie un éditorial très critique. Cela fait cinq fois que l’institution bancaire repousse sa date butoir pour atteindre un taux d’inflation à 2 %. L’objectif, désormais fixé pour avril 2018, pèche de nouveau par optimisme, estime le Asahi Shimbun. Le journal dénonce ainsi le manque de « réalisme » de Tokyo en matière économique.

Par ailleurs, une focalisation trop importante sur la croissance économique nationale (troisième « flèche »), sur laquelle reposerait les « projections concernant la reconstruction fiscale et les politiques de sécurité sociale », pourrait faire payer le prix fort aux générations futures en cas d’objectifs non atteints. Conclusion : il faut lever le nez du guidon des Abenomics, et adopter des politiques plus terre-à-terre en matière économique.

Asie du Sud-Est

The Straits Times – Des dizaines de milliers « d’islamistes radicaux » venus de tout l’archipel indonésien sont descendus dans les rues de Djakarta ce vendredi 4 novembre. Motif de l’indignation : des propos prétendument blasphématoires tenus par le gouverneur de la ville, Basuki Tjahaja Purnama dit « Ahok » – qui incitent désormais les manifestants à demander son « arrestation », son « expulsion », voire sa « mort ». Si seules certaines rues ont été bloquées, la capitale indonésienne était sous tension avec le déploiement de 20 000 policiers et de 500 soldats, dans la crainte que le cortège ne soit infiltré par des sympathisants du groupe Etat islamique ou d’organisations terroristes locales, note le Straits Times.

Ahok, de confession chrétienne et d’ethnie chinoise, avait récemment critiqué des opposants politiques musulmans, qui avaient cité un verset du Coran pour l’attaquer en vue des élections gouvernementales de février 2017. Des propos interprétés comme une critique de l’Islam et de son livre sacré – ce qu’il a pourtant nié dans la foulée. Il s’est d’ailleurs de nouveau « sincèrement excusé » face aux médias hier jeudi 3 novembre, rapporte le Jakarta Globe. Malgré ce tollé, Ahok est très apprécié par les habitants de Jakarta qui voient en lui un gouverneur « propre et compétent », conclut le Straits Times.

Global New Light of Myanmar – Le quotidien d’Etat birman The Global New Light of Myanmar se félicite. Des diplomates internationaux ont enfin pu accéder au nord de l’Etat Rakhine, bloqué depuis près d’un mois. Le 9 octobre, l’attaque mortelle de postes-frontière à la limite du Bangladesh par des hommes armés avait incité les autorités à verrouiller l’accès du territoire aux ONG et aux diplomates, qui s’étaient plaint de la situation et avaient dénoncé des violations des droits de l’homme. D’après le quotidien d’Etat, les diplomates ont été satisfaits de leur visite, « aucunement entravée », et ont estimé qu’il était difficile de juger si les « accusation d’abus » exprimées à l’égard de l’armée étaient vraies ou fausses.

Parallèlement à ces nouvelles optimistes relayées par la presse étatique, le quotidien Mizzima informe qu’un autre poste-frontière a été attaqué hier jeudi 3 novembre dans le nord de l’Etat Rakhine, causant la mort d’un officier de police. Ce qui ne risque pas d’apaiser la situation – ni de présager l’ouverture prochaine du territoire aux ONG, toujours interdites de rendre dans la zone.

Straits Times – La nouvelle ne sort dans la presse qu’aujourd’hui mais remonte au 30 octobre. Depuis cette date, deux présumés militants du groupe Etat islamique – l’un originaire de Johor, l’autre du Sarawak – sont détenus à l’aéroport de Kuala Lumpur, après avoir été expulsés par la Turquie. Ils tentaient de traverser la frontière avec la Syrie lorsqu’ils ont été interpelés par les autorités d’Ankara. Le chef de la police malaisienne explique que leur arrestation est due au partage de renseignements entre les deux Etats.

Asie du Sud

Dawn – L’arroseur arrosé ? Imran Khan, leader pakistanais du parti d’opposition PTI (Pakistan Tehreek-i-Insaf), devra rendre des comptes sur sa société offshore destinée à l’achat d’un appartement au Royaume-Uni et pour éviter les taxes de Londres. Ce même Imran Khan qui n’a de cesse de critiquer le Premier ministre Nawaz Sharif pour son implication dans le scandale des Panama Papers – et ce, à tort et à travers, note le quotidien Dawn. Car Islamabad accuse la figure de l’opposition d’avoir « déformé les faits et les conclusions » de l’audition de la Cour suprême sur le Panamagate face aux médias.

Imran Khan avait notamment déclaré que Nawaz Sharif était explicitement nommé dans les documents divulgués par les journalistes et qu’il détenait une société offshore à son nom. De même, il avait accusé l’équipe du Premier ministre d’avoir fait pression sur la Cour suprême, en évoquant l’enjeu de la validité juridique des pétitions. En réalité, selon le quotidien, ce serait la Cour suprême elle-même qui aurait soulevé cette question, et Nawaz Sharif souhaité « ne pas entraver le cours de la justice ».

Indian Express – Le mystère s’épaissit autour de la mort des huit évadés islamistes de la prison de Bhopal, le 31 octobre dernier. Des enregistrements audio entre membres des forces de sécurité impliqués dans l’opération ont fait surface hier jeudi 3 novembre. On peut notamment entendre l’un des agents déclarer : « Encerclez-les et finissez le travail. » Si l’authenticité des enregistrements n’a pas encore été prouvée, ils viennent contredire les versions déjà livrées par le gouvernement et les témoins (voir notre revue de presse du 2 novembre). La bande son signale non seulement des coups tirés de la part des islamistes, mais révèle donc aussi que les forces de sécurité ont reçu l’ordre préalable d’abattre les individus rapporte The Hindu
Firstpost – Le 9 novembre prochain, la chaîne de télévision indienne NDTV sera suspendue pendant 24 heures à partir de 13h, sur décision d’un comité interministériel. En cause : la diffusion d’informations « sensibles » sur l’attaque de Pathankot en début d’année – essentiellement sur les armes stockées dans la base militaire attaquée par des terroristes. C’est la première fois qu’un média est sanctionné pour ce motif, note Firstpost, ce que le site d’information indien considère comme « regrettable ». Car cette sanction revient à considérer des « efforts journalistiques » comme des « actions anti-nationales » – ce qui rappelle les excès commis à l’encontre de la liberté de la presse lors de l’état d’urgence déclaré en 1975.
Par Joris Zylberman et Alexandre Gandil, avec Anda Djoehana Wiradikarta à Paris

Soutenez-nous !

Asialyst est conçu par une équipe composée à 100 % de bénévoles et grâce à un réseau de contributeurs en Asie ou ailleurs, journalistes, experts, universitaires, consultants ou anciens diplomates... Notre seul but : partager la connaissance de l'Asie au plus large public.

Faire un don
[asl-front-abonnez-vous]
[asl-front-abonnez-vous]