Corée du Sud : le chanteur folk Kim Kwang-seok s'est-il vraiment suicidé ?

Contexte
Mort trop jeune comme toutes les légendes du rock, Kim Kwang-seok continue de marquer les esprits en Corée du Sud. Ce documentaire réalisé à l’occasion des vingt ans de sa disparition en est une nouvelle preuve. Pour celles et ceux d’entre vous qui ne le connaissent pas encore, Kim Kwang-seok serait un mélange entre la fougue de Bob Dylan à ses débuts et la mélancolie de Vladimir Vyssotsky sur la fin.
Comme ses pairs américains et russes, le chanteur originaire de Daegu a en effet démontré qu’une voix nue et une guitare pouvaient à elles seules contribuer à changer des vies. La profondeur de ses textes mêlant les revendications sociales à une véritable empathie pour ceux et celles qui souffrent, résonne encore auprès d’une grande partie des Coréens, et notamment de la jeunesse sud-coréenne qui ne saurait se contenter des boys band d’ascenseurs et de la K-pop servi sur les plateaux télé.
Et comme d’autres rock stars disparues, Kim Kwang-seok n’a pas attendu l’âge du Christ pour se pendre à son domicile. C’était le 6 janvier 1996. Il avait 31 ans. Voilà en tous cas pour la thèse officielle, car deux décennies plus tard une partie des fans ne croit toujours pas à son suicide. A commencer par Lee Sang-ho dont le documentaire, Ireona ! – « Lève-toi ! » en coréen -, reprend le titre d’une des chansons phares du poète disparu.
Le réalisateur passe ainsi l’essentiel du film à promettre aux proches du défunt qu’il va tout faire pour trouver la vérité sur sa mort, cela sans véritablement y parvenir. Cinéma vérité, caméra subjective, de (trop) nombreuses questions restent sans réponse. Le réalisateur de Diving Bell confiait ainsi récemment au magasine Max Movie avoir voulu au départ courir le 100 mètres, avant que l’aventure ne se transforme en marathon à mesure que la ligne d’arrivée s’éloignait.
Les spectateurs que nous sommes en restent forcement un peu sur leur faim, même si là n’est pas l’essentiel. Car au-delà de l’enquête sur une mort que certains continuent de trouver énigmatique, c’est aussi toute la question du difficile chemin vers la vérité que pose Lee Sang-ho dans ce documentaire. Doté d’un doctorat de politique de l’université de Yonsei, notre confrère a passé vingt-et-un ans au sein de la rédaction de MBC, l’une des principales chaînes de télévision en Corée du Sud, avant de se faire mettre à la porte de son média suite à la reprise en main de la chaîne.
Aujourd’hui, Lee Sang-ho comme d’autres journalistes sud-coréens qui s’estiment victimes de remaniements politiques, démontrent qu’il est possible d’informer par d’autres moyens. Depuis cinq ans, Lee travaille ainsi pour le site Gobal News(« Révéler l’information »), spécialisé dans les enquêtes délaissées par les grands médias. Avec plus de 500 000 abonnés à son compte Twitter et ses documentaires pour le grand écran, Lee Sang-ho continue de poser les questions qui dérangent. Une façon aussi d’interroger la profession de journaliste aujourd’hui en Corée du Sud.

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