Taiwan : le voyage d’Eric Chu à Pékin fait toujours débat
Cette stratégie s’appuie sur le « consensus de 1992 », qui est pourtant soutenu par le KMT. Seulement ce « consensus » a tout de l’oxymore. Il y a 23 ans à Hong Kong, dans un communiqué commun, clair et obscur à la fois, Pékin et Taipei s’étaient entendus sur le concept d’une seule Chine, laissant chacun interpréter qui des deux gouvernements était le vrai représentant du pays.
En tout cas, la rencontre d’Eric Chu avec le numéro un chinois a eu le mérite d’électriser le débat politique à Taiwan. C’est comme si la campagne pour la présidentielle de janvier 2016 avait déjà commencé, alors que les candidats ne sont pas encore tous choisis. Eric Chu, notamment, n’est pas officiellement le candidat du Kuomintang. Or, pour le China Times (en chinois), c’est le mieux placé pour faire gagner son parti, exsangue après la débâcle des dernières élections locales fin novembre dernier.
Mais cela n’empêche pas le leader du KMT de monter allègrement au front, comme s’il était déjà en campagne. Le quotidien United Daily le montre se dresser en adversaire direct de Tsai Ying-wen, la candidate – investie, elle – du Parti Démocrate-progressiste (DPP). Pour M. Chu, Mme Tsai n’a aucun programme sur les relations entre Pékin et Taipei : elle se contente de « phrases vides » comme le « statu quo » dans les relations sino-taïwanaises. Des phrases qui cacheraient en fait une stratégie de « confrontatio », alors que lui prône la « coopération ».
Tout cela arrange beaucoup le gouvernement chinois. Le China Post rapporte que le Bureau des Affaires taïwanaises, l’organe chargé à Pékin de la réunification avec l’île, accuse aussi le DPP : sans programme, le principal parti de l’opposition devrait faire face à des « conséquences » s’il ne soutenait plus le principe d’ « une seule Chine ». Une façon de s’immiscer plus encore dans la campagne présidentielle taïwanaise. Les électeurs jugeront.
La rédaction d’Asialyst avec Victor Yu à Taipei
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