Revue de presse Asie - 1er mars 2016

"Confessions" des libraires hongkongais, Aung San Suu Kyi en mauvaise posture et conseiller pakistanais à Washington

manifestation organisée ce week-end contre la révision de la constitution birmane
Une manifestation a été organisée ce week-end contre la révision de la constitution birmane, qui permettrait à Aung San Suu Kyi de briguer la présidence. Copie d'écran du Straits Times, le 1er mars 2016.

Asie du Nord-Est

The Straits Times – C’est sa première déclaration publique depuis sa disparition en décembre 2015. Dans une interview diffusée hier par Phoenix TV, le libraire hongkongais Lee Bo s’est défendu d’avoir été « enlevé » par les autorités chinoises – contrairement à ce qu’avaient soupçonné le gouvernement de Londres et la communauté internationale…
Souriant, il a indiqué aux caméras s’être rendu en Chine continentale de son plein gré, en « recourant à l’immigration illégale » pour que sa visite « n’attire pas l’attention » des observateurs. Force est de constater l’échec de sa stratégie. Confirmant la version livrée précédemment à ses proches, Lee Bo a expliqué qu’il assistait les autorités chinoises dans une enquête contre 4 autres libraires hongkongais soupçonnés d’avoir diffusé sur le continent des livres critiques à l’égard de Xi Jinping et du Parti communiste – ce dont ils se sont eux-mêmes accusés dans une interview diffusée dimanche… sur Phoenix TV.
Channel News Asia – La bataille des mots continue entre les deux Corée. A l’occasion du 96e anniversaire du mouvement coréen d’indépendance contre la domination japonaise (créé en 1919), Park Geun-hye a déclaré que la paix sur la péninsule ne pouvait s’acquérir qu’au prix de sa dénucléarisation. Et alors que le Conseil de Sécurité de l’ONU doit voter aujourd’hui le plan américain de sanctions contre Pyongyang, la présidente sud-coréenne espère que son voisin du Nord « paiera le prix de ses provocations » ; c’est à dire de son test nucléaire de janvier et du lancement de fusée en février.
Nikkei Asian Review – Le PDG de la firme taïwanaise Honhai semble s’opposer à ses cadres au sujet du rachat de Sharp. Le géant japonais avait adressé un document secret à son acquéreur, qui aurait eu pour effet de retarder la transaction. Une source proche des discussions rapporte que certains membres de son groupe craignent pour la santé financière de Honhai, le rachat ayant pour effet de retarder ses investissements sur le court terme. Cependant, Terry Gou est connu pour garder ses positions face à ses cadres.
United Daily News – Alors qu’il était en visite aux Etats-Unis la semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères chinois, Wang-Yi, s’est exprimé devant le Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS) qui avait également reçu Tsai Ing-wen, alors en campagne électorale. Il a déclaré qu’il espérait voir « la présidente Tsai Ing-wen accepter le cadre constitutionnel de Taïwan selon lequel Taïwan et la Chine continentale appartiennent à une seule et même Chine », avant l’investiture de celle-ci prévue le 20 mai. Les termes employés par le ministre chinois et le lieu-même de sa remarque, ainsi que l’absence de référence au Consensus de 1992 (sur lequel Ma Ying-jeou a construit la stabilité récente des relations entre les deux rives avec l’assentiment de Pékin) ont provoqué un certain nombre d’interrogations à Taïwan. Selon Julian Kuo, un universitaire, député du DPP, la remarque en question ne laisse pas présager de changement politique fondamental de la part de Pékin. A l’inverse, pour la presse réputée indépendantiste, c’est l’annonce d’un assouplissement de la politique taïwanaise de Pékin. Et aujourd’hui, c’est le Bureau des Affaires taïwanaises, en charge à Pékin de la politique de réunification, qui a réagi, prévenant contre les surinterprétations de la remarque du ministre chinois. Pour les experts, il faut lire dans ce “couac” médiatique, rare du côté chinois, une absence de consensus à Pékin sur les futures directions à donner à la politique taïwanaise face à Tsai Ing-wen, élue le 16 janvier dernier avec une majorité du Parti démocrate-progressiste.

Asie du Sud-Est

Democratic Voice of Burma – Le calendrier a été avancé d’une semaine. C’est finalement le 10 mars que les parlementaires birmans éliront le Président de la République de l’Union du Myanmar, nom officiel de la Birmanie, a indiqué aujourd’hui le Président de la chambre haute. Un changement qui ne joue pas en faveur d’Aung San Suu Kyi, leader du parti victorieux aux élections législatives de novembre dernier (la Ligue nationale pour la Démocratie – LND), mais que les enfants de nationalité britannique empêchent d’accéder à la magistrature suprême en vertu d’une disposition constitutionnelle. Et malgré les efforts entrepris par la prix Nobel de la Paix 1991 depuis plusieurs semaines pour faire modifier l’article, à raison de rencontres répétées avec des représentants de l’armée, la cause est « désormais perdue » d’après les militants de son propre parti, rapporte Democratic Voice of Burma. Des centaines de militants ont d’ailleurs manifesté ce week-end contre la révision de la constitution. D’après plusieurs sources proches du pouvoir et de la LND, Aung San Suu Kyi pourrait donc embrasser le poste de ministre des Affaires étrangères. Cela lui permettrait d’obtenir un siège au Conseil national de Défense et de Sécurité et de représenter la Birmanie sur la scène internationale, analyse le Straits Times.
The Jakarta Post – C’était l’une des priorités du programme législatif national. Après que les attentats de Jakarta (janvier 2016) ont mis en lumière les insuffisances des lois antiterroristes de l’archipel, la Chambre des Représentants a décidé aujourd’hui de mettre en place un comité chargé de réviser cet arsenal juridique. Parmi les réformes souhaitées, la possibilité de détenir plus longtemps les individus soupçonnés de vouloir mener des attaques terroristes, quand bien même la police ne disposerait pas de preuves supplémentaires. Les défenseurs des droits s’inquiètent néanmoins des dérives inhérentes à un tel durcissement.
The Straits Times – C’est la deuxième fois de sa carrière qu’il quitte l’UMNO. L’ancien Premier ministre malaisien Mahathir Mohamad se retire de ce qu’il appelle « le parti de Najib Razak », son successeur indirect à la tête du pays. Une décision qui intervient dans le cadre d’une « chasse aux sorcières » menée au sein du parti contre tout responsable critique du Premier ministre actuel, empêtré dans des scandales de corruption. Aujourd’hui-même, le Wall Street Journal révèle d’ailleurs que les transferts frauduleux d’argent dont Najib Razak aurait bénéficié ne s’élèveraient pas à 681 millions de dollars, mais à plus d’un milliard, rapporte Channel News Asia… Mahathir Mohamad regrette que le parti « ne puisse plus être inquiété par la justice » et préfère s’en dissocier. Une décision prise hier mais pas encore actée par une note de démission, a indiqué le Secrétaire général de l’UMNO au Malay Mail Online.

Asie du Sud

NDTV – Un combat à la frontière du Telangana et du Chhattisgarh a opposé les forces de l’ordre des deux Etats à un groupe de Naxalites (des insurrectionnels pro-maoïstes). L’opération aurait été menée par les Greyhounds, une unité anti-maoïste de l’Etat de l’Andra Pradesh. Celle-ci était récemment à la recherche de Hari Kishan, l’un des commandants des forces maoistes en Inde. Le Telangana, le Chhattisgarh et l’Andhra Pradesh auraient agi de concert une fois avertis de sa présence dans les forêts de la région du Khammam (dans l’Etat du Telangana). Des mitraillettes modèle AK-47 et des explosifs auraient été retrouvées près des corps. Cinq femmes ont été tuées lors de cette opération.
Dawn – Le Dialogue stratégique Etats-Unis-Pakistan, en présence du Secrétaire d’Etat John Kerry, s’est déroulé à Washington. Le conseiller pakistanais aux Affaires étrangères Sartaj Aziz réclame plus de compréhension de la part des Etats-Unis sur sa position de puissance nucléaire. Il estime que n’importe quelle pression internationale envers le programme nucléaire de son pays devrait être également appliquée à l’Inde. Par ailleurs, la vente d’avions chasseurs F-16 au Pakistan permettrait de « combattre efficacement les terroristes de la région » selon Sartaj Aziz. Bien que John Kerry n’ait pas appelé à de plus fortes opérations contre les groupes armés au Pakistan, le conseiller rappelle que son pays est accusé de jouer un double jeu avec les groupes terroristes, une critique qu’il qualifie de « mode simplificatrice ».
Sunday Times – Elhhadj As Sy, président de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, visitera le Sri Lanka pendant trois jours, afin d’observer les différents services des ONG pour la reconstruction des zones post-conflit. Le programme de reconstruction de la Croix-Rouge avait mobilisé des fonds pour plus de 21 000 familles vivant dans le nord du pays.
Maldives Independent – La Cour criminelle des Maldives a refusé l’accès de trois reporters de journaux politisés aux bâtiments de la Cour criminelle. Selon les médias V News et Haaveru, la décision aurait fait suite à la prise de clichés du visage du président de la Cour, Abdul Bari Yoosuf, dont il aurait exigé la suppression. Abdul Bari Yoosuf est fortement critiqué par l’opinion publique pour avoir prononcé la condamnation à plus de 10 ans de détention des principaux membres de l’opposition politique, comme l’ancien président Mohammed Nasheed.
Par Alexandre Gandil et Ryôma Takeuchi, avec Hubert Kilian à Taïpei.

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