Politique
L'Asie du Sud-Est dans la presse

Malaisie : la Chine offre une base de contre-espionnage et fait tanguer l'ASEAN

Le Premier ministre malaisien Najib Razak serre la main du président chinois Xi Jinping lors de l'ouverture du Belt and Road Forum sur le projet de "Nouvelles Routes de la Soie", à Pékin le 15 mai 2017. (Crédits : AFP PHOTO / POOL / Kenzaburo FUKUHARA)
Le Premier ministre malaisien Najib Razak serre la main du président chinois Xi Jinping lors de l'ouverture du Belt and Road Forum sur le projet de "Nouvelles Routes de la Soie", à Pékin le 15 mai 2017. (Crédits : AFP PHOTO / POOL / Kenzaburo FUKUHARA)
C’est un bouleversement dans les rapports de force au sein de l’ASEAN. La Chine et la Malaisie prévoient d’installer à Johor une base de contre-espionnage comprenant un radar et un système de lance-roquette multiple. Avec Trump et la perte d’influence américaine dans la région, la Chine prend de plus en plus d’importance au sein de l’ASEAN en matière militaire.
« C’est la première fois que j’en entends parler. » C’est ce qu’a déclaré le secrétaire malaisien au Trésor Mohammad Irwan Serigar Abdullah à Reuters. Pourtant, selon une source gouvernementale malaisienne du site Malaysia Insight cité par le Straits Times, la Chine a bel et bien offert à la Malaisie jusqu’à 12 unités du système de lance-roquette multiple AR3 avec des radars. Il s’agit de construire une base militaire de contre-espionnage à Johor, la province malaisienne qui jouxte Singapour. L’offre a été proposée par le conseiller d’État chinois Wang Yong au Premier ministre Najib Razak, lors du lancement à Kuantan en Malaisie du projet de liaison ferroviaire de la Côte Est. Les discussions sont toujours en cours, précise le quotidien singapourien. La décision sera prise lorsque Najib Razak et le président chinois Xi Jinping se rencontreront en novembre prochain. En réalité selon le Straits Times, cette offre date de la rencontre en mai dernier entre Najib et Xi à Pékin lors du Forum sur les « Nouvelles Routes de la Soie ».
Cette proposition chinoise intervient en plein boom des relations économiques sino-malaisiennes. En mai justement, neuf accords commerciaux ont été signés entre la Malaisie et des entreprises chinoises, rappelle le Malay Mail Online. « Les engagement massifs d’investissement de la Chine ont démontré les résultats réels et transformateurs des excellentes relations que la Malaisie et la Chine ont construites, a déclaré le Premier ministre mardi 8 août sur son blog Najibrazak.com. La Chine est le plus grand partenaire commercial de la Malaisie. » La Chine est ainsi devenue un investisseur étranger majeur en Malaisie dans de nombreux secteurs, dont la manufacture, les services, les ports, les chemins de fer, l’immobilier, la construction, l’éducation ou l’énergie.
Rappelons que ces bonnes relations remontent à l’époque de Mao. Le père de Najib Razak avait rencontré le « Grand Timonier » en 1974 lors d’une visite en Chine, indique le Japan Times. A cette époque, la Malaisie faisait face à un mouvement de guérilla communiste. Abdul Razak Hussein, alors chef du gouvernement, a fait appel à Mao pour obtenir de l’aide. Depuis la famille Razak a entretenu une « relation spéciale » avec la Chine, précise le quotidien nippon.
Ce qui est nouveau dans l’offre de la Chine à la Malaisie, c’est son aspect militaire qui vient chambouler les luttes d’influence au sein de l’ASEAN. Jusqu’à maintenant, les pays membres de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est dépendaient de la Chine pour leur économie et des États-Unis pour leur défense. Un mouvement de bascule en faveur de Pékin est en train de s’opérer depuis la fin du pivot asiatique d’Obama et du retrait voulu par Trump du Partenariat transpacifique, le TPP. « Est-on en train de perdre l’ASEAN au profit de la Chine ? » s’alarme ainsi le Japan Times.  « La Chine est passée à la vitesse supérieure pour faire avancer ses projets et être un leader dans la région Asie-Pacifique », se félicitait récemment le ministre singapourien de la Défense. En outre, Pékin prévoit d’intégrer le port de Malacca dans son projet « One Belt One Road » – qui comprend une ceinture terrestre auroasiatique et une route maritime en mer de Chine du Sud. Les Chinois connaissent le potentiel militaire de ce port, prévient le Japan Times, et pourraient le transformer en base navale.
Par Iliana Pradelle

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