Politique
L'asie du Nord-Est dans la presse

Chine : décès de Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix 2010

Le 10 décembre 2010, alors qu'il reçoit le prix Nobel de la paix, la chaise de Liu Xiaobo est vide à Oslo.
Le 10 décembre 2010, alors qu'il reçoit le prix Nobel de la paix, la chaise de Liu Xiaobo est vide à Oslo. (Crédit : Heiko JUNGE / Scanpix / AFP).
La nouvelle était malheureusement attendue. Liu Xiaobo est décédé aujourd’hui jeudi 13 juillet des suites de son cancer du foie. Agé de 61 ans, il aura fait trembler jusqu’au bout le pouvoir sans frein de Xi Jinping et du Parti communiste chinois qui n’a jamais souhaité le libérer. Condamné à de multiples reprises, il purgeait une peine de 11 ans pour « subversion du pouvoir de l’État » – une charge et une condamnation bien lourde pour cet homme plus penseur que terroriste, plus légaliste que révolutionnaire.
Sa chaise restera vide pour toujours à Oslo.
Professeur de lettres, critique littéraire et surtout prix Nobel de la paix pour son engagement constant dans la lutte pour la protection des droits de l’homme, Liu Xiaobo restera comme une figure emblématique de l’opposition au régime chinois apparue en 1989.
Né le 28 décembre 1955 à Changchun dans la province de Jilin, il est diplômé de l’Université de Jilin en 1982 puis de l’Université normale de Pékin en 1988. En 1989, il rejoint les manifestants sur la place Tian’anmen à Pékin lors du « printemps de Pékin » et participe aux négociations avec le gouvernement pour un départ pacifique des contestataires. Après l’assaut sanglant et l’évacuation de la place, il est arrêté le 6 juin 1989 et passe 21 mois en prison.
Libéré, il épouse en secondes noces la poétesse Liu Xia qui lui apportera un soutien inconditionnel dans la suite de son engagement politique en dépit des risques qui y sont liés. Réincarcéré en 1996 pour avoir réclamé la libération de ses camarades de Tian’anmen encore en prison, il passe de nouveau trois ans en camp de travail.
Le plus grand acte militant mené par Liu Xiaobo est sans conteste sa participation à la rédaction de la « Charte 08 » – dont le texte intégral est à retrouver ici. Nommé d’après la « Charte 77 » écrite par des opposants Tchécoslovaques, ce document est un véritable réquisitoire contre le régime de Pékin.
« Les nombreuses catastrophes politiques qu’a connues l’histoire chinoise sont toutes intimement liées au mépris des droits de l’homme par les autorités au pouvoir. L’homme est la raison d’être de l’État ; L’État doit se mettre au service du peuple et le gouvernement exister pour le peuple. »
Le texte appelle à faire des notions de liberté, des Droits de l’homme, d’égalité, de « république » (soit la séparation des pouvoirs), de démocratie, de constitutionnalisme les principes fondamentaux d’une réforme en profondeur de l’État et de la société chinoise. S’en suit une proposition de « feuille de route » en 19 points, appelant notamment à la réforme de la constitution, la séparation des pouvoirs, la suppression de la tutelle du Parti communiste chinois sur la justice et la nomination des fonctionnaires, le respect des libertés individuelles ou encore la protection de l’environnement.
Accusé de « subversion du pouvoir de l’État », il est arrêté chez lui le 8 décembre 2008 et est condamné un an plus tard à 11 ans de prison. Il est envoyé dans un pénitencier de la province du Liaoning dans le nord-est du pays. En 2010, le prix Nobel de la paix lui est décerné en son absence. Lue durant la cérémonie, la déclaration qu’il a fait parvenir depuis sa prison rappelle qu’il n’a « ni ennemi ni haine ».
Malade, l’opposant n’est autorisé à quitter sa prison que le 26 juin 2017 pour soigner un cancer du foie pourtant diagnostiqué en mai. Pour ce que furent ces derniers jours, il a été autorisé à être entouré de quelques proches, en particulier sa femme mise en résidence surveillée depuis 2010. Néanmoins Pékin a refusé jusqu’à la fin de le laisser se faire soigner à l’étranger malgré la pression internationale, de peur qu’il n’utilise cet ultime séjour hors du pays pour dénoncer une dernière fois publiquement le régime.
Par la rédaction

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