Conférence à voir et à écouter
Podcast : Chinois de France, une citoyenneté en mutation
Quelle place dans la cité pour les Chinois de France ou les Français d’origine chinoise ? Comment au sein de cette communauté si diverse les différentes générations réagissent-elles à l’insécurité ? Quelles suites à donner à l’immense mobilisation de l’été 2016 après la mort de Zhang Chaolin ? Telles étaient les enjeux de la Conférence coorganisée le 28 janvier dernier à Paris par Asialyst, Le CERI de Sciences Po, l’association « Chinois de France – Français de Chine » avec le soutien de la mairie du 20ème. Retrouvez en podcast les principaux extraits de nos débats.
Les intervenants
Hélène Le Bail, chercheure à Sciences Po, CERI, CNRS.
Tamara Lui, journaliste et présidente de l’association « Chinois de France – Français de Chine »
Rui Wang, présidente l’association des Jeunes Chinois de France (AJCF)
Chuang Yahan, sociologue post-doctorante, GEMASS, université Sorbonne
A l’été 2016, le sentiment de colère des Asiatiques franciliens contre l’insécurité a pris une ampleur sans précédent, dont le point d’orgue fut la manifestation massive du 4 septembre à Paris, place de la République. Des dizaines de milliers de manifestants ont exprimé leur ras-le-bol de la violence et des clichés racistes, réclamant leur droit à la sécurité et à la fraternité dans la société française. Si la mobilisation n’est pas nouvelle, elle a pris une nouvelle ampleur après le décès de Zhang Chaolin suite à un vol avec agression par un groupe d’adolescents. Au-delà de la colère, se pose aujourd’hui pour les Chinois de France – ou les Français chinois – la question de la citoyenneté.
D’où viennent les Chinois d’Île-de-France ?
Quelles sont les origines précises des Chinois franciliens ? Où vivent les différentes communautés dans le Bassin parisien ? Hélène Le Bail, chercheure à Sciences Po/CERI/CNRS, explique l’évolution des migrations :
Qui manifeste et quelles sont les revendications ?
Pour la sociologue Chuang Yahan, l’évolution est claire : « Si l’on compare la manifestation de 2011 et celle de [l’été 2016], on voit une transmission entre les générations. Aujourd’hui, ce sont les jeunes Chinois qui expriment leur besoin d’intégration et d’être considérés comme des citoyens à part entière. » Rui Wang, président de l’Association des Jeunes Chinois de France, est plus direct : « Nous avons tellement vu nos parents fermer leur gueule que ça nous enrage ! »
D’où vient l’insécurité ?
« Les habitants d’Aubervilliers nous disent qu’ils ne voient jamais les policiers dans la rue ! » C’est ainsi que Tamara Lui, journaliste et présidente de l’association « Chinois de France – Français de Chine », explique ce sentiment d’insécurité très fort au sein de la communauté chinoise francilienne. Est-ce une question culturelle ? s’interroge-t-elle, en évoquant la Chine comme un « État policier » avec une présence constante des forces de l’ordre dans l’espace public, qui peut rassurer. « L’application de la loi pour les voleurs est trop laxiste » aux yeux de nombreux Chinois d’Île-de-France qui renoncent souvent à porter plainte et ne se sentent plus protégés, rapporte Tamara Lui.
Quelle implication dans la vie politique ?
« Dans l’arc-en-ciel des couleurs, il manquait le jaune ! » souligne avec humour Rui Wang. Pour le président de l’Association des Jeunes Chinois de France, « il faut des politiques français qui connaissent bien leur sujet », mais « pas question en revanche de jouer à l’asiatique de service ! » Tamara Lui rappelle, quant à elle, que les Français d’origine chinoise « ne sont pas si nombreux à avoir une carte d’électeur. A partir des élections municipales de 2014, on compte une dizaine d’élus d’origine asiatique, dont 3 à Paris », dans toute l’Île-de-France.
Une représentation « chinoise » dans la vie politique a-t-elle un sens ?
« Il n’existe pas de voix convergente ni une idée qui nous réunisse », nuance d’emblée Tamara Lui. Selon elle, il faut être conscient des « intérêts différents » entre les Chinois d’origine Wenzhou et les « Indochinois », par exemple. Mais parler d’une représentation « chinoise » en tant que telle n’est pas forcément le souhait de tous. Partisan du « droit à l’oubli » de la couleur de la peau, Rui Wang évoque l’exemple des frères Vergès : « Ils sont tellement brillants qu’on a oublié qu’ils sont asiatiques ! »
Par Stéphane Lagarde, Joris Zylberman et Nicolas Sridi (réalisation et montage vidéo)
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