Documentaire : "Revenir à Fukushima" ou le choix angoissé des familles japonaises
Entretien
Journaliste et auteur-réalisatrice, Marie Linton habite au Japon depuis six ans. Formée à Sciences Po et au Centre de Formation des Journalistes (CFJ) à Paris, elle a couvert la catastrophe du 11 mars 2011 dès le premier jour, notamment pour France 24, La Croix et Sciences et Avenir où son article de huit pages sur les « réfugiés du nucléaire » a été récompensé du prix de la fondation Varenne de la publication scientifique. Marie Linton a en outre réalisé les documentaires « Retour en zone rouge » en 2012 (Sciences et Vie TV), « Des robots au cœur de l’enfer de Fukushima » (RMC Découvertes) sur la question du démantèlement de la centrale. Outre son travail sur Fukushima, elle a réalisé un documentaire de 26 minutes sur « Le village des poupées » pour la télévision japonaise NHK World et un autre de 80 minutes pour RMC Découverte sur « La chute du Japon impérial ».
« Revenir à Fukushima » est diffusé ce jeudi 16 mars à 15h45 heure française sur France 5. Il sera disponible en replay pendant une semaine gratuitement sur le site de France 5.
Trailer – Revenir à Fukushima from kamiproductions on Vimeo.
Tout cela est extrêmement compliqué. Je ne suis pas épidémiologiste mais dans ce flou de débats d’experts, il existe différentes réponses et tout le monde ne va pas réagir pareil. Contrairement à la France où domine une discours catastrophiste, les réponses au Japon sont différenciées. Sur le terrain, après quelques années, on connait mieux les niveaux de dose de rayonnements radioactifs dans la région de Fukushima. Face à cela, les gens réagiront selon leur niveau d’attachement à leur terre natale, leur aversion au risque, le fait qu’ils aient des jeunes enfants, leur âge, leur sexe.
Mais il y a un troisième explication : la volonté de protéger la filière nucléaire. Cela dit, le programme de décontamination a commencé dès le gouvernement de gauche de Naoto Kan à partir d’août 2011. Kan est par la suite devenu un ardent anti-nucléaire. Pour sa part, l’actuel gouvernement de Shinzo Abe, au pouvoir depuis décembre 2012, a d’emblée déclaré qu’il voulait redémarrer la filière nucléaire. Dès son discours de soutien à la candidature de Tokyo pour les Jeux Olympiques de 2020, il a assuré que la situation à la centrale de Fukushima était « sous contrôle ». Cette politique du retour et de la réouverture des villes touchées participe de cette volonté de montrer qu’on maîtrise la situation, qu’on peut réparer une catastrophe nucléaire et qu’on peut donc redémarrer les réacteurs.
Si l’on veut créer une dynamique nouvelle, il conviendrait de faire de Fukushima un pôle d’excellence dans le démantèlement nucléaire. Les autorités ont permis l’ouverture de trois instituts de recherche de la Japan Atomic Energy Association (JAEA) à l’intérieur de la zone interdite. Un premier a déjà ouvert, un deuxième va ouvrir le 23 avril prochain à Tomioka et le troisième dans quelques années à Okuma. Pour l’instant, parmi les habitants, on le voit bien, il n’y a que les personnes âgées qui reviennent. Cela ne va pas du tout !
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