Japon : Ittôbori ou la sculpture de Nara
Contexte
Apparu durant l’ère Hôen (1135-1141), l’ittôbori, également appelé « sculpture de Nara », a connu son plus grand éclat au XIXe siècle. Toen Morikawa (1820-1894), né justement dans la première capitale durable du Japon (710-784), est considéré comme le sculpteur d’ittôbori le plus doué. Ces figurines sont peu à peu devenues des œuvres d’art, même si elles pouvaient encore faire le bonheur des enfants. Le jeune Shinichi, dans l’audacieuse nouvelle Les Jeunes Garçons de Junichirô Tanizaki, parue en 1911, ne propose-t-il pas à son camarade de classe – le narrateur – de jouer avec un animal fantastique, mi-homme, mi-chien, sculpté à Nara ? Suite à un déclin observé après la guerre de Quinze Ans (1931-1945), l’ittôbori a recouvré ses forces après 1950. La petite équipe d’artisans, dirigée par Ippei Matsumoto, perpétue la tradition en s’attachant à adapter leurs œuvres à l’ère du temps.
Des contours anguleux pour conserver leur vertu
Outre le cyprès hinoki, deux autres espèces d’arbre sont utilisées dans la fabrication des figurines d’ittôbori. Le camphrier, arbre divin, ainsi que le hiba. « Le hiba est cher, mais il est très fin, ce qui le rend facile à sculpter », souligne Ippei. Si, devenue rare dans l’Archipel, cette essence est importée des États-Unis, le cyprès hinoki et le camphrier proviennent quant à eux des forêts japonaises.
Dans la pièce dédiée à la sculpture veille une représentation d’un robot-soldat du Château dans le Ciel, film d’animation de Hayao Miyazaki. Ippei s’installe devant son établi. « Je pulvérise de l’eau sur le bois avant de sculpter, sans quoi les vaisseaux bloqueraient l’outil, ce qui nuirait à la qualité de l’ouvrage », explique-t-il. Les tiroirs de l’armoire à côté contiennent des dizaines d’outils en acier, à l’extrémité tranchante, servant à travailler le bois. Le sculpteur en saisit un et taille petit à petit la pièce de bois, calée sur une serviette, en détachant de minces morceaux à chaque coupe. « D’habitude, j’écoute de la musique en sculptant. J’aime beaucoup la pop qui passe sur la BBC », confie-t-il. Ce qui ne l’empêche pas, bien au contraire, de réaliser des œuvres admirables, en prenant soin de vérifier régulièrement leur conformité avec le plan.
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