Cambodge : une école, de sa génèse à son inauguration
Un projet qui résume une organisation
Avec Chao Seth, un entrepreneur qui a construit quatre cents écoles avec Enfants du Mékong, et Ratana, un autre partenaire historique, Augustin Jusot, dès l’été 2013, commence à chercher un terrain, épaulé par Martin Maindiaux, directeur Cambodge. Un an plus tard le premier morceau de terrain est acheté. « Il a donc fallu commencer à monter un dossier sur chaque partie du projet. Au début, nous faisions des maquettes en papier, puis des plans à l’échelle en nous inspirant de ce qui avait été fait dans un autre de nos centres, à Preah Vihear. »
A la même période, au siège de l’association à Asnières, Philippe et Blandine Labouret proposent leur soutien financier en prenant en charge la construction du nouveau centre. « Pour fêter cette magnifique nouvelle, nous avons porté un toast, heureux de pouvoir donner à ces enfants un centre plein de charme, organisé autour de foyers un peu autonomes dans une ambiance familiale pour ces jeunes issus de familles éclatées », explique Augustin.
Une histoire d’amitié
« Yves Meaudre a une phrase à laquelle je souscris entièrement qui est : ce n’est pas parce qu’ils sont pauvres qu’ils n’ont pas droit au beau » Philippe Labouret nous reçoit dans son bureau de l’avenue Montaigne à Paris.
Une amitié était née. S’il y eut des conversations parfois soutenues, quelques inévitables incompréhensions entre la France et le Cambodge, les échanges furent constructifs et permirent au projet d’évoluer. « Il n’y jamais eu de ruptures. En fait cette histoire témoigne que l’on peut parfaitement faire naître des amitiés grâce à un projet. » Pour Guillaume d’Aboville, « c’est une réussite totale » alors que tout semblait compliqué à mettre en place. « Le résultat est remarquable ! », ajoutent Blandine et Philippe Labouret. « Cette démarche qui consiste à faire des petits villages à échelle humaine, voilà notre vision pour transformer l’éducation de ces enfants. C’est en les accueillant dans de bonnes conditions que l’on peut mieux les éduquer et leur redonner une dignité et un avenir. Nous nous sommes un peu éloignés de ce qu’ils avaient connu dans leur village pour leur donner une dimension supérieure, une ouverture à un autre monde. Mais pour les artisans de cette construction, cela n’a pas été sans nuits blanches ! »
Été 2015, l’inauguration est envisagée pour le mois d’octobre mais, devant l’ampleur de la tâche qu’il reste à accomplir, il faut repousser l’échéance au printemps suivant. La fin de l’année arrive, on demande aux enfants du centre de dessiner ce qui, pour eux, manque d’essentiel. Les dessins sont parlants : plus d’espaces verts et un mât sur lequel hisser le drapeau national. Concordance des temps et des idées, les donateurs avaient fait la demande qu’un potager soit prévu et qu’une place centrale soit aménagée. Il faut faire mieux, et toujours plus vite. L’équipe a besoin d’aide et de sang neuf. Arthur, compagnon du devoir, vient prêter main forte pour assister l’entrepreneur local, inspecter les travaux avant, pendant et après leur réalisation en tant qu’expert technique, et finaliser le chantier.
« J’ai donné un coup de main parce que je n’arrivais plus à exercer mon métier dans le superficiel. Je ne pouvais plus construire des résidences, centres commerciaux et autres constructions du même type. Un Bambou m’a un jour raconté l’histoire du colibri qui essaie d’éteindre un feu de forêt. Alors qu’il est tout seul à affronter les flammes et que tout le monde fuit, on se moque de lui mais il répond simplement : « je fais ma part ». C’est ça que j’ai voulu faire avec Enfants du Mékong. Nous avons pu finir dans les temps. »
Une inauguration festive et familiale
Une cérémonie d’une telle ampleur a nécessité une préparation minutieuse, menée par Marine et Adrien, couple de Bambous responsables du centre de Samrong. Plutôt que de se contenter de quelques discours et d’un déjeuner festif, le couple a voulu replacer les enfants au cœur de cette journée. « L’important était de créer un lien entre Blandine et Philippe Labouret et les enfants, à travers des jeux, des spectacles, des échanges de cadeaux après la partie officielle », explique Adrien. Quand le ministre et les personnalités officielles ont quitté les lieux, une autre ambiance, plus familiale, pétille. Les donateurs ont été placés dans des équipes et se sont prêtés au jeu d’une olympiade cambodgienne avec application. « ll n’y avait plus de donateurs et d’enfants pauvres. Tous, nous étions soit partenaires, soit adversaires. Nous jouions sur un pied d’égalité. La soirée avec des témoignages magnifiques, le dîner et les danses autour du mât sont des images qui resteront toujours dans nos cœurs », ajoute l’heureux donateur.
Heureux, les enfants le sont aussi, à en croire leurs responsables de centre. « Je voulais que tous soient fiers de nos enfants ! » insiste Marine, « et je crois que cela a été le cas ! » Enthousiaste, Guillaume d’Aboville tente une synthèse d’un projet né il y a trois ans dans un endroit très pauvre du Cambodge. « Ce projet, c’est une explosion de talents : un mécène spécialiste de l’immobilier, un architecte, un paysagiste, un Bambou chef de chantier, un maitre d’œuvre khmer, un directeur Cambodge naturalisé Khmer, une direction générale impliquée, un compagnon du devoir, des autorités locales investies, et tout ce petit monde qui décide de travailler ensemble pour que l’avenir de plus d’une centaine d’enfants soit imaginé différemment. »
« C’est quand on connaît très bien les responsables qu’on a envie d’être généreux. Et on a envie de l’être parce que c’est l’affection qui nous lie. Là, on est heureux de donner ! », conclut Philippe Labouret.
Dans les yeux des acteurs de ce projet brille un sentiment de fierté collective. À observer ces jeunes jouer au foot sous le grand mât, étudier dans ces salles de classe bien tenues, travailler à la bibliothèque ou biner le potager, il est impossible d’imaginer d’où ils viennent. Ce n’est pas parce qu’on est pauvre, que l’on n’a pas le droit au beau.
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