Urgences au Japon
Contexte
D’après l’Agence des sapeurs-pompiers, en 2007, 1 074 victimes graves ont été refusées par plus de dix hôpitaux avant d’être admises, la majorité en zones urbaines et de 18 heures à 6 heures du matin. En cause ? Surtout des difficultés de traitement et un manque de lits. Une femme a même été rejetée 26 fois à Tokyo et a dû patienter pendant 3 heures 37 avant d’être prise en charge. Les services d’obstétrique étaient également concernés. Le 29 août 2007, une femme enceinte souffrant de douleurs abdominales a ainsi été refusée par neuf établissements et a fini par accoucher d’un enfant mort-né. Suite à ces incidents répétés en 2006 et 2007, le gouvernement et les départements ont pris conscience de la nécessité d’améliorer le système de transport et de soins d’urgence. Mais qu’en est-il aujourd’hui ?
428 victimes graves refusées par plus de dix hôpitaux en 2014
Le nombre de services et de personnels médicaux d’urgence ne cesse d’augmenter. Mais selon le ministère japonais de la Santé, le nombre de médecins est encore insuffisant dans 6,3 % des hôpitaux du pays. L’évolution n’est pas semble-t-il à la hauteur de la vague du vieillissement. Les personnes âgées représentent depuis le début des années 2010 plus de la moitié des victimes transportées par ambulance, contre le tiers dans les années 1990. Un autre problème se pose. « Même pour des symptômes légers, certaines personnes utilisent les ambulances comme des taxis, ce qui perturbe le fonctionnement des services médicaux », explique Hidenobu Matsuzaki, étudiant en médecine qui travaille en tant qu’assistant administratif dans un hôpital du département de Gunma.
Des services de nuit assurés uniquement par des étudiants ?
Qu’en est-il des conditions de travail de ces étudiants en médecine ? « Mon salaire mensuelle s’élève à 38 000 yens [280 euros]. Je suis si pauvre que je n’arrive pas à vivre sans faire de garde », confiait Eijirô Saitô, l’interne du manga. De quoi gagner deux fois plus, en une seule nuit. « Peu d’étudiants en médecine font des petits boulots dans les hôpitaux, car leur famille est relativement à l’aise financièrement », nuance Hidenobu Matsuzaki. « La majorité de ces étudiants gagnent de l’argent en faisant des cours privés ou des cours dans des écoles de soutien. » Un cours particulier étant rémunéré entre 1 800 et 5 000 yens par heure (entre 14,50 et environ 40 euros). Ce qui n’est pas le cas de Hidenobu, qui travaille de 17h à 8h30, pour un salaire de 800 à 1 000 yens par heure (de 6,50 à 8 euros), et 25% de plus de 22h à 3h.
Répartition déséquilibrée des médecins
En plus de la concentration irrégulière des médecins, peu présents dans les zones rurales, leur répartition au sein des différents services a aussi un impact. « Il y a un manque de pédiatres, de gynécologues et de médecins urgentistes, car ils n’ont pas de bonnes conditions de travail », indique Hidenobu Matsuzaki.
Des solutions et une réelle volonté
Pour résoudre les dysfonctionnements de communication entre services de secours et centres hospitaliers, les nouvelles technologies peuvent faire des miracles. Le département de Saga a par exemple lancé un service efficace en 2011. Sur place, les ambulanciers cherchent sur leur tablette un établissement adéquat, en fonction des symptômes de la victime et de la disponibilité des médecins. Résultat ? Le temps de transport à l’hôpital a été réduit, tout comme les coûts opérationnels. De quoi faire d’une pierre deux coups. Reste désormais à généraliser ce nouveau système dans les autres départements.
Le 11e « plan pour la santé et les services médicaux dans les régions reculées », qui court de 2011 à 2015, incite aussi les bureaux des départements à poursuivre leurs efforts. Car si le nombre de zones et de personnes impactées diminue, 136 000 habitants étaient encore à plus d’une heure d’un établissement médical en 2009. Si le bilan définitif n’a pas encore été publié, les premières données pour ce plan quinquennal indiquent de bons résultats. Verdict définitif dans quelques mois.
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