Années France-Corée : le document oublié
Invention de l’imprimerie
Bibliothécaire « espionne »
Le livre en question fait partie du programme « mémoire du monde » de l’UNESCO. Il appartient surtout au fond ancien de la bibliothèque. Autrement dit, impossible de le manipuler sans la présence d’un conservateur. L’intervention de ce dernier et la préparation du tournage sont facturés 220 euros de l’heure. Le producteur nous interrompt : « Ce n’est pas un problème d’argent, nous étions disposés à payer ! C’est un problème politique ! Quand Madame Park a redécouvert le livre dans les réserves de la bibliothèque à la fin des années 1960, ils l’ont accusé d’espionnage. » Décédée en 2011, Park Byung-sun a effectivement travaillé à la BNF sur le fond oriental et a contribué dans les années 60 à la redécouverte du Jikji, révélé une première fois au public en 1901 par Maurice Courant dans sa célèbre Bibliographie coréenne. En 1972, la Bibliothèque Nationale de France lui consacrera une exposition, et depuis plus rien !
Patate chaude diplomatique
Des autorisations à la gueule du scénario, des conservateurs seuls maîtres à bord et probablement très (trop?) sollicités par les demandes de tournage venues de Corée… « Ce sont les règles de la BNF et nous ne pouvons pas interférer », nous expliquera plus tard d’une voix hésitante le service de presse du Centre Culturel Coréen à Paris. Il est vrai que le sujet est sensible. Le centre est responsable de la programmation de ces années croisées avec les Instituts Français. « On réfléchit à ‘faire quelque chose’ autour du Jikji l’année prochaine, à l’occasion de l’année de la France en Corée, poursuit notre interlocutrice. Ce n’est pas sûr, pour l’instant, on ne sait pas. »
« Aucune promotion n’est organisée autour du Jikji… la BNF ne fait pas son travail de vulgarisation auprès du public », se lamente encore Kevin Chang. Les 38 pages du livre attribuées au moine bouddhiste Seon Baegun restent en effet une patate chaude entre Paris et Séoul, alors que certains en Corée militent pour le retour de l’imprimé au pays. Difficile dans ces conditions de mettre le sujet sur la table alors qu’on célèbre le 130ème anniversaire des relations diplomatiques entre la Corée et la France.
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