Tensions en "mer de l’Est" : que peut faire le Vietnam ?
Contexte
La Chine revendique 90% de la mer de Chine orientale et méridionale, au détriment de ses voisins japonais, vietnamien et philippin, entre autres. Depuis plus d’un an, elle intensifie ses constructions sur les îlots semi-immergés qui sont également revendiqués par le Vietnam, les Philippines, Taïwan, la Malaisie, l’Indonésie, le Japon et Brunei. Au-delà des disputes d’appartenance territoriale, c’est l’ambition chinoise qui inquiète tout le monde. Pékin a unilatéralement établi ses Zones économiques exclusives (ZEE), ses zones de défense d’identification aérienne (en anglais ADIZ), ses règlements et autres interdictions de pêche.

La Chine :
« Avion étranger… Ici la marine chinoise… Vous approchez de la zone militaire d’alerte… Ici, la marine chinoise, ici, la marine chinoise… S’il vous plait, quittez rapidement cette zone pour éviter des malentendus. [Puis, moins polie, moins patiente, presque crié] Partez, partez, vous devez partir… »
Les Etats-Unis :
« Ici, la marine américaine… Identifiez-vous… Nous opérons en dehors de votre espace aérien national conformément aux régulations et lois internationales…. »
La Chine sous pression internationale
L’image n’est pas fausse mais elle commence à changer. Les derniers développements en mer de Chine méridionale y contribuent. Pékin intensifie la construction sur les îlots d’infrastructures artificielles à caractère visiblement militaire. Les Etats-Unis, désormais plus « offensifs », montrent un peu plus les dents à la Chine. Ils rendent plus concrète la politique du « pivot » américain vers l’Asie-Pacifique.
« Les Etats-Unis ont choisi le bon argument pour contrecarrer l’ambition plutôt belliqueuse des Chinois, analyse le politologue belge Bruno Hellendorff du Group of Research and Information for Peace and Security (GRIP). Washington s’engage à protéger la liberté de circulation maritime et aérienne. Cet argument est imparable sur le plan politique mais aussi du droit ! »
Eviter de prendre partie entre les « buffles »
L’Union européenne en médiateur ?
Mi-mai. Direction Paris pour une conférence sur les « Nouvelles tensions en mer de Chine méridionale », organisée par l’IRIS
et la Fondation Gabriel Péri. Les intervenants jugent nécessaire une médiation pour faire baisser la tension, et rendre la Chine plus raisonnable, plus enclin à discuter à la lumière du droit international. C’est l’avis de l’Indien Baladas Ghoshal, directeur de la Society of Indian Ocean Studies de New Delhi : « Les médiateurs neutres ne manquent pas, qu’ils viennent des Nations Unies, de l’UE, ou même de la Suisse et pourquoi pas de Singapour. Mais l’action la plus rapide face aux activités chinoises devra venir certainement des pays de l’ASEAN et de son organisation. Son rôle sera crucial dans les règlements éventuels des disputes. Car les réactions des pays de l’ASEAN toucheront directement la Chine : relation diplomatique, échanges économiques et même influences politiques. Le problème est que la Chine essaie de mettre l’ASEAN dans son giron et de la diviser — avec succès — afin d’éviter toute condamnation contre elle. Mais les choses vont peut-être évoluer… » L’ambassadeur français pour la Communauté du Pacifique, Christian Lechervy, intervient :
« L’UE pourrait très bien servir de médiateur. Elle l’a fait avec succès au Timor-Oriental et dans d’autres régions du monde. »
Le Vietnam, la stratégie philippine et le rôle de l’Inde
Face aux tensions maritimes, le reste de la région asiatique est loin de rester neutre. L’Inde vient d’attribuer au Vietnam une ligne de crédit pour des équipements militaires, notamment en matière de défense maritime. Pour le Pr. Prabhakar Williams, du Centre d’étude stratégique de l’Asie à New Delhi,
« L’Inde soutient et soutiendra les Philippines, le Vietnam, le Japon et les autres pays dans la démarche juridique internationale. L’Inde est une puissance régionale et possède des intérêts stratégiques en mer de Chine. Notre pays ne laissera pas un autre Etat, quel qu’il soit, s’en emparer. L’Inde veut contribuer à garantir la libre circulation sur cette mer. Elle fera tout pour cela… »
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