Revue de presse Asie - 21 juin 2016

Village rebelle chinois, Droits des Rohingya et soft power du yoga

Le "village rebelle" de Wukan avait déjà été le théâtre de manifestations en 2011. Copie d'écran du South China Morning Post, le 21 juin 2016.
Le "village rebelle" de Wukan avait déjà été le théâtre de manifestations en 2011. Copie d'écran du South China Morning Post, le 21 juin 2016.

Asie du Nord-Est

South China Morning Post – Une première dans l’histoire récente de la couverture médiatique des mouvement sociaux en Chine. Les médias de Hong Kong sont directement tenus responsables d’avoir « dirigé » des protestations de masse sur le territoire chinois continental, rapporte le South China Morning Post. The Apple Daily et Initium Media sont les médias incriminés. Les autorités « prendront des mesures conformément à la loi », a indiqué un officiel de la province du Guangdong lors d’une conférence de presse mardi 21 juin.

Le weekend du 25 juin, le leader du village, Lin Zuluan, avait été arrêté par les autorités chinoises. Cette arrestation a entraîné de nouvelles mainfestations affirme le quotidien hongkongais. De nombreux correspondants de médias de Hong Kong et d’outre-mer sont venus couvrir la colère de 2 000 villageois qui demandent à récupérer leurs terres confisquées par le gouvernement chinois. Wukan avait fait la une de la presse internationale en 2011, rappelle le South China Morning Post. Les habitants en révolte contre les expropriations de terres avaient littéralement bloqué l’entrée du village et exiger l’élection libre du chef de la cellule locale du Parti, le poste de direction dans les villages. Lin Zuluan, leader populaire, avait été élu et accepté par la direction centrale du PC chinois, en échange du respect de l’autorité du parti.

Mais l’affaire s’est récemment compliquée. Le Straits Times rapporte que le Lin Zuluan a avoué ce mardi 21 juin avoir accepté des pots-de-vin. Plusieurs villageois sont sceptiques, soupçonnant une confession forcée. « C’est ma plus grande activité criminelle », déclare Lin Zuluan dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux chinois. Des proches de Lin affirment, sous couvert d’anonymat, que le petit-fils du leader villageois a également été arrêté.

Pour conclure, le Straits Times rappelle que l’événement de 2011 s’était déroulé sous la présidence de Hu Jintao. Le journal singapourien se demande quelle tournure prendront les événements sous la direction de Xi Jinping, qui a « accentué la répression » politique en Chine depuis son accession au pouvoir.

Straits Times – Une audience sans précédent s’est ouverte ce mardi 21 juin à Séoul. D’un côté, les services de renseignement sud-coréens (National Intelligence Service – NIS) et de l’autre, une association d’avocats appelée Lawyers for a Democratic Society qui représente 12 femmes, ex-employées d’un restaurant nord-coréen en Chine et qui auraient déserté leur pays. Selon les avocats, elles seraient détenues illégalement par le NIS, en contradiction avec les droits de l’homme. Les avocats ont pu joindre les familles nord-coréennes des 12 femmes. Ils ont demandé à pouvoir communiquer avec elles mais le NIS a refusé, arguant d’une situation trop sensible. De façon inédite, cette audience vient traduire sur le plan judiciaire la brouille entre les gouvernements du Sud et du Nord. Officiellement, pour Séoul, ces femmes sont des réfugiées, tandis que Pyongyang soutient qu’elles ont été « enlevées » le 4 avril par la Corée du Sud.

Les avocats agissent-ils pour le compte de la Corée du Nord ? Selon la BBC, rien ne permet de dire qu’ils sont manipulés. Cette association qui rassemble 900 avocats, a pignon sur rue à Séoul. S’il est vrai, concède la BBC, que ces avocats ne sont pas favorables au gouvernement de centre-droit de Park Geun-Hye, ils déclarent vouloir protéger les droits fondamentaux de ces réfugiées.

Désormais, l’enjeu est de savoir si cette audience va créer un précédent qui modifiera la procédure de détention des réfugiés nord-coréens en Corée du Sud. D’après le Strait Times, chaque année, pas moins de 30 000 personnes fuient la Corée du Nord et passent par un camp de réinsertion en Corée du Sud.

Mainichi Shimbun – La nature s’acharne sur Kumamoto. De fortes pluies ont frappé la préfecture du sud-ouest du Japon ce lundi 20 juin, entraînant la mort de 4 personnes, un blessé grave et un disparu. Les habitants des zones les plus touchées par les averses diluviennes ont été évacuées dans des centres d’accueil d’urgence. L’Agence nippone de Météorologie a publié un avis faisant état de « fortes précipitations record sur un court laps de temps », rapporte le Mainichi Shimbun. L’Agence prévoit également des risques de glissement de terrains.

Cette catastrophe intervient seulement deux mois après les tragiques séismes des 14 et 16 avril qui avaient entraîné la mort directe de 49 personnes, de nombreux blessés et l’évacuation d’une centaine de milliers de personnes, dont plus de la moitié toujours pas relogée dans des conditions normales (voir notre revue de presse du 14 juin).

Asie du Sud-Est

Myanmar Times – La question des Rohingya vient une fois de plus bousculer le gouvernement d’Aung San Suu Kyi. Hier lundi 20 juin, le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies a publié un rapport sur la situation des minorités en Birmanie. L’ONU avertit que les « violations massives des droits fondamentaux » de la minorité musulmane pourraient être qualifiées de « crime contre l’humanité ». Outre la suppression de la nationalité aux Rohingya depuis mars 2015 (voir notre article), le rapport dénonce les exécutions sommaires, enlèvements, arrestations et détentions arbitraires, torture, mauvais traitements et travail forcé.

Si le haut-commissaire aux droits de l’Homme des Nations Unies Zeid Ra’ad Al Hussein s’est dit optimiste dans la lutte contre ces violations de droits à la lumière des récentes déclarations officielles, il souligne que le combat sera difficile. Le gouvernement birman, reconnaît-il, a « hérité d’une situation où les lois et les politiques mises en place renient les droits fondamentaux des minorités et où l’impunité des violations des droits de ces communautés encourage la violence à leur égard », selon des propos rapportés le Myanmar Times. Pour le haut-commissaire, la lutte contre les violations des droits des minorités birmanes doit constituer une priorité absolue. Le rapport pointe du doigt les appels à la haine toujours plus intenses contre les Rohingya de la part des ultra-nationalistes bouddhistes dans l’Etat de Rakhine.

Hier, lundi 20 juin, le porte-parole du gouvernement U Zaw Htay a déclaré « rejeter fermement » la qualification de « crime contre l’humanité ». Selon lui, de telles déclarations ne font qu’envenimer la situation. Il appelle à la solidarité de la communauté internationale sur cette « question difficile ». De son côté, le ministère des Affaires étrangères a déclaré préparer un dossier pour s’opposer au rapport du Conseil des droits de l’Homme.

Bangkok Post – La liste est longue. Les griefs d’Atiya Achakulwisut, éditorialiste au Bangkok Post sont nombreux. Pêle-mêle, la journaliste énumère la décision du ministère thaïlandais de la Justice d’enlever la méthamphétamine de la liste des drogues dangereuses. Mais aussi l’arrestation ratée d’un blanchisseur d’argent « influent » ou encore l’utilisation de la « Section 44 » qui fait passer de 12 à 15 ans la gratuité des frais de scolarité, alors que le projet de la nouvelle Constitution a bloqué le chiffre à 12 ans. Toutes ces mesures et affaires font dire à Atiya Achakulwisut que le « système judiciaire thaïlandaise est en train de s’écrouler ».

« Les Thaïlandais sont conscient que le processus judiciaires rencontre de grandes difficultés », souligne l’éditorialiste, pour qui la justice de son pays est « archaïque » et « secouée par le « favoritisme ». Quelle est l’utilité, se demande la journaliste, de voter pour une nouvelle Constitution si elle peut être modifiée ? « Si la loi la plus fondamentale peut être traitée comme un jouet, quel espoir pouvons-nous encore avoir dans la justice ? » s’interroge-t-elle.

The Jakarta Post – Les relations entre Pékin et Jakarta ont tous les ingrédients du dialogue de sourd. Les autorités indonésiennes ont affirmé qu’il n’y avait rien à négocier avec la Chine sur les îles Natuna, rapporte The Jakarta Post ce mardi 21 juin. Pékin revendique l’archipel des îles Riau, arguant que c’est une zone de pêche traditionnelle de la Chine. Une zone qui n’est pas reconnue par l’Indonésie. Jakarta a annoncé, lors d’une conférence de presse, s’entretenir avec des experts de la mer pour trouver les meilleures solutions afin de résoudre la « pêche illégale généralisée » par les chalutiers chinois.

La Zone économique exclusive, qui comprend les îles Natuna, est fondée sur la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, rappelle les autorités indonésiennes. Vendredi 17 juin, les autorités indonésiennes ont appréhendé un bateau chinois vers les îles Natuna, revendiquées par les deux pays.

Pour mieux comprendre les raisons de la discorde, lire notre revue de presse du 20 juin.

Malysiakini – Bill Kayong avait été un candidat malheureux pour l’élection à la tête de l’Etat du Sarawak. Membre du parti de l’opposition, le People’s Justice Party (PKR), Kayong a été tué ce mardi 21 juin à Miri. Il s’est fait tirer dessus à un feux de signalisation près d’un centre commercial. Il est mort sur le coup, affirme le Malaysiakini, s’appuyant sur un communiqué officiel du PKR. Le PKR qui a demandé aux autorités de faire le nécessaire pour arrêter les responsables de cet assassinat.

Le parti d’opposition a tenu à rendre hommage à ce « militant qui mettait en lumière les problèmes que rencontraient les Sarawakiens, notamment les droits coutumiers indigènes (NCR) ». Les NCR permettent aux populations indigènes du Sarawak d’être propriétaires de leurs terres.

Pour l’heure, les raisons du meurtre sont encore inconnues. Mais le débat autour de l’accès aux armes à feu n’a pas tardé à revenir sur la table, affirme le Malaysiakini.

Asie du Sud

Firstpost – Narendra Modi était lui-même en tenue pour célébrer le yoga. Le premier ministre a rejoint plus de 30 000 adeptes à Chandigarh ce mardi 21 juin lors de la journée internationale du yoga. Il a exhorté la population à la pratique de ce sport ancestral pour bénéficier d’une « meilleure santé physique et mentale », rapporte The First Post.

Le leader indien s’est adressé à la foule, soulignant que le « yoga devait faire partie intégrante de la vie de chacun, à l’instar du téléphone portable ». Un discours sous haute surveillance, précise Firstpost, puisque le complexe était surveillé notamment par des paramilitaires. D’autres membres du gouvernement de Narendra Modi ainsi que du BJP ont également participé aux exercices d’étirements à travers le pays, note le quotidien indien.

Le gouvernement indien fait la promotion des vertus du yoga depuis quelques années, incitant à sa pratique, rappelle le journal indien. Sur les réseaux sociaux, les publications qui vont dans ce sens fleurissent, notamment sur le compte Twitter du Premier ministre lui-même.

Cet article du Hindu rappelle que New Delhi a décidé de faire du yoga, le fer de lance de son soft power. A New York, le building des Nations unies arborait un pictogramme en forme de position de yoga.

Dawn – La situation est toujours tendue entre les deux pays. Pour les autorités pakistanaises, les camps de réfugiés afghans au sein du Pakistan, sont devenus un vrai problème pour Islamabad, rapporte Dawn. La destruction des infrastructures militaires dans les zones tribales serait la cause des maux pakistanais. Des destructions attribuées aux forces armées afghanes et qui ont débouché sur des « mouvement non régulés » de personnes.

« Si la frontière afghane continue à ne pas être contrôlée, nos zones tribales ne pourront être sécurisées », a averti Islamabad qui a aussi appelé au retour des réfugiés afghans. Un retour qui devra se faire « graduellement » avec un plan d’action par le Pakistan, précise Dawn. Une réunion entre les deux pays, menée « amicalement », a eu lieu hier lundi 20 juin. Les deux parties ont accepté de développer un « mécanisme pour contrôler la frontière ».

Cette réunion intervient dans un contexte général tendu entre les deux pays voisins. La semaine dernière a été marquée par des échanges de tirs entre les forces afghanes et pakistanaises à la frontière de Torkham, symbole des problèmes de frontière non contrôlée, et terreau des tensions entre le Pakistan et l’Afghanistan (lire notre revue de presse du 16 juin).

Firstpost – Le geste risque de ne pas plaire à la Chine. Les Etats-Unis ont officiellement appellé les membres du Groupe des fournisseurs de nucléaire (NSG) à voter pour l’adhésion de l’Inde. Une adhésion que Pékin a toujours refusée, rappelle Firstpost. Le NSG est actuellement réuni à Séoul pour un sommet qui s’est ouvert hier lundi 20 juin. Mais Pékin a affirmé que la question de l’entrée de l’Inde au NSG n’était pas à l’ordre du jour.

La Chine reste campé sur ses positions : le pays candidat doit être signataire du Traité de non-prolifération nucléaire pour entrer au NSG. Ce qui n’est pas le cas de New Delhi. Mas les Etats-Unis pensent que l’Inde « est prête à intégrer le NSG », confortés par la réunion entre Narendra Modi et Barack Obama à Washington, plus tôt dans le moins, rappelle Firstpost.

Par Joris Zylberman, Liu Zhifan et Jeremy Masse, avec Anda Djoehana Wiradikarta à Paris

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