Revue de presse Asie - 14 juin 2016

Guerre d'ambitions nucléaires sino-indiennes, Rohingyas birmans et soldats chinois

C'est le deuxième ressortissant canadien exécuté par le groupe terroriste Abbu Sayyaf. Copie d'écran de Channel News Asia, le 14 juin 2016.
C'est le deuxième ressortissant canadien exécuté par le groupe terroriste Abbu Sayyaf. Copie d'écran de Channel News Asia, le 14 juin 2016.

Asie du Nord-Est

Global Times – La Chine dévoile son jeu sur les ambitions nucléaires indiennes. Dans un éditorial, le quotidien officiel Global Times lance un avertissement à l’Inde, qui cherche en ce moment à intégrer le Groupes des fournisseurs de nucléaire (NSG). Améliorer le pouvoir de dissuasion indien conduirait ainsi à « juguler l’action chinoise », accuse le journal chinois. La phrase qui a choqué les médias indiens, notamment le Times of India et The Hindu qui reprenne l’éditorial en Une de leur site Internet.

Le Premier ministre Narendra Modi fait actuellement le tour des pays membres NSG, et milite pour l’adhésion de son pays. La prochaine session plénière du Groupe aura lieu à Séoul le 24 juin. Si la candidature indienne est soutenue par les Etats-Unis, le refus de la Chine « irrite » New Delhi, selon Wang Wenwen, l’éditorialiste du Global Times. Pékin insiste pour que les membres du NSG soient signataires du traité de non-prolifération nucléaire, ce qui n’est pas le cas de l’Inde, qui voit la position chinoise comme « obstructionniste », précise Wang.

L’ambition indienne, en candidatant au NSG, est de permettre à son programme nucléaire national d’ « accéder au marché international », rappelle le Global Times. Les Etats-Unis, premier producteur mondial du secteur, soutiennent l’Inde parce qu’ils « pourraient [lui] vendre [leur] technologie nucléaire », insiste Wang Wenwen. Des compagnies américaines sont en effet sur le point de construire six réacteurs nucléaires en Inde, après la récente visite de Narendra Modi aux Etats-Unis.

Plus généralement selon le quotidien chinois, Washington voit l’Inde comme un « acteur majeur » dans sa politique du pivot en Asie-Pacifique. Les Etats-Unis et l’Inde « oublient les préoccupations pour la sécurité de la région, enlisée dans une confrontation nucléaire », accuse l’éditorial. L’Inde et le Pakistan sont les « deux puissances nucléaires de la région », précise Wang Wenwen avant d’ajouter qu’une adhésion de l’Inde au NSG mettrait Islamabad « sur les nerfs ». La Chine « insiste pour un développement pacifique », mais si New Delhi arrivait à intégrer le NSG, « une course atomique aurait lieu avec le Pakistan, paralyserait la sécurité régionale et mettrait en danger les intérêts nationaux chinois », avertit enfin l’éditorialiste chinois. Et de conclure : « Seul un engagement bilatéral entre l’Inde et le Pakistan sur une non-prolifération nucléaire peut éviter de faire basculer la région dans une confrontation nucléaire. » Narendra Modi appréciera.

Mainichi Shimbun – Les évacuations des victimes se font encore attendre alors que des répliques ont encore eu lieu dans la préfecture de Kumamoto. Pour l’heure elles n’ont d’autres choix que de reste dans leurs logements dévatsés. Ce dimanche 12 juin, l’une d’elles a été enregistré à une magnitude de 5 sur l’échelle de Richter. C’est la plus forte réplique depuis le tremblement de terre du 16 avril, note le Mainichi. A Mashiki, ville touchée deux fois par des séismes de magnitude 7, et à Kashima, les évacuations ont débuté aujourd’hui mardi 14 juin. Mais les constructions temporaires ne seront pas totalement terminées avant fin juillet, précise le journal japonais. Dans le même temps, le village de Minamiaso, comprenant 800 habitations, est toujours privé d’eau.

Le séisme, d’une magnitude de 7 sur l’échelle de Richter, avait fait 49 morts à Kumamoto, et laissé 6 431 personnes à reloger. Dimanche 12 juin, 85 200 volontaires ont apporté leur aide à la préfecture sinistrée. Le gouvernement estime que ce tremblement de terre coûtera 190 milliards de yen (1,5 million d’euros).

Taipei Times – Depuis l’élection de Tsai Ing-wen et son investiture le 20 mai, la Chine redonne un coup d’accélérateur à la promotion de la réunification avec Taïwan. C’est ce qu’a indiqué Wu Hsin-hsing, le ministre taïwanais à la tête de la Commission des Affaires des compatriotes d’outre-mer, cité par le Taipei Times. Pékin a « réactivé » le Conseil chinois pour la promotion de la paix et la réunification nationale, soutenu par le gouvernement. Ce Conseil est présidé par Yu Zhengsheng, membre du Politburo du Parti communiste chinois.

Le ministre taïwanais a par ailleurs affirmé qu’il « avait pris note de la situation » et qu’il était « en train d’envisager toutes les possibilités » pour réagir. Lors de son discours d’investiture, Tsai Ing-wen avait refusé de reconnaître le « Consensus de 1992 ». L’accord entre le Kuomintang (KMT), l’ancien parti au pouvoir à Taïwan, et le gouvernement chinois reconnaissait le « principe d’une seule Chine », chacun interprétant à sa façon le mot « Chine », rappelle le Taipei Times.

Le Parti démocrate-progressiste (PDP) au pouvoir ne voit pas d’un bon œil la réactivation du Conseil chinois pour la promotion de la paix et la réconciliation nationale. « Les actions du Conseil sont inutiles dans le processus de réunification et ne feraient qu’augmenter le sentiment de rancœur des Taïwanais vis-à-vis de la Chine », prévient Wu Hsin-hsing. Le PDP demande aussi à la Chine de « prendre plus de temps pour écouter l’opinion publique taïwanaise et avoir ainsi une meilleure compréhension de ce les gens veulent à Taïwan ».

Asie du Sud-Est

Myanmar Times – L’état de grâce pour le gouvernement d’Aung San Suu Kyi a fait long feu, selon le Myanmar Times. « L’Occident avait accueilli avec joie la victoire de la Ligue nationale du développement (LND) lors des dernières législatives. Mais pour les musulmans de l’Etat du Rakhine, la nouvelle ère s’annonce déjà comme une déception, et ce n’est que le début », croit savoir quotidien birman.

« Les Rohingya ont enduré des décennies de harcèlement, de marginalisation, de purification ethnique et même de génocide d’après certains », rappelle le journal. Même Aung San Suu Kyi a une position « ambivalente » sur cette population apatride, refusant de les appeler par leur propre nom par peur « d’offenser un pays à majorité bouddhiste ». Le journal se pose même la question : « Est-ce que le premier gouvernement civil depuis les années 1960 sera meilleur que la junte ? »

Et le quotidien birman n’est pas des plus optimistes. Le ministère des Affaires étrangères dirigé par Aung San Suu Kyi a demandé à l’Ambassade américaine de ne plus employer le terme « Rohingya » indiquant que c’était « inutile pour résoudre le problème dans l’Etat du Rakhine ». Les Rohingyas sont plus souvent appelés « Bengalis », ce qui sous-entend qu’ils sont « vraiment des immigrés venus du Bangladesh ».

Les Rohingyas, ajoute l’éditorialise du Myanmar Times, seront aussi « déçus d’apprendre que Barack Obama a récemment alléger les sanctions envers Naypidaw pour récompenser le pays pour ses efforts vers la démocratie », sans mentionner que rien n’avait changé dans le traitement de cette ethnie musulmane.

Les Rohingya devraient être exclus du processus de paix que le gouvernement veut sceller avec les autres minorités, avance le quotidien. Aung San Suu Kyi a prévu la tenue d’une deuxième conférence de Panglong, en hommage à son père, le Général Aung San qui avait négocié avec les groupes ethniques en 1947 avant d’être assassiné. Mais les Rohingyas ne sont pas considérés comme des citoyens, précise le journal birman.

Depuis l’élection de novembre 2015, il n’y a aucun législateur musulman, alors que cette ethnie représente 3 millions de personnes en Birmanie. Un environnement néfaste qui pourrait donner envie aux Rohingya de quitter le pays au péril de leur vie dans des boat-people, comme ils ont pu le faire par le passé, essayant de trouver refuge dans d’autres pays musulmans d’Asie du Sud-Est.

Channel News Asia – C’est le deuxième ressortissant canadien exécuté par Abbu Sayyaf. Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a annoncé la nouvelle hier lundi 13 juin et les autorités philippines l’ont confirmée aujourd’hui. Plus tôt, on apprenait qu’une tête tranchée avait été retrouvée à proximité d’une cathédrale catholique au sud des Philippines, indique Channel News Asia, citant une source officielle.

Le président philippin, Benigno Aquino « condamne fortement la brutalité et le non-sens du meurtre de Robert Hall, après avoir été gardé captif par Abu Sayyaf les neuf derniers mois ». L’otage avait été capturé avec trois autres personnes sur l’île de Samal, dans un hôtel luxueux. Il aurait été décapité vers 3h de l’après-midi, heure de l’ultimatum lancé par Abu Sayyaf pour payer la rançon. Son compatriote, John Ridsdel avait, lui, été exécuté en avril dernier. Le groupe terroriste détient toujours un Norvégien et une Philippine. La sécurité de la région est encore précaire, rappelle Channel News Asia, malgré un traité de paix signé en 2014 entre le gouvernement et le plus grand groupe rebelle islamiste, le Front moro islamique de libération.

Straits Times – Les condamnés seront exécutés « immédiatement » après la fin du Ramadan le 7 juillet, ont annoncé les autorités indonésiennes, ce mardi 14 juin. On ne connaît pas encore l’identité des détenus qui seront exécutés. L’Indonésie a lancé une campagne contre les narcotrafiquants et ont puni de la peine capitale 14 personnes liées au trafic de drogue en 2015. La plupart était des étrangers, indique le Straits Times. Les autorités avaient ensuite indiqué vouloir se tourner vers la reprise de l’économie nationale et n’ont plus effectué d’exécutions depuis avril 2015.

Plusieurs ressortissants étrangers sont actuellement dans le couloir de la mort, suspectés d’être impliqués dans un trafic de drogue. Le Straits Times cite le Français Serge Atlaoui ainsi que la Philippine Mary Jane Veloso. Le président Joko Widodo avait « déclaré la guerre à la drogue » lors de son investiture en 2014. En avril 2015 deux Australiens, un Brésilien et un Nigérian avaient été exécutés, causant de sérieuses conséquences diplomatiques. L’Australie avait temporairement rappelé son ambassadeur à Jakarta, rappelle le Straits Times.

Asie du Sud

The India Express – Plus 250 soldats chinois auraient traversé la frontière de l’Arunachal Pradesh, au nord-est de l’Inde le 9 juin, rapporte The Indian Express. La « transgression » aurait eu lieu vers le fleuve Yangtsé et aurait duré quelques heures. Mais aucun incident entre soldats chinois et indiens ne serait à déplorer. Certains experts expliquent cette intrusion par le contexte géopolitique. La Chine est opposée à une entrée de l’Inde au Groupe de fournisseurs de nucléaire. De plus les Etats-Unis et le Japon sont en train de réaliser leurs exercices maritimes annuels sur la côte de Malabar, au sud-est de l’Inde.

Mais cette analyse serait fausse, selon The Indian Express. D’après les autorités indiennes, ces situations sont habituelles puisqu’elles se produisent environ deux fois par an car les Chinois ne reconnaissent pas exactement le même tracé de la frontière que les Indiens. Les soldats chinois ont ainsi grimpé durant quatre heures, repérés immédiatement par les soldats indiens. Puis ils sont repartis avant le coucher du soleil, la situation revenant à la normale.

Dawn – Le militaire pakistanais a succombé à ses blessures dans un hôpital de Peshawar ce mardi 14 juin. Il avait été blessé la veille par des tirs à la frontière afghane de Torkham, précise Dawn. Les accrochages entre les deux pays frontaliers ont commencé après l’instauration d’un pont par le Pakistan à la frontière. Les autorités pakistanaises ont jusitifié la construction de ce pont par leur volonté de « vérifier les mouvements de terroristes passant par Torkham » depuis le pays voisin.

Mais les Afghans ne « respectent » pas cette frontière et <"ont toujours refusé de réguler" le flux d’immigrés, d’après Islamabad. Depuis dimanche, des échanges de coups de feu ont lieu par intervalles entre les deux camps. Six civils pakistanais et 10 membres de la sécurité auraient été blessés, d’après Dawn.

Le ministère pakistanais des Affaires étrangères a demandé aux autorités afghanes d’enquêter sur les incidents et de prendre des mesures pour que ces événements n’arrivent plus. Du côté afghan, six personnes auraient été blessés, et un officier serait mort. Un cessez-le-feu avait pourtant été acté entre les deux Etats hier lundi 13 juin.

Kathmandu Post – Les déplacés affirment avoir été exclus du dispositif d’aides à la reconstruction des logements mis en place par le Bureau central des statistiques (CBS). Ils demandent à l’Autorité nationale de reconstruction (NRA) d’être inclus dans ce dispositif. Pour l’instant, 51 000 logements y sont intégrés alors qu’en 2011, le Bureau central des statistiques, estimait à 61 000 le nombre de logements présents dans le district de Dolakha. Seules les personnes dont le logement est listé peuvent bénéficier de l’aide du NRA.

Les victimes ont déposé plainte avec l’aide de partis politiques locaux, rapporte le Kathmandu Post. Les victimes tentent tant bien que mal de faire pression, menaçant de faire grève. Le Népal a été gravement touché par le séisme du 25 avril 2015, l’un des plus meurtriers dans le pays, faisant plus de 6 000 morts et 14 000 blessés.

Par Joris Zylberman, Liu Zhifan et Juliette Morillot, avec Anda Djoehana Wiradikarta à Paris

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