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Chine : mystérieuses allergies au nouveau lycée français de Pékin

Le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault visite le nouveau lycée français international de Pékin lors de son inauguration, le 16 mai 2016.
Le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault visite le nouveau lycée français international de Pékin lors de son inauguration, le 16 mai 2016. (Crédits : Fred DUFOUR / POOL / AFP)
Des yeux rouges, des plaques sur la peau, des saignements de nez. Au total, 16 cas d’allergies ont été recensés ces quinze derniers jours au Lycée français international Charles de Gaulle de Pékin. De quoi inquiéter les parents d’élèves qui se sont mobilisés sur les réseaux sociaux. Une quinzaine d’entre eux seront reçus ce vendredi après-midi par la direction du tout nouveau lycée français de la capitale chinoise. Des analyses mesurant les émanations provenant des équipements et des infrastructures de l’établissement devraient permettre d’en savoir un peu plus sur ces mystérieuses allergies.
« Cela a commencé par des petits boutons, puis des plaques sont apparues sur tout le corps de mon fils, avec des gonflements au niveau des chevilles, des poignets et de la gorge, confie un père d’élève en petite section. Impossible de marcher, impossible de dormir : seules des perfusions à la cortisone ont permis de venir à bout des démangeaisons ». « Mon fils m’a appelé en sortant du lycée, raconte un autre père de famille. Il avait comme un début de conjonctivite, puis il s’est mis à vomir. »

Ces témoignages recueillis par Asialyst permettent de mesurer le dégré d’inquiétude des parents d’élèves qui seront reçus ce vendredi après-midi par la direction du Lycée français de Pékin. Rassemblées sur deux groupes WeChat en français et en mandarin (environ 180 membres au total), ces « familles franco-chinoises » ont émis des doutes sur les conditions d’accueil des élèves dès l’ouverture du nouvel établissement inauguré en grande pompe par le ministre des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault, le 16 mai dernier.

Peintures encore fraîches

Il faut dire que le déménagement s’est fait dans l’urgence – si ce n’est dans la précipitation – pour ces familles. Le bail de l’ancien établissement dans le centre de Pékin étant arrivé à son terme, il n’était alors pas question pour les autorités françaises de jouer les prolongations jusqu’à la rentrée de septembre. Le premier jour d’école dans le nouveau lycée a eu lieu le 10 mai dernier, après les vacances de Pâques. « Les travaux ont un peu débordé, confie un parent d’élève, les peintures du nouveau lycée étaient encore fraîches. » Ce qui a d’ailleurs donné lieu à une première série de critiques sur les réseaux sociaux, certains élèves se plaignant des « fortes odeurs ».

L’institution a alors communiqué sur les taux de micro-particules présents dans les locaux. Dans une capitale tristement réputée pour sa forte pollution atmosphérique, les établissements scolaires – notamment étrangers – mettent en place des systèmes de filtres plus ou moins performants afin de limiter la présence de micro-particules 2.5 dans l’atmosphère. Concernant le Lycée français international Charles de Gaulle de Pékin, le système de purification de l’air donne visiblement de très bons résultats. Sur ce plan, les élèves comme les personnels du lycée peuvent respirer sans crainte.

Scandale des pistes de sports

Problème : et si ces émanations supposées allergènes ne provenaient pas de l’extérieur, mais de l’intérieur de l’établissement ? A ce jour, aucune étude n’a établi un quelconque lien entre le nouvel établissement français de la capitale chinoise et les allergies qui s’y sont produites. Ce qui n’empêche pas les familles de douter : « On s’est d’abord intéressé à la cantine scolaire, puis on a fait le tour de toutes les causes possibles, explique un parent joint par Asialyst. Il semble aujourd’hui que le problème vienne des matériaux et des infrastructures. » S’agit-il alors du mobilier, des murs, des revêtements de sol ?

Ces derniers jours, les claviers des smartphones ont frétillé autour des équipements sportifs flambants neufs et notamment du gymnase, de la piste d’athlétisme ou encore de la pelouse synthétique du stade qui « sent horriblement mauvais ». Les familles s’interrogent : les équipements du nouveau campus répondent-ils aux normes internationales de sécurité ? La question surgit alors qu’un scandale concernant des pistes de sport a éclaté récemment dans la presse chinoise (voir les articles du China Daily et du Shanghai Daily). Des élèves sont tombés malades en raison d’émanations provenant de revêtements de sol non conformes. « Nous voulons savoir quels sont les résultats des analyses de l’air réalisées au-dessus de la piste d’athlétisme, du stade et du gymnase » demandent en chœur les parents d’élèves sur WeChat.

Inquiétudes chinoises

« C’est vrai que les franco-chinois et en particulier les mamans chinoises sont plus paranoïaques vis-à-vis des questions de sécurité et de pollution, que les familles françaises qui font 100 % confiance à l’éducation nationale » souligne l’un des signataires d’une lettre recensant les cas d’élèves victimes d’allergies, adressée au proviseur du lycée. Le non respect des normes de sécurité fait encore régulièrement la Une des médias chinois et l’opinion publique de la deuxième économie du monde reste à fleur de peau sur ces sujets. Le moindre doute concernant la sécurité dans les établissements scolaires conduit immédiatement à une tempête de spéculations sur les réseaux sociaux.

« Nous sommes conscients de cela, rapporte encore un parent d’élève joint par Asialyst, cela dit il y aussi des papas et des mamans français qui sont choqués par ce qui est arrivé à leur enfant. Jusqu’à preuve du contraire, ce n’est donc pas seulement de la paranoïa. » Phénomènes liés aux fortes chaleurs ou aux équipements du lycée, les familles attendent les résultats des analyses ce vendredi avec impatience. Certains s’inquiétant par avance de l’impartialité de l’étude. A cause de la pollution de l’air, les expatriés quittent Pékin et il devient parfois difficile pour les établissements étrangers de remplir les classes : « Les enjeux financiers sont énormes, estime ainsi l’un de nos témoins. Une partie des locaux du nouveau lycée français pourrait être louée à une école hongkongaise ; si les résultats des analyses ne sont pas bons, cela fera mauvais genre. »

Par la Rédaction d’Asialyst

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