Revue de presse Asie - 6 janvier 2016

Bombe H en Corée du Nord, alliance sino-indonésienne contre le terrorisme et neutralité pakistanaise au Moyen-Orient

La Corée du Nord a annoncé avoir testé sa première bombe à hydrogène (bombe H)
La Corée du Nord a annoncé avoir testé sa première bombe à hydrogène (bombe H). Copie d'écran du New York Times, le 6 janvier 2016.

Asie du Nord-Est

La Corée du Nord teste sa première bombe H

The New York Times – La Corée du Nord a annoncé ce mercredi 6 janvier l’explosion de sa première bombe à hydrogène miniaturisée au alentours de 10h du matin. Dans un communiqué télévisé, Pyongyang a vanté le « succès complet » d’un essai demandé personnellement par Kim Jong-un, le quatrième depuis 2006. S’il était avéré, il s’agirait d’une montée en puissance de la force nucléaire du pays : la bombe H, qui fonctionne avec la fusion nucléaire, est plus puissante que la bombe A à fission, utilisée jusqu’ici par la Corée du Nord.

Justement, l’annonce reste encore difficile à confirmer. Ce n’est pas la première fois que Pyongyang revendique de nouvelles capacités nucléaires, souvent accueillies avec scepticisme par les experts. Le communiqué a cependant été diffusé une heure après que les services géologiques du monde entier ont constaté un séisme d’environ de 5 sur l’échelle de Richter sur la côte nord-est, là où le régime mène ses essais. Le Korea Herald rapporte la défiance de Séoul. Les services de renseignement estiment que la magnitude du séisme (mesurée à 4,2 en Corée du Sud) n’est pas assez forte pour l’explosion d’une bombe à hydrogène. Ils envisagent plutôt une bombe à fission améliorée, étape préliminaire vers une véritable bombe à fusion.

Les pays de la région ont rapidement réagi. Le gouvernement sud-coréen a condamné « fortement » l’essai dans un communiqué télévisé et assure qu’il « prendra toutes les mesures nécessaires » pour faire payer Pyongyang. Shinzo Abe a vu cet essai comme une « sérieuse menace » contre le Japon. La Chine « exhorte » son alliée « à tenir son engagement de dénucléarisation », et a évacué ses ressortissants proches de la frontière nord-coréenne. La Maison Blanche a promis « une réponse appropriée à toute provocation nord-coréenne » si le test était confirmé. Le Conseil de Sécurité de l’ONU doit se réunir en urgence cet après-midi à New York.

Chine : un tribunal régional étudie pour la première fois la question du mariage gay

Global Times – C’est peut-être une nouvelle étape pour les droits LGBT en Chine. Une Cour régionale de la Province du Hunan va instruire un procès sur l’union entre personnes de même sexe. Plaintiff Sun Wenlin, un homme gay sous pseudonyme, a annoncé au Global Times que la cour a accepté sa plainte contre un bureau administratif du district de Furong. Il l’a remplie en décembre dernier, quand l’enregistrement de son mariage a été refusé parce que seuls « un homme et une femme » pouvaient être acceptés.

Sa plainte est supportée en ligne par plusieurs militants LGBT. Maya Wang, une membre de Human Rights Watch, a expliqué au Straits Times que « Les Cours chinoises rejettent souvent les cas sensibles politiquement, donc le fait que ce procès soit accepté montre une certaine volonté officielle de prendre en compte les discriminations contre les populations LGBT, ce qui est encourageant. »

Japon : Tokyo s’inquiète du livre blanc sud-coréen sur les « femmes de réconfort »

The Japan Times – Le gouvernement japonais n’en a pas fini avec le dossier des « femmes de réconfort ». La Corée du Sud a annoncé la publication d’un livre blanc sur le sujet, mais dont le contenu exact est encore inconnu. L’exploitation sexuelle de ces jeunes femmes par les militaires de l’Empire nippon était pourtant le point central d’un accord bilatéral le mois dernier. Signé le 28 décembre 2015, il devait mettre fin à un désaccord entre Tokyo et Séoul vieux de plusieurs décennies. Il y est notamment écrit que « le problème est résolu de façon finale et irréversible », et les deux signataires s’engagent à « s’empêcher de s’accuser ou se critiquer mutuellement sur cette question au sein de la communauté internationale ». Le Japon pourrait voir la publication de ce livre blanc comme une violation de l’accord, même si le ministère sud-coréen des Affaires étrangères a annoncé que les deux étaient « sans rapport ».

Dans le même temps, des manifestants japonais et sud-coréens, surtout des femmes, étaient réunis à Tokyo cet après-midi, pour dénoncer l’accord bilatéral. Ils lui reprochent principalement d’ignorer la voix des victimes, et ne pas faire état de la responsabilité légale du Japon.

Asie du Sud-Est

Birmanie : le nouveau parlement convoqué plus tôt que prévu

The Irrawaddy – Plus qu’un mois de préparation pour les nouveaux députés birmans. La deuxième session de l’année du Parlement commencera le 1er février, a annoncé le président de la chambre basse. Soit quelques jours plus tôt que prévu. Un avancement qui laisse les députés nouvellement élus de la Ligue Nationale de la Démocratie (LND) avec peu de temps pour se former à la pratique parlementaire. Ce qui est loin d’être anodin tant le contrôle réel du pouvoir par le parti d’Aung San Suu Kyi s’annonce lent et difficile. Une session de formation de trois jours financée par la LND sera organisée mi-janvier. Le parti avait remporté près de 80% des sièges dans les deux chambres lors des élections de novembre 2015. Cette proportion ne prend pas en compte les 25% de sièges qui restent toutefois réservés aux militaires.

L’Indonésie s’allie à la Chine pour surveiller de potentiels djihadistes ouïghours

The Malaysian Insider avec Reuters – L’Indonésie se transformerait-elle en camp d’entraînement djihadiste ? Le chef de la division antiterroriste du pays, Saud Usman Nasution, ne cache pas ses inquiétudes quant à de potentielles attaques de sympathisants de l’Etat Islamique (EI). 13 hommes ont d’ailleurs récemment été arrêtés sur l’île de Java, dont un musulman ouïghour en possession d’une veste explosive. La minorité chinoise se révèle de plus en plus active au sein des réseaux militants indonésiens. Au cours de l’année, plusieurs personnes ont rejoint Santoso, terroriste ayant prêté allégeance à l’EI et basé dans la jungle de l’est de l’Indonésie.

Pékin craint le retour d’exilés bien entraînés à la pratique du djihad. « Nous coopérons avec la Chine et avons envoyé une équipe sur place pour enquêter sur la famille du kamikaze ouïghour arrêté », a ajouté Saud Usman Nasution dans une interview à Reuters reprise par le Malaysian Insider. Le ministère chinois des Affaires étrangères ne s’est pas encore exprimé sur une collaboration avec l’Indonésie. Les autorités indonésiennes estiment à 1 000 personnes le nombre de sympathisants à l’EI dans le pays, dont 100 à 300 auraient séjourné en Syrie.

Thaïlande : Prayuth Chan-ocha résistera-t-il à 2016 ?

The Bangkok Post – Les nouvelles résolutions du Premier ministre thaïlandais seront mises à rude épreuve cette année, soulève le Bangkok Post. Prayuth Chan-ocha aura trois challenges de taille à relever en 2016. Il devra tout d’abord continuer son combat contre la corruption et surtout, mettre fin rapidement au scandale autour du financement du parc de Rajabhakti, au coeur de l’actualité. La junte sera de nouveau en position délicate lorsqu’il faudra trouver un remplaçant au chef militaire Theerachai, amené à prendre sa retraite en septembre.

L’enjeu sera d’autant plus crucial que des élections générales s’annoncent en 2017. Mais ces dernières n’auront lieu que si la nouvelle charte réformatrice est adoptée par référendum en août prochain. Parmi les mesures polémiques, l’incorporation d’un nouveau système électoral, d’un Premier ministre non parlementaire et une révision du Sénat. Prayuth Chan-ocha peut toutefois être tranquille sur un point : la perspective d’un contre-coup d’Etat parait peu probable puisqu’il a la mainmise sur l’armée. Reste la population à convaincre, alors que le mécontentement se fait déjà sentir.

Asie du Sud

Inde : après Pathankot, les leçons à tirer sur la lutte antiterroriste

Firstpost – Trois jours. C’est le temps qu’il aura fallu aux forces indiennes pour éliminer six terroristes retranchés dans la base aérienne de Pathankot, au Pendjab – l’une des installations militaires les plus sécurisées du pays. Tout cela après les avoir repérés dans une voiture volée, dans laquelle ils ont conduit une quinzaine d’heures. Pour le quotidien Firstpost, la raison est simple : « Trop de décideurs, pas de décision ». Une réponse « chaotique » qui révèle l’impréparation indienne aux stratégies terroristes, socle de la « guerre contemporaine ». Le personnel et les soldats indiens raisonnent encore selon les schémas guerriers traditionnels. Ils ne sont pas prêts à faire face à des combattants ultra mobiles, ultra motivés et prêts à mourir – des terroristes tenants d’une « guerre par d’autres moyens ». Une nouvelle formation devrait donc être dispensée aux décideurs et aux forces armées, mais aussi aux cibles potentielles du terrorisme – par exemple, dans l’hôtellerie et l’éducation.

Le Pakistan ne doit pas prendre parti dans l’opposition entre l’Arabie Saoudite et l’Iran

Dawn – Un positionnement « raisonnable ». C’est ainsi que le quotidien pakistanais Dawn qualifie la décision d’Islamabad de s’ériger en médiateur entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, dont l’opposition ouverte accentue les fractures du monde musulman en ce début 2016. La ligne du gouvernement a été énoncée devant le Parlement par Sartaj Aziz, le conseiller diplomatique du Premier ministre Nawaz Sharif, Sartaj Aziz. Aux sources de cette neutralité, une combinaison d’intérêts « géographiques, géopolitiques et géoéconomiques ». D’un côté, de bonnes relations avec l’Arabie Saoudite, qui incarne un « bienfaiteur économique » pour le Pakistan – et qui s’attend donc à un « renvoi d’ascenseur ». De l’autre, un Iran frontalier du Pakistan, avec lequel les relations n’ont certes pas toujours été au beau fixe, mais qui partage des « liens culturels et religieux » avec Islamabad. Le gouvernement pakistanais ne peut donc se permettre de s’aliéner l’un ou l’autre s’il souhaite protéger « sa stabilité et son harmonie intérieures », conclut le quotidien.

Bangladesh : peine de mort maintenue pour le chef islamiste Motiur Rahman Nizami

Channel News Asia – La Cour suprême bangladaise a tranché. L’ancien ministre et leader du plus grand parti islamiste du pays (Jamaat), Motiur Rahman Nizami, sera bien exécuté « dans les prochains mois ». Il est accusé d’avoir orchestré des meurtres et des viols, notamment contre des intellectuels, lors de la guerre pour l’indépendance du Bangladesh (1971). Avant l’annonce du verdict, les autorités de Dacca ont renforcé la sécurité dans l’ensemble du pays : les précédentes condamnations d’officiels du Jamaat ont déjà fait plus de 500 morts lors d’affrontement entre la police et les militants – les violences les plus meurtrières depuis l’indépendance du pays.

Par Joris Zylberman, Alexandre Gandil, Mathilde Loire et Rebecca Zissmann

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