Revue de presse Asie - 5 janvier 2016

Libraire hongkongais disparu, mesures anti-corruption en Thaïlande et attentat en Inde

L'opération antiterroriste à la base de Pathankot (Inde) est toujours en cours
L'opération antiterroriste à la base de Pathankot (Inde) est toujours en cours, 3 jours après les premières attaques. Copie d'écran de The Indian Express, le 5 janvier 2016.

Asie du Nord-Est

Hong Kong : l’inquiétante disparition d’un libraire spécialisé dans les ouvrages critiques sur la Chine

South China Morning Post – C’est un mystère qui sème le doute jusqu’aux plus hautes sphères de l’administration locale. Lee Bo, libraire hongkongais spécialisé dans les ouvrages critiques sur le Parti communiste chinois (PCC), a disparu depuis vendredi. Son « évaporation » fait suite à celles de plusieurs de ses associés, employés de la maison d’édition Causeway Bay Books, qui ont disparu les uns après les autres ces derniers mois.

Que s’est-il passé ? Difficile encore de tirer des conclusions, indique le South China Morning Post – mais le gouvernement de Pékin n’y semble pas étranger… Ce week-end, la femme de Lee Bo a reçu un coup de téléphone de son mari, localisé à Shenzhen (à quelques kilomètres de Hong Kong). Il lui a expliqué « aider » l’administration locale à élucider les disparitions précédentes. Mais plusieurs détails mettent la puce à l’oreille des Hongkongais : Lee Bo a laissé son permis d’entrer sur le continent chez lui, le département de l’Immigration n’a pas enregistré son départ, et le Global Times (quotidien d’Etat) s’est fendu d’un éditorial accusant la librairie de Lee de vendre ses ouvrages aux continentaux, ce qui mettrait en péril la stabilité de l’Etat chinois.

Le chef de l’exécutif hongkongais, C.Y. Leung n’a pas tardé à réagir, en annonçant publiquement que la prise d’actions légales par les autorités continentales sur le territoire hongkongais était « inacceptable » et « anticonstitutionnelle ». Et le South China Morning Post de conclure : « Les autorités locales et continentales doivent examiner l’affaire en détail pour résoudre les tensions. »

Chine : Xi Jinping met en garde les cadres qui tenteraient d’entraver ses réformes

South China Morning Post – Personne ne sera épargné par la campagne anti-corruption. C’est le message délivré par Xi Jinping lors d’un meeting du PC chinois en février, publié ce vendredi dans une compilation de discours internes. « Sous l’Etat de droit, personne ne devrait faire le voeu pieux d’être pardonné », avait-il déclaré. Mais qui le président chinois vise-t-il en priorité ? Sur ce point, les analystes s’écharpent : l’ancien président Jiang Zemin ? Le prince rouge et ancien vice-président Zeng Qinghong ? Ou l’équipe dirigeante qui l’a précédé : Hu Jintao et Wen Jiabao ? Quoi qu’il en soit, tous s’accordent à dire que Xi Jinping veut dissuader la résistance potentielle de s’organiser. Depuis les événements de Tian’anmen en 1989, le PCC s’efforce d’offrir une image d’unité – au moins de façade.

Japon : les négociations sur les « femmes de réconfort » ne concerneront pas d’autres pays

The Japan Times – La Corée du Sud, et ce sera tout. Le Secrétaire général du Cabinet du Japon, Yoshihide Suga, a annoncé que les négociations sur les « femmes de réconfort » ne concerneraient pas d’autres pays. En d’autres termes, Taïwan, qui avait appelé Tokyo à ouvrir des discussions sur le sujet quelques jours après l’accord nippo-sud-coréen, n’a rien à espérer. Selon Yoshihide Suga, la question des femmes de réconfort avait déjà été réglée avec l’ensemble des pays concernés de la région. La négociation d’un accord avec la Corée du Sud se justifie par l’altération des relations bilatérales entre Tokyo et Séoul en raison de cet épineux dossier.

Corée du Sud : Park Geun-hye appelle au renforcement des capacités militaires du pays

The Korea Herald – 2016 marquera un « tournant » dans la diplomatie et les politiques de sécurité sud-coréennes. Voilà ce qu’a promis la présidente Park Geun-Hye ce mardi, lors de son premier conseil des ministres de l’année. Avec la réunification coréenne en ligne de mire, Séoul veut à la fois assurer une « défense nationale solide et fiable » en cas de provocation ou d’attaque du Nord, tout en faisant preuve de bonne volonté vis-à-vis du gouvernement de Kim Jong-un. Le président nord-coréen semble en effet enclin, pour l’instant, à mettre en place l’accord du mois d’août 2015 sur les rencontres entre familles séparées par la guerre de Corée (1950-1953).

En mer de Chine du Sud, premier atterrissage d’un avion chinois sur une île artificielle

Channel News Asia – C’est une première qui ne réjouit que la Chine. Un avion civil s’est posé dimanche sur une île artificielle construite par Pékin en mer de Chine méridionale, Fiery Cross Reef (dans l’archipel des Spratley), annonce Channel News Asia. Pour les experts et analystes étrangers, des avions militaires suivront irrémédiablement. Ce qui pourrait entraîner la création d’une zone de défense et d’identification aérienne chinoise de facto dans cette région disputée. Les gouvernements vietnamien et philippin, qui revendiquent leur souveraineté sur l’ensemble ou une partie de l’archipel des Spratleys, ont rapidement fait part de leur indignation.

Asie du Sud-Est

Thaïlande : mesures anti-corruption après l’affaire du parc historique Rajabhakti

Bangkok Post – Après des semaines de tergiversations de la part de la junte, l’affaire s’accélère. La Commission nationale anti-corruption a annoncé lundi ouvrir sa propre enquête sur les financements suspects du parc historique Rajabhakti. De son côté, le Centre anti-corruption national a aussi indiqué examiner les commissions illégales demandées par les fondeurs des statues des sept anciens rois thaïlandais qui trônent dans le parc. Ces investigations indépendantes viennent après la fin d’un panel du ministère de la Défense sur l’affaire qui avait eu un impact limité. L’autorité n’avait alors pas le pouvoir de forcer les propriétaires des fonderies à témoigner et était réticente à approcher les officiels haut-placés potentiellement impliqués.

De son côté, la junte n’est pas en reste. Une troisième liste d’officiels soupçonnés de corruption sera remise au Premier ministre Prayut Chan-o-cha dans les prochains jours, selon un autre article du Bangkok Post. Il reviendra au dirigeant de décider de leur transfert ou suspension.

Indonésie : le gouvernement va faire appel dans l’affaire des feux de forêt

Jakarta Globe – A la surprise générale, le tribunal de district de Palembang avait tranché mercredi 30 décembre en faveur de Bumi Meka Hijau. Selon les magistrats, l’entreprise de pâte et de papier ne pouvait être tenue responsable des feux de forêts qui s’étaient déclarés sur sa concession à l’été 2014. Le ministère de l’Environnement indonésien a annoncé planifier un recours en appel de sa plainte pour le lundi 11 janvier. Il demande à l’entreprise des compensations à hauteur de 524 millions d’euros, dont une campagne de restauration environnementale. Bumi Meka Hijau est accusée d’avoir continué à perpétrer ces mêmes pratiques en 2015, mais l’affaire n’a pas encore été portée aux tribunaux.

Thailande : les Anonymous se mêlent de l’affaire des meurtres de Koh Tao

Khaosod English – Ce n’est pas la première offensive du collectif de hackers sur le web thaïlandais. Les Anonymous ont attaqué les sites de la police thaïlandaise pour dénoncer la condamnation à mort le mois dernier de deux travailleurs migrants birmans pour le meurtre de deux vacanciers britanniques en septembre 2014, rapporte ce mardi le site Khaosod. Anonymous considère que les deux condamnés sont des boucs émissaires. 14 sites de la police ont été bloqués, mais certains avaient été rétablis ce mardi à la mi-journée. C’est la deuxième attaque d’Anonymous contre les autorités thaïlandaises après une première campagne en octobre quand la junte thaïlandaise avait annoncé un projet de « portail internet unique » pour contrôler le flot d’informations online entrant dans le pays.

Malaisie : les affaires de conversion ne peuvent être jugées qu’au tribunal de la Charia

The Malaysian Insider – Selon une décision de la Cour d’appel malaisienne, seul un tribunal de la Charia a l’autorité de déterminer si une personne est musulmane. Cette décision a été rendue publique lors de l’affaire de l’institutrice de maternelle Indira Gandhi. La Cour d’appel avait d’abord décidé le 30 décembre que les certificats de conversion à l’islam de ses trois enfants, obtenus par son mari, étaient valides. Indira Gandhi n’en avait alors même pas eu connaissance. La Cour a par la suite donné raison à la plaignante statuant que les affaires de conversion doivent être examinées par les tribunaux religieux. En Malaisie, l’islam et les tribunaux religieux sont sous la compétence des gouvernements de province. Ce dernier revirement laisse en réalité peu d’options à Indira Gandhi qui, n’étant elle-même pas musulmane, n’a pas justement accès aux tribunaux religieux adéquats. Son mari avait précédemment obtenu la garde de leurs enfants auprès d’un tribunal de la Charia en 2009 puis en 2010.

Vietnam : des « spywares » dans les Lenovo d’Etat

Tuổi Trẻ (en vietnamien) – La sécurité informatique de l’administration vietnamienne est-elle en danger ? Tous les services équipés par l’entreprise informatique chinoise Lenovo (la plupart des administrations locales et des ministères) ont en tout cas déconnecté leurs ordinateurs après l’alerte nationale lancée par le département de Protection des Secrets d’Etat d’Hai-Phong. Le lieutenant général de Police qui a lancé l’alerte, Đỗ Hữu Ca, explique que ces ordinateurs sont équipés d’un logiciel qui « transmet à Lenovo — en principe — les données techniques de la machine : numéro de série, IP, lieu de connexion, trafic, etc. » Et d’ajouter : « C’est une menace réelle sur la sécurité d’Etat ! » Et alors que le représentant local de Lenovo dément tout espionnage, le correspondant d’Asialyst au Vietnam note qu’un vent de panique souffle sur les administrations, les entreprises publiques et privées. Tous attendent un audit plus poussé des ordinateurs.

Asie du Sud

Inde : Opérations toujours en cours à la base militaire de Pathankot

The Indian Express – Une nouvelle explosion a retenti à l’intérieur de la base de Pathankot en début d’après-midi ce mardi, alors que des opérations sont toujours en cours. Les forces de sécurité tentent de trouver les terroristes encore retranchés dans la base : ils seraient au moins deux. Le nombre de terroristes reste encore incertain : au moins cinq ont été tué, et un sixième corps est recherché. Tout a commencé samedi 2 janvier quand des hommes armés ont pris d’assaut cette base militaire de la région du Pendjab, frontalière avec le Pakistan. Sept personnes ont été tuées, et dix-sept blessées pendant l’attaque, selon le dernier bilan. Les attaquants étaient pakistanais, et l’attentat a déjà été revendiqué par le Conseil djihadiste uni (MJC), qui lutte contre la présence indienne au Cachemire.

The Indian Express raconte aussi que les premiers hommages ont été rendus aux victimes de l’attentat, considérées comme des « martyrs ». Pendant ce temps, le Premier ministre Narendra Modi a réuni les membres de son gouvernement pour discuter de cette attaque et de celle qui a touché dimanche un consulat indien en Afghanistan. Des critiques se sont déjà fait entendre quant à la mauvaise gestion de l’attentat, qui aurait pu être évité selon certains experts, rapporte le quotidien pakistanais Dawn. The Hindustan Times fait notamment état de brèches de sécurité à la frontière entre le Pendjab et le Pakistan.

Inde : « Garder le cap » des pourparlers avec le Pakistan après les attentats

Dawn – Les réactions se multiplient après l’attentat contre la base militaire de Pathankot, revendiqué par un groupe terroriste pakistanais. Le quotidien pakistanais Dawn a étudié les éditoriaux des grands journaux indiens. Après ce que le Times of India appelle « le premier grand défi pour la nouvelle politique de paix de Modi avec le Pakistan », les médias exhortent le gouvernement à continuer le dialogue avec Islamabad. Car, écrit le Hindustan Times le but des terroristes étaient justement de creuser un nouveau fossé entre Modi et son homologue pakistanais Nawaz Sharif.

Le gouvernement américain a lui aussi réagi, demandant à Islamabad de prendre des mesures sévères contre les terroristes, raconte The Indian Express.
Les Etats-Unis encouragent les pays d’Asie du Sud à « travailler ensemble » pour anéantir la menace terroriste. Seule position discordante, celle du parti indien d’extrême-droite Shiv Shena, pour qui Modi devrait cesser tout dialogue avec le Pakistan pour « se concentrer sur l’Inde ».

Pakistan : Renforcement des contrôles à la frontière afghane

The Express Tribune – Davantage de points de contrôle à la frontière entre le Pakistan et l’Afghanistan : les autorités de Bajaur ont pris cette mesure pour enrayer l’infiltration de militants talibans. L’agence de Bajaur, subdivision administrative des Régions tribales du Pakistan, est frontalière avec la province afghane du Kunar. C’est de cette région qu’opère le groupe terroriste Mouvement des Taliban du Pakistan (TTP). D’après les forces de sécurités, ils attaquent régulièrement les villages frontaliers et les représentants du pouvoir pakistanais, à qui ils s’opposent ouvertement.
Par Joris Zylberman, Alexandre Gandil, Mathilde Loire, Rebecca Zissmann, avec Arnaud Dubus à Bangkok et Vo Trung Dung à Hô-Chi-Minh-Ville.

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