Coup de jeune politique

Japon : la majorité électorale abaissée à 18 ans

Photographie d'affichages municipaux au Japon.
Affichage des 49 candidats à l’élection municipale de Nara le 20 juillet 2013. (Crédit : Jean-François Heimburger)
Réunis en séance plénière ce mercredi 17 juin, les sénateurs japonais ont approuvé à l’unanimité le projet de loi sur le passage de la majorité électorale de 20 à 18 ans. Près de 2,4 millions de jeunes sont concernés. De quoi gonfler l’électorat de 2,3 %.
Cet abaissement avait été validé par la Chambre des députés le 4 juin et voté à l’unanimité par un comité sénatorial de législateurs ce lundi 15 juin. Dans ce pays vieillissant, la nouvelle peut ravir la jeunesse, de plus en plus chargée par les impôts et assurances sociales. Au plus tôt, elle pourrait exprimer son opinion lors des sénatoriales de l’été 2016.
Or, comme ailleurs, le devoir citoyen se bonifie avec l’âge. « L’intérêt de la génération des 18-20 ans pour la politique ou pour les élections n’est pas forcément élevé », estime Masahito Tadano, professeur de droit à l’université Hitotsubashi, interrogé au téléphone par Asialyst. Selon le ministère des Affaires générales, seuls 32,58 % des 20 à 29 ans ont participé aux élections législatives de 2014, contre 52,66 % en moyenne. « Mais si le système change et que ces jeunes obtiennent le droit de vote, il est possible qu’ils se sentent plus concernés », poursuit M. Tadano.
Ce nouveau droit de suffrage, soutenu par la majorité et l’opposition, ne semble pas avantager un parti plus qu’un autre. Car le niveau d’absentéisme dépendra aussi de la capacité des hommes politiques à présenter des projets attractifs pour les jeunes. « Depuis 2013, il est autorisé de faire campagne via internet et les réseaux sociaux, rappelle Masahito Tadano. Il sera sans doute nécessaire de réfléchir à de nouveaux types de campagne ».

Premier élargissement depuis 70 ans

Censitaire jusqu’en 1925, le suffrage est d’abord devenu universel pour les hommes. C’est en 1945 que la majorité est passée de 25 à 20 ans et que le droit de vote a été étendu aux femmes. De 50 % au lendemain de la guerre, le taux d’électeurs, qui gonfle avec le vieillissement, passerait aujourd’hui à près de 84 %.
Soutenu par la population, ce nouvel abaissement fait suite à la modification en 2014 de la loi de 2007 sur la procédure de révision de la Constitution. Celle-ci a donné la possibilité, à partir de l’été 2018, aux Japonais de 18 ans et plus de participer à un référendum en matière de révision des textes fondamentaux.

Vers une majorité civile à 18 ans ?

Si la majorité électorale nipponne évolue, il n’en est pour l’instant pas de même pour les majorités civile et pénale. L’âge à partir duquel un individu accède à la pleine capacité d’exercice est fixé à 20 ans au Japon. Avant d’atteindre ce palier, il ne peut par exemple ni se marier sans le consentement de ses parents, ni acheter de l’alcool et des cigarettes, ni posséder une carte de crédit. Par ailleurs, du point de vue criminel, la peine éventuelle encourue par un individu est toujours subordonnée à des conditions exceptionnelles entre 14 et 19 ans inclus.
L’abaissement de ces majorités est discuté, mais les sondages de ces dernières années montrent que la plupart des Japonais y restent défavorables. « Cela prend un temps considérable pour instaurer la majorité à 18 ans dans toute la législation, précise le professeur Tadano, car il est nécessaire de modifier plusieurs centaines de lois ».
Par Jean-François Heimburger
Graphique Jeunes droit de vote
(Crédit : Jean-François Heimburger)
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