Cette semaine en Mer de Chine du Sud - 25 juin 2016

Mer de Chine : les ambitions de Pékin au centre de tous les regards

Wang Yi, le chef de la diplomatie chinoise, s'exprime lors du sommet des ministres des affaires étrangères de Chine et de l'ASEAN à Yuxi, dans la province méridionale du Yunnan en Chine, le 14 juin 2016.
Wang Yi, le chef de la diplomatie chinoise, s'exprime lors du sommet des ministres des affaires étrangères de Chine et de l'ASEAN à Yuxi, dans la province méridionale du Yunnan en Chine, le 14 juin 2016. (Crédits : STR / AFP)
C’est désormais la norme, l’actualité des mers de Chine s’est encore avérée particulièrement chargée ces dernières semaines. Et les vastes ambitions chinoises en mer de Chine méridionale étaient de nouveau sur toutes les lèvres. Tour d’horizon non exhaustif de quelques faits significatifs survenus récemment à ce sujet, mais aussi de quelques questionnements posés par la presse pour l’avenir de cette partie du monde. La mer de Chine du Sud se trouve plus que jamais au centre des enjeux du XXIe siècle, de la mondialisation des échanges et de ce qui se rapproche pas à pas d’une nouvelle « guerre froide » entre les Etats-Unis et la Chine.
Retour sur une semaine en mer de Chine du Sud à travers la presse asiatique et internationale.

Multiplication de phares chinois dans les Spratleys : pour le bien de l’humanité ?

Le Quotidien du Peuple – La Chine prévoit d’ici la fin de l’année la mise en fonctionnement de nouvelles installations dans les îles Spratleys, disputées par ses voisins, a-t-on appris par l’intermédiaire de l’agence Chine nouvelle, reprise sur Internet par Le Quotidien du peuple. D’abord, un hôpital devait être inauguré fin juin sur Fiery Cross, avec 4 000 m2 de jardin, comme sur Subi, où l’agriculture de légumes et l’élevage de poulets, de canards, de cochons et d’oies sont déjà pratiqués.

Ensuite, après le phare de Subi, mais aussi ceux de Cuarteron et Johnson South, dixit la presse chinoise, deux phares supplémentaires sont désormais en construction sur les récifs de Mischief et de Fiery Cross. Le premier, situé dans la partie orientale de cet atoll revendiqué notamment par les Philippines, « fait plus de 60 mètres de haut et constitue la plus haute pièce de l’architecture des Nansha [nom chinois des Spratleys, NDLR] », relate la presse pékinoise.

« La présence grandissante de phares chinois et d’installations de secours va offrir de meilleures conditions à la Chine pour assumer ses responsabilités et obligations internationales en matière de recherches en mer et de sauvetage, de lutte contre les catastrophes naturelles et de protection de l’écologie marine », selon l’officiel Zhang Jie.

Bloomberg – La Chine a-t-elle l’intention de construire, par 3 000 mètres de fond en haute-mer, une plate-forme habitée dédiée à la recherche d’hydrocarbures, voire à des objectifs stratégiques et militaires plus officieux ? A en croire l’agence de presse Bloomberg, qui s’appuie sur une présentation publique du ministère chinois des Sciences, le projet existe plus que jamais et serait même en phase d’accélération, considéré comme une priorité technologique majeure pour les années à venir, même si Pékin ne précise pas où déployer une telle base sous-marine.

« Une station habitée établie sur le long terme, cela n’a jamais été tenté si profondément, mais c’est certainement possible », remarque, dans les colonnes de Bloomberg, le chercheur Bryan Clark, du Center for Strategic and Budgetary Assessments de Washington, qui note que « des sous-marins habités se rendent à de telles profondeurs depuis près de 50 ans ». Une fois opérationnelle, la possible plateforme chinoise, potentiellement mobile, pourrait accueillir des dizaines de membres d’équipage pendant des missions d’un mois, le temps de s’intéresser au plus près à ce que le président Xi Jinping appelle « les trésors non découverts et non développés » des eaux profondes.

Encore mieux : une « Grande Muraille » sous-marine pour contrer les Américains

IHS Jane’s 360 – Le remue-méninges chinois est manifestement loin de s’arrêter là. Selon les très sérieux analystes d’IHS Jane’s 360, qui ont décortiqué d’autres documents d’Etat, la China State Shipbuilding Corporation (CSSC) veut développer ce qu’elle appelle son « Projet de Grande Muraille sous-marine ». Autrement dit, un système de capteurs en réseau, susceptible – nous dit-on – de rétablir la balance entre la Chine et ses rivaux en matière de guerre sous-marine, ainsi que d’aider au contrôle stratégique de la mer de Chine méridionale. Il s’agirait d’une version réactualisée du Sound Surveillance System (SOSUS), « qui donna un temps aux Etats-Unis un avantage significatif pour contrer les sous-marins soviétiques pendant la guerre froide », explique IHS Jane’s.

Il est question, selon le groupe CSSC, de surveillance et de collecte de données en environnement sous-marin, de localisation en temps réel, de traçage de cibles à la surface ou sous l’eau, d’alertes aux raz-de-marée, tsunamis et autres désastres, ainsi que de recherches scientifiques marines. Si un tel système devrait être fourni à l’armée chinoise – cela va de soi -, la Chine assure également qu’elle souhaite l’ouvrir à la vente, comme de nombreux autres systèmes développés jusqu’ici. Mais le sens du partage pékinois reste à vérifier dans ce cas précis.

Rapport de force sino-américain : réquilibrage sous l’eau, mais aussi dans les airs

CNN – Aux Etats-Unis, un rapport parlementaire de la U.S.-China Economic and Security Review Commission s’inquiète des capacités du fameux nouveau missile balistique chinois antinavire DF-26, à portée intermédiaire. Une évolution du DF-21, d’une portée supposée de 3 400 miles américains, et révélée au public lors de la parade militaire du 3 septembre 2015 à Pékin, pour les 70 ans de la capitulation japonaise. Le rapport pointe que la portée du DF-26 lui permet aisément d’atteindre, avec des charges conventionnelles, l’île américaine de Guam, et sa base aérienne Andersen, situées à 2 500 miles américains de Pékin. D’où son surnom : « Tueur de Guam ».

« Au premier rang des atouts militaires de la Chine capables d’atteindre Guam, le DF- 26 IRBM représente l’aboutissement de décennies de progrès chinois en matière de missiles balistiques conventionnels », pointe le rapport. CNN rappelle qu’environ 6 000 Américains sont basés sur Guam. « Les dirigeants chinois pourraient se montrer plus enclins à recourir à la force militaire en cas de crise, s’ils considèrent pouvoir neutraliser Guam avec succès, car ce territoire serait alors un point-clé pour le soutien de forces américaines opérant plus à l’Ouest », craignent les auteurs du rapport. Et de conclure que leur inclusion dans la parade militaire pékinoise « indique qu’ils ont probablement été déployés comme une arme opérationnelle ».

Suite des visites de courtoisie américaines près des Chinois dans les Spratleys

CNN – Comme le note la chaîne de télévision américaine, le rapport parlementaire est sorti le même jour qu’une opération de la Navy pour défendre la liberté de navigation dans les Spratleys, le 10 mai dernier. La marine américaine a envoyé un destroyer armé, l’USS William P. Lawrence, dans les 12 milles marins entourant le récif Fiery Cross, principal bastion chinois dans l’archipel, doté d’une piste d’atterrissage. Il s’agissait à nouveau de tester la réaction de Pékin, et de défendre le droit aux « passages inoffensifs » en mer de Chine du Sud, définis par les textes internationaux comme « un transit au cours duquel un bateau ne conduit aucune activité militaire, commerciale ou de recherche », rappelle CNN.

Selon le ministre chinois de la Défense, Pékin a répondu en envoyant deux chasseurs J-11, un Y-8 et trois navires de guerre. « Les vaisseaux chinois ont lancé une douzaine d’avertissements par radio selon un officiel américain, mais ils ne se sont pas approchés aussi près du navire américain qu’ils ne l’avaient fait les dernières fois », assure CNN. Mais Pékin a dénoncé « une entrée non autorisée », « un acte sérieux de provocation », ou encore « une menace pour la souveraineté de la Chine et pour ses intérêts sécuritaires ». Qu’à cela ne tienne : « Cette opération démontre, comme le président Obama l’a affirmé, que les Etats-Unis continueront de voler, naviguer et opérer partout où le droit international les y autorise. C’est vrai en mer de Chine méridionale, comme dans n’importe quel autre endroit du monde », a réagi le Pentagone.

Nouvelle visite de courtoisie américaine auprès de l’allié philippin également

Reutersem – Le 18 juin, les Etats-Unis ont déployé à l’est des côtes de l’allié philippin deux porte-avions, à savoir l’U.S. John C. Stennis et l’U.S. Ronald Reagan, pour une mission d’entraînement, incluant notamment des exercices de défense aérienne, ou encore de la surveillance maritime. Le chef des opérations, l’amiral John Richardson, a précisé que le déploiement de deux de ces bâtiments dans les mêmes eaux et en même temps était plutôt rare. Un symbole, selon lui, de l’engagement des Etats-Unis pour la sécurité régional. Comprendre : pour la défense des Philippines, allié de longue date qui partage un pacte de défense mutuelle avec Washington. « Nous serons là pour nos alliés, pour les rassurer », a-t-il déclaré, alors que les relations entre Pékin et Manille restent tendues. Le chef militaire américain ne nie d’ailleurs pas que les actions de Washington visent à perturber le déploiement des intérêts chinois en mer de Chine méridionale.

Et un jour, les bombardiers chinois débarquèrent à leur tour dans les îles Spratleys

IHS Jane’s 360 – Les Américains peuvent encore naviguer où ils le souhaitent en mer de Chine du Sud et ailleurs dans le monde. Mais pour combien de temps ? IHS Jane’s 360 indique que lors de la première semaine de mai, un média d’Etat chinois a révélé que les forces aériennes de l’armée avaient fait voler à une date inconnue des bombardiers H-6K au-dessus de Fiery Cross, sans que l’on sache combien d’avions étaient impliqués dans cette mission chinoise, ou s’ils avaient atterri ou non sur le récif poldérisé par Pékin. « Le déploiement du bombardier le plus récent de l’armée de l’air chinoise est significatif, car il prouve que la Chine a la volonté d’employer un système d’armement stratégique capable de transporter des armes nucléaires pour défendre ses nouvelles « îles bases » et des revendications plus larges en mer de Chine méridionale », considère IHS Jane’s.

De facto, il ne s’agit effectivement que d’une confirmation, puisque plusieurs pistes d’atterrissage élaborées par Pékin dans l’archipel des îles Spratleys ont la capacité, de par leur longueur, d’accueillir tous les types d’aéronefs que compte l’Armée de libération du peuple dans ses rangs, y compris des bombardiers. Ce qui apporte à ce pays, bien qu’il démente officiellement vouloir militariser la sous-région, les infrastructures stratégiques pour le faire.

Un léger parfum de guerre froide sino-américaine à Singapour

The Daily Star (Bangladesh) – Les ministres de la Défense et les chefs militaires de la région Asie-Pacifique étaient à Singapour du 3 au 5 juin 2016, pour la 15e session du Dialogue annuel Shangri-La. La scène est racontée par l’ancien ambassadeur bangladais en France, Mahmood Hasan : « Le conclave de trois jours a été inauguré par le Premier ministre thaïlandais, le général Prayut Chan-ocha. La large délégation chinoise était conduite par l’amiral Sun Jianquo. (…) Le secrétaire à la Défense Ashton Carter a dirigé la délégation américaine, qui incluait le sénateur John McCain (…) et six autres sénateurs. Mais les activités chinoises affirmées en mer de Chine méridionale se sont avérées être le seul sujet majeur de discussion en plénière. »

M. Carter a appelé les pays de la région partageant les mêmes valeurs à construire une série de partenariats entre eux pour la facilitation du partage des ressources. Il a aussi prévenu la Chine que ce qui la guettait, c’était de se construire elle-même une « Grande Muraille de l’isolation ». Ce à quoi l’amiral Sun Jianguo a répondu que la Chine ne produisait pas de troubles, mais ne les craignait pas non plus : « Nous n’étions pas isolé dans le passé, nous ne sommes pas isolés aujourd’hui, et nous ne serons pas isolés à l’avenir. Certaines personnes et pays regardent toujours la Chine avec une mentalité et des préjugés de guerre froide. Ils devraient construire une muraille dans leur propre esprit et cesser de s’isoler eux-mêmes. »

« Ce qui est notable, c’est que les membres participants ont tranquillement refusé de prendre part à la prise de bec Etats-Unis-Chine. Les délégués de l’ASEAN n’ont même pas critiqué la Chine », remarque M. Hasan. Et d’ajouter : « Il est intéressant de noter qu’au moment où Ashton Carter soufflait le chaud à la Chine à Singapour, un souriant secrétaire d’Etat John Kerry atterrissait à Pékin pour le Dialogue annuel stratégique et économique (6-8 juin 2016) avec la Chine. Vraiment, les relations sino-américaines sont vastes et compliquées. »

Conflits territoriaux, CNUDM et arbitrage philippin contre la Chine : la France s’en mêle !

Ambafrance Singapour – La France, qui contrôlait autrefois une partie des îles Spratleys et Paracels, s’est exprimée au sujet des conflits des mers de Chine, par la voix de son ministre de la Défense, invité à Singapour début juin pour la 15e édition du Dialogue Shangri-La. « 85 % de notre Zone économique exclusive de 11 millions de km2, soit la deuxième au monde, est située dans les océans Indien et Pacifique. Plus d’1,6 million de ressortissants français résidant dans cette zone. Nous entretenons une présence militaire permanente de 8 000 hommes et femmes », a rappelé Jean-Yves Le Drian, avant de prononcer un plaidoyer pour la primauté du droit et la défense de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM). « Si le droit de la mer n’est pas respecté aujourd’hui dans les mers de Chine, il sera menacé demain en Arctique, en Méditerranée ou ailleurs. Pour que les risques de conflit restent contenus, il nous faut défendre le droit, et nous défendre nous-mêmes par le droit », a-t-il notamment fait valoir.

Il n’en fallait pas plus pour que Paris se retrouve classé parmi ceux qui soutiendront la décision tant attendue de La Haye dans l’explosif litige sino-philippin en mer de Chine méridionale.

Vers des patrouilles européennes en mer de Chine méridionale sous impulsion française ?

Bloomberg – Jean-Yves Le Drian ne s’est pas arrêté là. Comme Bloomberg l’a dûment noté, il a parlé aussi de liberté de navigation et de patrouilles en mer, thème de prédilection des Américains. « La France continuera de faire vivre son message, a déclaré le ministre, en faisant naviguer ses bâtiments et voler ses aéronefs partout où le droit international l’y autorise, et où les besoins opérationnels les mènent. Plusieurs fois par an, des bâtiments de la marine nationale française transitent par les eaux de cette région, et il continuera d’en être ainsi. Depuis le début de l’année, ce sont trois déploiements qui ont déjà été conduits par notre marine. »

Et de formuler son annonce principale du jour : « La situation en mer de Chine concerne directement l’Union européenne, et pas seulement à cause de l’intérêt de nos économies à ce que la liberté de circulation maritime soit respectée. Dès lors, pourquoi ne pas envisager que les marines européennes se coordonnent de manière à assurer une présence aussi régulière et visible que possible dans les espaces maritimes en Asie ? Je détaillerai prochainement cette proposition à mes collègues européens, et j’espère que lors de la prochaine édition du Shangri-La, nous pourrons, ensemble, en mesurer les effets. »

Conflits territoriaux en mer de Chine : quel rôle pour Hanoï ?

CIMSEC – Pendant son intervention à Singapour, le ministre français de la Défense a également prononcé cette phrase : « Nous souhaitons développer de nouveaux partenariats avec l’ensemble des pays de l’ASEAN, et je me rendrai d’ailleurs cet après-midi même au Vietnam, pour renforcer notre coopération de défense. » L’histoire liant le Vietnam et la France est complexe, puisque la France coloniale a joué un rôle significatif dans l’élaboration des revendications actuelles d’Hanoï en mer, par le biais de son lègue à l’Etat du Vietnam, devenu ensuite le Vietnam du Sud avant d’être avalé par le régime communiste nord-vietnamien, qui a dès lors repris les revendications des nationalistes à son compte. Mais le passé est le passé, et face aux ambitions chinoises, Paris semble enclin à ouvrir un nouveau chapitre avec Hanoï, quitte à se montrer peu regardant sur les activités du Vietnam dans les Spratleys. Aussi, le 2 mai dernier, un porte-hélicoptères d’assaut amphibie de la marine française, le Tonnerre, est arrivé dans le port vietnamien de Cam Ranh, nouvellement qualifié de « port international » à des fins commerciales, et ce pour une visite de quatre jour. A la mi-mars, un vaisseau de Singapour en avait fait de même, et à la mi-avril, deux navires japonais aussi.

« Longtemps, Hanoï a été invité à ouvrir ce port aux vaisseaux étrangers dans la région, mais le Vietnam souhaitait s’assurer que cela ne concernerait pas n’importe quel pays », expliquent en choeur les chercheurs Zachary Abuza et Nguyen Nhat Anh, qui décryptent la nouvelle ambition vietnamienne sur le site du think tank américain Center for International Maritime Security (CIMSEC).

Une chose est sûre : le Vietnam n’est plus « persona non grata »

Le Monde« Je peux vous annoncer que les Etats-Unis lèvent totalement l’embargo sur la vente d’équipements militaires au Vietnam. » Voilà ce qu’a déclaré Barack Obama en personne, lors de sa visite historique au Vietnam, une première depuis la venue symbolique de Bill Clinton il y a 16 ans. En somme, la Guerre du Vietnam est bien finie, et Hanoï va pouvoir continuer à renouveler son arsenal. « La Chine est évidemment en ligne de mire de cette nouvelle donne stratégico-militaire. Plus que jamais, le Vietnam est inclus dans la vision stratégique américaine en Asie-Pacifique à l’heure de la construction de bases chinoises sur des îles de la mer de Chine du Sud, territoires également revendiqués, entre autres pays, par le Vietnam. Hanoï et Washington ont tous les deux besoin de coopérer dans la région même si, chacun de leur côté et pour des raisons qui leur sont propres, ils font attention à ménager la Chine », analyse le quotidien Le Monde. Mais pour l’ancien diplomate vietnamien Nguyen Ngoc Truong, aujourd’hui directeur du Centre d’études stratégiques et de développement international, l’aspect militaire est secondaire, le Vietnam préférant encore pour l’instant acheter du matériel russe moins coûteux : « La réelle portée de cette décision va surtout être de montrer que les Etats-Unis soutiennent les Vietnamiens », décrypte-t-il, toujours dans les colonnes du Monde.

Invités par Pékin, des pays de l’ASEAN tentent de faire front uni. Sans succès

The Wall Street Journal – Dans une région où chaque pays dépend plus ou moins de la Chine économiquement, et où cette dernière privilégie habituellement les « tête-à-tête » pour discuter des problèmes, évitant ainsi les coalitions entre ses petits rivaux, que dire de cette affaire ? Mardi 14 juin, des représentants de dix Etats membres de l’ASEAN ont été invité par la Chine à Yuxi pour discuter de la mer de Chine méridionale. Problème : ils sont parvenus à se réunir pour exprimer leur « sérieuse préoccupation » face aux tensions galopantes.

Mais leur front de façade s’est vite érodé, puisque leur déclaration a été rétractée quelques heures plus tard, explique le Wall Street Journal. « De hauts diplomates de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est ont exhorté au respect du droit international dans le règlement des différends, un coup à peine voilé au refus de Pékin d’accepter la décision de l’arbitrage tribunal de La Haye », écrit le média américain. Mais « plusieurs heures après leur communiqué, le ministre malaisien des Affaires étrangères a dit que l’ASEAN rétractait son document, pour effectuer quelques changements. (..) Un diplomate confirmé d’un pays de l’ASEAN a expliqué plus tard que le bloc avait décidé de ne pas délivrer de communiqué conjoint, et que les Etats membres allaient délivrer des déclarations individuelles s’ils le souhaitaient. »

Et pendant ce temps-là, la Chine réitère : la décision de La Haye ne vaut rien à ses yeux

Japan Times – La Chine l’aurait redit à ses partenaires asiatiques tout récemment, selon un article de la presse japonaise daté du 21 juin : elle ne reconnaîtra pas la décision que prendra la Cour permanente d’arbitrage dans le litige qui l’oppose aux Philippines si cette décision lui est défavorable. Mais cette fois, Pékin serait allé beaucoup plus loin dans ce raisonnement, puisque la République populaire de Chine aurait fait savoir à ses voisins qu’elle avait tout bonnement l’intention de quitter la Convention des Nations unies pour le droit de la mer, qu’elle a ratifiée en 1996, en cas de décision favorable aux sollicitations de Manille à l’encontre de ses activités en mer de Chine méridionale. C’est du moins ce que croit savoir le journal Japan Times sur la base d’indiscrétions diplomatiques. Cela dit, notons que les Etats-Unis n’ont jamais ratifié cette convention internationale, censée servir de « Constitution des océans ».
Par Igor Gauquelin

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